En 2021, Sébastien Berthebaud a créé son entreprise, Vectura System. L'objectif : aider les logisticiens, les spécialistes des flux de marchandises, à décarboner leur flotte de camions. Depuis le Consulat général de France à Hambourg, où il participe à l'organisation d'un évènement du réseau franco-allemand La Tech Hambourg, l'ingénieur motoriste revient sur la création de sa start-up, et nous parle de ses liens avec l'Allemagne et de l'entrepreneuriat franco-allemand.


La relation de Sébastien Berthebaud à l'Allemagne remonte à loin, du temps de ses études et d'un double diplôme d'ingénieur à Karlsruhe, à la frontière avec la France. Séduit par le pays, il décide d'y rester pour son stage de fin d'études, et s'aventure cette fois-ci bien plus à l'est, à Chemnitz.
L'ingénieur y trouve son premier emploi, pour une entreprise du coin qui l'enverra d'abord à Paris, puis en Angleterre, et finalement dans la capitale allemande, où il restera six ans. Des années qui lui ont permis de développer « des liens très forts » avec l'Allemagne, nous confie-t-il.
Transformer une passion en idée innovante
Comment germent les idées des entrepreneurs ? Pour comprendre comment a surgi celle derrière Vectura System, il faut faire un détour par la passion de Sébastien Berthebaud pour les véhicules anciens. Le lien entre les voitures d'avant-guerre et la décarbonation des camions de marchandises d'aujourd'hui peut sembler ténu... et pourtant.
En 2015 et de retour en France, Sébastien Berthebaud reprend l'entreprise FORM/ULTING, basée à Nantes. « C'est une entreprise pour former les mécaniciens à réparer des véhicules anciens », nous explique l'ingénieur et entrepreneur, un « milieu passion ». Il rejoint également les fédérations française et internationale des véhicules d'époque. Ses responsabilités d'administrateur du collège professionnel de la fédération française l'amènent à rencontrer des responsables des ministères des Transports français et allemand, pour discuter des possibilités de faire rouler des véhicules des années 1930-1950 au milieu de véhicules modernes, autonomes, électriques...
En échangeant avec les ministères, j'ai remarqué qu'il y avait un vrai sujet sur l'évolution et la décarbonation des flottes au niveau européen. On parlait beaucoup des voitures, en revanche, les camions et la logistique étaient encore très faiblement abordés.
Un camion consomme pourtant beaucoup plus qu'une voiture. Dans l'Union européenne, c'est près de 25% des émissions de CO2 du secteur des transports qui sont émises par des poids lourds, selon l'Agence européenne de l'environnement. C'est ainsi qu'émerge l'idée originelle derrière Vectura System : hybrider les camions utilitaires pour décarboner l'activité. Cependant, la création d'entreprises innovantes est une activité notoirement marquée par les rebondissements, et Vectura System n'y échappera pas : « C'est la vie d'une start-up, ça fonctionne toujours comme ça », constate Sébastien, pragmatique.
S'adapter face à l'imprévisibilité du parcours entrepreneurial
Le premier bâton dans les roues prend la forme d'un frein réglementaire : la start-up n'a pas l'autorisation d'hybrider les véhicules en France. Sébastien Berthebaud mobilise alors ses contacts en Allemagne, qui lui assurent que la situation réglementaire est différente de ce côté-ci du Rhin, et qu'il pourra y déployer son activité.
Reste à savoir où s'implanter. Si, pour une entreprise étrangère, s'installer dans la capitale paraît plus évident, Sébastien Berthebaud prend le temps d'étudier d'autres possibilités. Et rapidement, une ville ressort : Hambourg. La cité hanséatique est en effet « un des cœurs de la logistique en Allemagne, avec de gros logisticiens, ainsi que le Digital Hub Logistics » (un réseau mettant en lien grosses entreprises, jeunes pousses et secteur académique et de la recherche dans le domaine de la logistique), rappelle le fondateur de Vectura System. Les nombreuses années passées en Allemagne lui ont offert les connaissances pratiques nécessaires pour y implanter son entreprise : la réglementation, le réseau, la langue... L'entrepreneur prend donc le large, et accoste à Hambourg à l'été 2023.
Le deuxième rebondissement tient plus au cœur de l'activité de l'entreprise : « Pour le moment, les logisticiens ne sont pas prêts à acheter beaucoup de véhicules hybrides, or pour une start-up, il faut du volume pour séduire les investisseurs », nous explique-t-il.
Face à ce constat, la jeune entreprise privilégie l'adaptabilité, et lâche la partie hybridation pour développer un logiciel accompagnant les logisticiens dans la décarbonation de leur flotte : « Concrètement, pour un logisticien qui possède par exemple mille véhicules diesel, cela revient à savoir quand il doit acheter cinquante véhicules électriques, ou cinquante au gaz, lesquels passer à l'hydrogène, à l'hybride, à l'électrique ? ». Le tout dans l'objectif de diminuer leurs coûts d'usage, tout en réduisant leurs émissions de CO2.
Jusqu'à ce que de nouvelles possibilités de développement s'ouvrent pour Vectura System. Le Pôle Mer Bretagne Atlantique, cluster de l'innovation dans le domaine maritime, approche Sébastien Berthebaud, avec une question : est-il possible d'adapter l'activité de la start-up vers l'hybridation de bateaux ? L'entrepreneur répond par l'affirmative. Débute alors un premier projet avec les marins pêcheurs bretons, « pour analyser leur flotte et les accompagner dans la décarbonation de leurs bateaux ».
Aujourd'hui, l'entreprise développe une deuxième initiative à Montpellier, et est également en contact avec des marins pêcheurs espagnols.
L'aventure de Vectura System ne fait que commencer.
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