Alors que le groupe franco-allemand La Tech Hambourg organisait son premier événement début mai au Consulat général de France à Hambourg, Le Petit Journal s'est intéressé à ces profils de Français venus travailler dans la ville hanséatique, et qui œuvrent à leur échelle pour l'approfondissement de la coopération franco-allemande. Aujourd'hui, Ludovic Ciannarella, chargé de lancer l'entreprise française Lemonway en Allemagne, et installé à Hambourg depuis dix ans.


Le lien à l'Allemagne, déterminé tant par le personnel que le professionnel
C'est un Européen convaincu qui nous fait face dans la salle de réception du Consulat : Ludovic Ciannarella est franco-italien, marié à une Allemande, et père de filles nées en Espagne... « Difficile de dire d'où je viens, mais je sais que je suis Européen », nous confie-t-il dans un rire, avant de préciser, à nouveau sérieux, ne pas réduire l'Europe au seul couple franco-allemand. Mais, en partant de son vécu, ce sont ces deux pays qui s'imposent. Ses premiers liens avec l'Allemagne remontent à une jeunesse alsacienne, et l'allemand en première langue. Puis vient l'âge du service militaire, et il est envoyé à Berlin, où il rencontre son épouse. De là, les pérégrinations européennes s'enchaînent, au fil de sa carrière.
A l'image de sa vie personnelle, sa vie professionnelle se tisse entre la France et l'Allemagne, avec un interlude espagnol à la fin des années 2000. En début de carrière, il est embauché par AirPlus International, filiale spécialisée dans les produits financiers de la compagnie aérienne allemande Lufthansa, dans laquelle il restera dix-sept ans. D'abord basé à Paris, il passe par Madrid et Francfort, avant de s'arrimer à Hambourg à partir de 2014. Cette longue expérience lui permet d'acquérir une bonne connaissance des cultures professionnelles des deux pays.
On est voisins, mais on a quand même un certain nombre de différences dans la façon de travailler, la culture, la façon d'approcher les timings, les objectifs, les meetings. J'étais surpris, lors de mes premières réunions en Allemagne, de voir les personnes se battre pour convaincre et faire passer leurs idées, alors qu'en France, il peut y avoir une certaine passivité lors des meetings. En Allemagne, il y a un vrai engagement, car ce qui est décidé en réunion, c'est à 80% ce qui va être exécuté. En France, certaines réunions peuvent être plus une formalité qu'un engagement du groupe.
Cette expertise des relations interculturelles en entreprise lui sera précieuse, puisqu'il rejoint en 2020 Lemonway, « une fintech française qui fournit une solution de paiement dédiée pour les marketplaces et les plateformes », avec la mission de la développer en Allemagne, depuis Hambourg. Pourquoi Hambourg ? Outre le fait que Ludovic Ciannarella y soit déjà installé depuis plusieurs années, la ville abrite également le siège d'Otto, plus grande marketplace en Allemagne après Amazon, et a vu émerger ces dernières années un écosystème fintech qui compte désormais une centaine d'entreprises. Des arguments qui convainquent Lemonway d'en faire son port d'attache en Allemagne.
Une volonté de développer les liens entre la France et Hambourg
Après dix ans passés à Hambourg, l'affection pour la ville transparaît dans les propos de Ludovic Ciannarella : « C'est une ville où il fait bon vivre, et qui m'a beaucoup donné. » Dans son engagement au sein de La Tech Hambourg, il y a peut-être aussi l'envie de rendre quelque chose à Hambourg. Il tient en tout cas à souligner les atouts d'une cité qu'il estime largement méconnue des Français.
Le premier réflexe des entreprises françaises est d'aller à Berlin, mais est-ce pour autant l'écosystème le plus pertinent pour toutes les activités ? Sans doute pas, si l'on prend les secteurs de la logistique, de l'aéronautique, mais aussi de plus en plus la fintech et le e-commerce. Les entreprises qui travaillent dans le domaine des médias et de la publicité auraient intérêt à se connecter avec l'écosystème hambourgeois.
Constatant l'existence de Communautés French Tech à Berlin, Munich et Düsseldorf, que Hambourg n'en compte pas encore lui est apparu comme une anomalie. « Hambourg est pourtant la deuxième ville d'Allemagne, et un pôle industriel et de services important, donc je me suis dit que ça aurait du sens de connecter l'écosystème de Hambourg avec la tech française. » De là, il échange avec d'autres Français installés à Hambourg, notamment Pauline Gauthier, fondatrice de la French Tech Düsseldorf, mais également avec Valerie Luebken, la consule générale de France à Hambourg. Rapidement, un groupe dynamique et motivé s'organise, avec pour objectif de candidater pour obtenir le label Communauté French Tech à l'horizon 2026.
« L'objectif premier est assez simple : il s'agit de rapprocher le couple franco-allemand dans la sphère hambourgeoise et dans le domaine de la tech. Ça me réjouit de pouvoir accompagner des start-up technologiques, en leur facilitant les activités de réseautage, l'accès à des investissements, et pourquoi pas à des partenaires et des clients, et ce grâce à notre réseau. Je pense que c'est un chouette pari ! ». Il perçoit la labellisation French Tech comme un gage de confiance, qui permettrait de crédibiliser des entreprises françaises de la tech. « Le marché allemand, comme le français d'ailleurs, a une aversion au risque, et n'aime pas aller vers l'inconnu. Donc il faut créer cette confiance, et c'est ce que permet le label French Tech . »
Un engagement dans la coopération franco-allemande
Son implication au sein du réseau La Tech Hambourg, il la voit également comme un moyen de participer, à son échelle, à la coopération franco-allemande. Qui plus est dans le domaine de la technologie, qui recouvre des secteurs cruciaux, comme l'intelligence artificielle, l'armement, les risques de fraude ou encore la sécurisation des paiements. Renforcer le moteur franco-allemand, selon l'expression consacrée de ce côté-ci du Rhin, c'est aussi une manière d'éviter que les fleurons continentaux ne soient rachetés par des entreprises extra-européennes.
Favoriser les connexions entre la France et l'Allemagne, ça nous permet de mettre notre pierre à l'édifice dans une logique de souveraineté européenne. Pour moi, c'est le but ultime, même si pour y arriver, il y a encore beaucoup d'étapes.
Pour recevoir gratuitement notre newsletter du lundi au vendredi, inscrivez-vous !
Pour nous suivre sur Facebook, Twitter, LinkedIn et Instagram.