Le gouvernement autrichien verse une somme d’argent à ses citoyens pour compenser l’augmentation de la taxe carbone. Selon les régions, elle est échelonnée entre 110€ et 220€.
« Ceux qui optent pour un comportement respectueux du climat garderont une plus grande part du bonus climatique en poche. », promet le gouvernement autrichien. Mis en place dans une réforme de la fiscalité écosociale en 2022, ce modèle est à mi-chemin entre la subvention et l’indemnisation.
Si certains pays ont réalisé de semblables mesures depuis quelques années, d’autres pourraient s’en inspirer. C'est d'ailleurs l'un des chantiers du gouvernement allemand qui peine à se concrétiser.
Comment fonctionne le Klimabonus ?
Annoncé comme reconduit en 2023 par le Parlement autrichien en juin dernier, les versements vers les comptes des bénéficiaires ont lieu depuis le 5 septembre. Jusqu’à la mi-octobre, près de huit millions d’Autrichiens recevront entre 110 et 220€ sur leur compte en banque ou sous forme de bon d’achat dans leur boîte postale.
Financé par la tarification du CO2 et d’autres mesures contre les entreprises polluantes, ce modèle de redistribution a été affiné à l’échelle régionale. 110€ sont perçus par tous puis chaque région détermine des zones où les citoyens répartis en 4 catégories toucheront en plus soit 110€, 75€, 40€ pour les trois premières catégories. La dernière catégorie ne reçoit pas d'argent supplémentaire.
Le gouvernement autrichien veut ainsi encourager les comportements éco-responsables. Pour réduire les émissions de CO2 devenue de plus en plus chères, éviter les solutions polluantes permettra à présent de profiter plus largement de cette somme versée par l’Etat.
Une vidéo explicative mise en ligne sur la chaîne YouTube du ministère complète les explications de son site internet en reprenant l’arrière-plan ludique du jeu Mario Bros, valorisant ainsi toute la simplicité de la mesure.
Qui reçoit le Klimabonus ?
Parce que le Klimabonus est aussi une mesure sociale, la coalition noire-verte (ÖVP, Die Grünen) a tenté de répartir l’attribution du bonus selon la typologie des milieux urbains et ruraux. Il est ici question d’accès aux services publics tels que les écoles ou les hôpitaux, mais aussi de qualité des transports en commun.
Ainsi, les citoyens bénéficiant de l’ensemble des 220€ sont ceux domiciliés dans les régions rurales du pays où il est moins accessible d’opter pour des solutions respectueuses du climat et économiques en émission de CO2.
Pour percevoir l’argent sur son compte, il n’y a rien à faire : le système est automatisé grâce à une collecte préalable des IBAN auprès des banques. Pour les Autrichiens qu’on ne parviendrait pas à joindre de cette façon, un bon de réduction est envoyé à l’adresse de résidence. Il est utilisable dans plusieurs enseignes ou convertissables en espèces dans les banques partenaires.
La seule condition est en fait d’avoir vécu six mois ou 183 jours dans l’année au domicile indiqué. Certains binationaux ou transfrontaliers ayant une résidence en Autriche dans laquelle ils ont passé la moitié de l’année peuvent ainsi légalement en profiter, même sans la nationalité autrichienne.
Un coup de pouce qui donne de l'air aux familles les moins aisées
Pour ce qui est des cas particuliers, les personnes en situation de handicap perçoivent systématiquement 220€ tandis que les enfants voient leur bonus divisé par deux jusqu’à leur majorité.
Le graphique ci-dessous, par Zeit Online, illustre pour chaque décile de la population autrichienne l’augmentation de la tarification du CO2 pour le chauffage et les carburants (en rouge) ainsi que l'allègement permis par le Klimabonus en pourcentage du revenu net.
Le Klimabonus donne de l’air aux ménages les moins aisés pour faire face à la flambée des prix de l’énergie.
Lecture : Le Klimabonus permet aux 10% des ménages les moins aisés d’Autriche de soulager leur budget à hauteur de 5,22% au-delà de leur salaire net.
Un coup de pouce qui ne fait pas l’unanimité
L’année dernière, l’Autriche faisait les gros titres pour les quelques biais de cette mesure écosociale. En versant un peu trop automatiquement son Klimabonus à sa population, des centaines de personnes décédées ont reçu leur chèque elles aussi. Sans possibilité de transfert ou de retrait, le gouvernement a décrété que les sommes seraient transférées aux héritiers des individus décédés.
Pour redresser la barre, la ministre de la Protection du climat, Leonore Gewessler a annoncé que la campagne se poursuivra et que les connaissances acquises lors du traitement seront utilisées pour améliorer la précision des transferts.
L’opposition autrichienne trouve aussi son mot à redire. Selon la FPÖ, la délimitation des zones de subvention régionale n’est pas assez précise. Pour eux, un code postal ne suffit pas à désigner une condition de vie et ils souhaiteraient ainsi prendre en compte les types de chauffage disponibles pour le logement.
Globalement, l’opposition considère le Klimabonus comme un modèle de redistribution pas assez ciblé ni sur le climat ni sur les catégories qui en ont besoin. Les différents partis préconisent plutôt des incitations en ne distribuant pas cette prime à tous les citoyens.
L’Allemagne lorgne son voisin
L’institut allemand pour la recherche économique (DIW) a récemment partagé une étude affirmant que trois Allemands sur quatre seraient favorables à l’introduction de cette mesure. La manifestation pour le climat du 15 septembre en est un bon exemple puisque le Klimabonus est l’une des revendications de Friday for future.
La coalition tricolore, quant à elle, poursuit ses querelles thématiques et ne parvient pas à faire émerger un projet concret. Le Klimabonus faisait pourtant partie des promesses de campagne de Robert Habeck en 2021. Pour l’instant, il souhaite rééquilibrer l’augmentation des prix de l’énergie mais pas nécessairement avec un chèque climat à échéances fixes. Son dossier principal reste toujours la loi sur le chauffage où le consensus n’est pas évident non plus.
En attendant, Habeck préfère rejeter la faute sur son ministre des Finances Christian Lindner (FDP) qui ne parvient pour l'instant pas à trouver un moyen de transférer concrètement et efficacement l’argent aux citoyens.
Et ailleurs, reçoit-on des sous pour être écolo ?
Les Autrichiens ne sont pas les seuls à avoir adopté ce modèle. Au Canada, les citoyens reçoivent un allègement d’impôt similaire. La taxe sur le CO2 du gouvernement Suisse lui a aussi permis d’en reverser une partie à la population et aux entreprises, quels que soient leurs revenus et leur consommation d’énergie.
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