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Les spectacles KÖNIG : transformer la scène drag berlinoise

La troupe König redéfinit le drag en incluant femmes queer et personnes non-binaires. Leurs spectacles mêlent théâtre et drag, brouillant les genres et célébrant la diversité avec bienveillance.

Trois artistes drag sur scène.Trois artistes drag sur scène.
© Gaspard Hasselot - LPJ Allemagne
Écrit par Gaspard Hasselot
Publié le 23 mai 2024

Pendant longtemps, l’art drag fut une chasse gardée de l’homme cisgenre Le drag est apparu par nécessité au XVIe siècle, lorsque les hommes devaient jouer des rôles féminins au théâtre shakespearien. Le terme « drag » proviendrait des robes traînant sur le sol. Au XVIIIe siècle, la première drag queen connue en Angleterre était Princess Seraphina, alias John Cooper, un serviteur qui incarnait ce personnage dans la vie quotidienne. La première occurrence du terme de drag provient de la pièce de Shakespeare As you like it où une femme, Rosalind, se déguise en homme, Ganymede, pour parvenir à ses fins.

 

Première page de la pièce de Shakespeare As you like it
Première page de la pièce de Shakespeare As you Like it. © Wikipedia

 

Le drag a gagné en popularité au début du XXème siècle avec des artistes comme Julian Eltinge, célèbre pour sa capacité à convaincre le public qu'il était une vraie femme. Le drag a connu une période difficile pendant les années 1930, mais a survécu avec des artistes comme Danny La Rue et Dame Edna Everage. Dans les années 1970, les drag balls de New York ont introduit le concept de "drag mothers" et de "maisons", où des drag queens expérimentées guidaient les nouvelles recrues.

 

artiste drag sur cène
Buba Sababa, fondateurice de la troupe, sur scène le 19 novembre. © Gaspard Hasselot

Le drag est devenu un phénomène global au XXIème siècle avec l’émission Rupaul’s drag race. L’émission a toutefois été souvent critiquée pour mettre en avant un drag exclusivement d’un homme cisgenre imitant les codes féminins. Il suffit pourtant de voir un show de la troupe König pour comprendre que le drag est aujourd’hui une discipline bien plus large et inclusive. Le drag semble remplir sa fonction principale d’art queer : permettre à toutes les voix d’être visibilisées et célébrées. Le show commence et l’on entend : « Ce show est le produit du travail de femmes queer et de personnes non-binaires. Seront représentées des drag kings et drag quings ». Ces termes désignent des personnages brouillant les codes de masculinité, tantôt en les exagérant, tantôt en les floutant.

 

 

Les shows Königs mêlent également le théâtre et l’art drag ; deux disciplines qui étaient davantage à unir qu’à opposer. Une histoire nous est racontée : celle d’un roi né femme qui ne souhaite pas perdre sa légitimité en révélant son sexe biologique et que le spectacle encourage à accepter et célébrer l’identité qui lui est fidèle. Le spectacle est entrecoupé de shows drags d’artistes arpentant la scène pour la première fois. Durant le spectacle naît entre les artistes et le public naît une certaine communion fondée sur la bienveillance mutuelle.

Ce spectacle est le produit de notre communauté. Il nous rappelle que notre communauté est tout ce que l'on a.

Lawunda Richardson, hôte de l'événement

Dans la salle, tous les profils coexistent, animés par une passion ou un intérêt commun pour l’art drag ; beaucoup sont des habitués du Tipsy Bear, le bar où se produit König : « Ici, je me sens appartenir à une communauté. Cela va au-delà de simples centres d’intérêts : j’aime voir des gens aux expériences de vie similaires aimer des choses similaires. » L’inclusivité se matérialise aussi par la variété du public. Tom, n’appartenant pas à la communauté queer, a tenu tout de même à venir par intérêt pour l’art drag : « Je sais que je ne suis pas 100% à ma place ici, mais c’est justement là que se trouve ma place. Je suis là pour célébrer un art qui m’intrigue et m’enthousiasme. » Le sentiment de communauté est une partie intégrante de l’art drag, qui est né dans la stigmatisation de la communauté queer.

 

 

Voir aujourd’hui cet art transcender au-delà de ses intentions et de son public, met en avant sa capacité à se réinventer pour porter les nouvelles voix queers. Buba Sababa, créateur.ice de la troupe, met en avant que la communauté soit ce qui permet au projet d’exister et de survivre. Il faut d’ailleurs noter que les shows Königs ne coûtent que 5 euros, un tarif qui ne permet d’exister qu’à travers les tips de fin de spectacle. Outre les shows, König organise également tout au long de l’année des ateliers financés par la ville de Berlin au cours desquels chacun peut apprendre les bases du drag. Ces ateliers sont animés par plusieurs professeurs et personnalités queers berlinoises.

 

Pour suivre l’actualité de König, il est possible de s’abonner au compte instagram de la troupe @konig_dragshow ou leur site internet. Les prochaines dates de performance sont les 16 et 17 juin et les 21 et 22 juillet.

 

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