Le 4 mars 2023 a ouvert l’exposition « Wir bleiben – Gentrification und Widerstand in Berlin » (Nous restons – Gentrification et Résistance à Berlin), créée dans l’espace ouvert de BERLIN GLOBAL du Forum Humboldt. Son but est de remettre en question et de dénoncer la gentrification croissante de la capitale allemande.
La gentrification, qui peut être définie comme la réappropriation d’espaces populaires par les classes les plus favorisées, est un thème d'actualité. Depuis les années 90, elle est visible dans la capitale allemande, mais le phénomène s’est réellement emballé dans les années 2010. Ainsi, c’est toute la ville et ses quartiers qui se trouvent modifiés, aussi bien dans l’architecture que dans les commerces présents et la vie culturelle.
Trois artistes en collaboration pour un projet de collage
L’exposition a été initiée par trois artistes qui ont souhaité mettre en lumière cette réalité : Barbara Bernardi, artiste et cinéaste italienne à Berlin depuis 2008, Linda Paganelli, anthropologue visuelle, cinéaste et artiste qui s’est installée à Berlin en 2017 et Vincent Voignier, artiste et photographe français basé à Berlin depuis 2003.
Pour réaliser cette exposition, ils se sont focalisés sur une question centrale : « Comment voulons-nous montrer la gentrification dans notre projet ? »
Comment voulons-nous montrer la gentrification dans notre projet ? » - Barbara Bernardi, Linda Paganelli et Vincent Voignier, artistes fondateurs de l'exposition « Wir bleiben – Gentrification und Widerstand in Berlin »
Leur objectif est de créer un paysage fictif via des collages pour montrer la gentrification et ses conséquences sur le paysage urbain et culturel de Berlin. Ainsi, l’exposition est faite de juxtaposition de photographies et de vidéographies rassemblées par les artistes.
Elle narre l’histoire des individus qui sont touchés par ce phénomène, grâce à plusieurs témoignages et interviews. Ces derniers mettent en lumière le parcours de ceux qui se battent pour rester à Berlin malgré la gentrification qui mène notamment à une augmentation des prix et à un sentiment d’illégitimité.
L’exposition « Wir bleiben – Gentrification und Widerstand in Berlin » donne ainsi la parole aux personnes qui refusent de quitter la capitale allemande pour sa périphérie, et qui doivent mettre en place des stratégies de résistance qui passent par des manifestations, des stratégies d’auto-organisation et la mise en place d’une solidarité forte entre personnes concernées.
Le choix du Humboldt Forum
Cette exposition est visible au Humboldt Forum, le musée qui a été construit sur le lieu occupé par le château de Berlin puis par le palais de la République de l’ex-RDA. Ouvert en 2020, il a accueilli ses premières expositions en juillet 2021.
Le choix de ce lieu pour cette exposition peut poser question, notamment au vu des polémiques qu’il a engendré. Avant même son inauguration, un collectif qui le condamne s’est fondé, le No Humboldt 21 : il reproche au projet d’être « euro-centrique, restauratif et rétrograde ». Le communiqué écrit par le collectif insiste particulièrement sur l’ancrage colonial du musée, en mettant en avant le fait que les plus de 500.000 pièces d’expositions qui proviennent du monde entier ont souvent été obtenus par la colonisation et la violence.
Les mêmes revendications sont portées par certains groupes et activistes, ce qui explique leur refus de participer et de témoigner pour l’exposition. Selon eux, le Forum Humboldt est une institution qui représente un pouvoir colonial et centralisé, et qui efface l’histoire de la RDA.
Néanmoins, les trois artistes sont conscients de ces reproches et tentent de désamorcer ces biais dans leur travail. Ils entendent questionner et dénoncer la gentrification de Berlin sans pour autant oublier leur statut privilégié de personnes blanches issues des classes moyennes à la vision européenne du monde.
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