Carsten Höller est un artiste singulier. D'abord entomologiste, cet Allemand né en 1961 à Bruxelles consacre ses premiers travaux à l'étude de la communication olfactive entre les insectes. Il se tourne progressivement vers l'art pour tenter de réconcilier, à sa manière, la science et la mystique. Après l'installation, qui fit sensation, de toboggans géants à la Tate Modern Gallery de Londres en 2007, Carsten Höller investit désormais la Hamburger Bahnhof pour une exposition sobrement intitulée SOMA
Carsten Höller est un artiste singulier. D'abord entomologiste, cet Allemand né en 1961 à Bruxelles consacre ses premiers travaux à l'étude de la communication olfactive entre les insectes. Il se tourne progressivement vers l'art pour tenter de réconcilier, à sa manière, la science et la mystique. Après l'installation, qui fit sensation, de toboggans géants à la Tate Modern Gallery de Londres en 2007, Carsten Höller investit désormais la Hamburger Bahnhof pour une exposition sobrement intitulée SOMA
En guise d'introduction, une citation tirée des Rigveda, textes sacrés hindous : "Nous avons bu le Soma, nous sommes devenus immortels, nous avons vu la lumière, nous avons rejoint les Dieux". De quoi vouloir, nous aussi, consommer de cet élixir, le soma. Boisson mythique, mystique, utilisée par les Hindous, elle est considérée comme un des premiers hallucinogènes de l'humanité, dont la recette perdue a occupé de nombreux botanistes et ethnologues au cours du siècle dernier.
Questionner les frontières de la perception
Inspiré par la découverte en 1968 par Gordon R. Wasson de l'utilisation d'un similaire breuvage - un mélange d'amanite tue-mouche et d'urine de rennes - dans les rituels mystiques de peuples sibériens, Carsten Höller prend prétexte de celle-ci pour s'amuser à questionner, dans un cocasse dispositif animalier, les frontières de la perception et de la science.
L'exposition, gigantesque et d'une clinique sobriété, est une véritable expérience scientifique. Au centre de l'immense verrière de l'Hamburger Bahnhof, séparés par une barrière, sont situés deux groupes de six rennes : un groupe test et un groupe contrôle. Au dessus, douze canaris (six de sexe féminin et six de sexe masculin) piaffent allègrement dans les volières suspendues et reliées par deux balances centrales. Un grand lit rond, placé en hauteur, fait office de point d'observation. Les deux allées latérales alignent des frigos contenant l'étrange mixture de sibériens, obtenu grâce à de l'urine de rennes qui avaient au préalable ingéré des amanites tue-mouches, et des terrains de jeux pour des souris. Enfin, des reproductions gigantesques d'amanites tue-mouches trônent à la fin de l'exposition.
Le spectateur, élément clé de l'installation
A quoi rime donc tout ce déballage zoologique ? Invité à prendre de la hauteur et à adopter un regard objectif, "scientifique", en s'installant sur les gradins installés de chaque cotés de la grande halle, le spectateur devient l'élément clé de l'installation. Sujet de l'œuvre, il prend part à ce "tableau vivant". A lui d'observer si le comportement des souris et des canaris change après absorption du soma. A lui de valider l'expérience. Si le visiteur ne ressort pas avec la ferme conviction que le soma est un breuvage miracle, il aura du moins la sensation d'avoir participé à une expérience scientifique et artistique singulière. Peut-être un peu moins certain des frontières – apparemment si solides – entre le rêve et la réalité.
Mélanie Van Kempen (www.lepetitjournal.com - Allemagne) vendredi 10 décembre 2010
Renseignements complémentaires : Expoistion Soma jusqu'au 6.02.2011. Hamburger Bahnhof, Invalidenstrasse 50/51, U-Bahn Hauptbahnhof. Mardi au vendredi : 10h- 18h, Samedi: 11h-20h, Dimanche : 11h-18h, 8 euros (4 euros tarif réduit)