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Christopher Street Day à Berlin, un évènement controversé

Le mois des fiertés à Berlin se terminera ce samedi 27 juillet avec la traditionnelle parade du Christopher Street Day (CSD). Du 28 juin au 28 juillet, une série d’événements a eu lieu pour accroître la visibilité et célébrer les droits des personnes homosexuelles, bisexuelles, transsexuelles, intersexuelles et asexuelles (LGBTQIA+). Cependant, de plus en plus de voix s’élèvent pour souligner que les aspects non seulement festifs mais aussi commerciaux de cet événement prennent le dessus sur la lutte pour l’avancée des droits des personnes LGBTQIA+.

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L'entreprise deutsche Telekom se pare du drapeau LGBTQIA+, un exemple de "Pinkwashing" ? © Jonathan Kemper - Unsplash
Écrit par Marion Köhler
Publié le 23 juillet 2024, mis à jour le 25 juillet 2024

Le « Pinkwasing » ou l’instrumentalisation de la cause LGBTQIA+ à des fins commerciales

L’an dernier, la participation du groupe Axel Springer à la parade, a fait scandale et a intensifié la controverse autour de l’évènement. La maison d’édition avait publié des informations conservatrices et trompeuses sur les personnes trans*, intersexes et non-binaires. Mais les critiques concernant la commercialisation excessive des Pride CSD ne sont pas nouvelles. Depuis de nombreuses années, la communauté LGBTQIA+ s’exaspère de voir des chars arborant les logos d’entreprises telles que H&M, Mercedes Benz ou Sony. Ces entreprises sont souvent associées à des pratiques d'exploitation et accusées de profiter des structures discriminatoires de notre société, ce qui est en contradiction flagrante avec les valeurs de la communauté LGBTQIA+.

 

 

L'objectif de ces entreprises est de soigner leur image de marque en se présentant comme des soutiens de la communauté lors de tels événements. La stratégie de « pinkwashing » consiste à instrumentaliser le mouvement queer en s’appropriant des symboles tels que le drapeau arc-en-ciel ou en sponsorisant de grands événements tels que les Pride CSD, principalement pour des raisons de marketing. En réalité, ces entreprises ne mettent pas en œuvre de politiques internes ou de pratiques d’embauche antidiscriminatoires. Un exemple frappant de cette stratégie est la participation du journal « Bild » à la Pride de Kiel l’an dernier, alors que ce média, connu pour sa ligne éditoriale conservatrice, critique régulièrement les personnes queer pendant les onze mois de l’années qui ne sont le mois de fiertés.

 

 

En réponse à ces critiques, la Pride de Colgone (la plus grande en Allemagne), a décidé cette année d’introduire une réglementation plus stricte sur l’apparence des chars : le logo des entreprises pouvait certes être visible, mais le message politique devait prévaloir.

 

À Berlin : les conflits internes autour de l’association organisatrice CSD e.V.

Le CSD e. V., association organisatrice de l’évènement, a été marqué par des conflits internes l'année dernière. Certains membre de l’association ont porté des accusations d'« irrégularités dans les activités commerciales » contre le conseil d'administration. Une évaluation des risques réalisée par Aron Sircar a révélé des transactions non documentées, des paiements d'honoraires inhabituellement élevés et des virements douteux vers la Suisse. Malgré les demandes de plusieurs membres pour une assemblée générale extraordinaire, le conseil d'administration n'a pas donné suite. Deux membres ont ensuite intenté une action en justice pour obtenir une liste de noms nécessaires à la convocation de cette assemblée, remportant leur procès au tribunal de Schöneberg. Ce litige a finalement été résolu par une médiation réussie. En dehors de ces problèmes internes, des critiques concernant le manque d'inclusion et de diversité, ainsi que des incidents de racisme, ont également été soulevées.

 

Gagner en visibilité est une chose, se battre pour l’avancée des législations en est une autre. Témoignage.

Néo, 24 ans, nous raconte comment sa perception de la Pride CSD a évolué avec le temps, il partage ses expériences sur des évènements alternatifs. Originaire de Russie, il est arrivé en Allemagne en 2017 pour étudier les sciences de la communication et le théâtre à la Freie Universität de Berlin. C’est un homme trans qui utilise les pronoms il / iel (er/they en allemand). Il nous raconte :

« La première fois que je suis allé à la Pride CSD, je n'étais pas encore out en tant qu’homme trans. C'était à Berlin, en 2019. Avec des ami.es, nous participions à la grande Pride CSD, qui correspondait parfaitement à l’image de la « Gay Pride » véhiculée par les médias. À l'époque, j’étais stupéfait par le nombre de personnes présentes. La taille de cette communauté queer m’a bluffé et m’a donné un profond sentiment de cohésion.

Après quelques années, mon regard sur cet événement a changé. Dans ce grand défilé du CSD, j'ai désormais l'impression qu'il y a quelque chose de performatif. Il me semble que l'accent est davantage mis sur la sexualité et la sexualisation que sur les questions d’identité.

Je ressens également un certain malaise face à la surreprésentation des partis politiques et des grandes entreprises qui, en dehors de leur participation à la Pride CSD, ne contribuent pas réellement à l'avancement des droits des personnes LGBTQIA+ ni ne mènent de politiques antidiscriminatoires en interne. Pour finir, beaucoup de gens qui participent à l’évènement, ne font pas partie de la communauté queer, ils viennent pour danser et s'amuser. Ce n’est pas quelque chose que je condamne, au contraire, mais je pense que cela contribue à dépolitiser l'événement.

 

 

L'année dernière, j'ai participé à la grande Pride CSD et plus tard à une manifestation nettement plus politisée, l'Internationalist Queer Pride. Le contraste entre les deux manifestations était très marqué. À la parade du CSD régnait une ambiance de festival : on se promène, on danse, on boit, mais pas un seul discours n'a été prononcé... À l'Internationalist Queer Pride en revanche, des revendications précises ont été adressées, aussi bien aux pouvoirs politiques qu’à la société en générale. Ces revendications comprenaient des mesures concrètes permettant d’améliorer la qualité de vie des personnes LGBTQIA+.

À la Pride CSD on s’est certes bien amusé, mais il n'y avait pas de place pour le militantisme.

Il y a deux ans, j'ai également participé à une Transpride (TIN* Pride). Après le défilé, une manifestation était organisée sur la place Mariannenplatz (Kreuzberg). De nombreux discours ont été prononcés, la parole été donnée à toustes celleux qui souhaitaient la prendre, c’était un concept scène ouverte avec un « open mic ». Certaines personnes ont lu des poèmes sur scène, d’autres ont partagé des histoires et expériences personnelles, c’était puissant.

 

Drapeau de la fierté transgenre
© Alexander Grey - Unsplash

 

Dans ces événements alternatifs à la Pride CSD il n'y a pas que le fait d'être queer ou membre de la communauté LGBTQIA+ qui compte, bien souvent ces manifestations alternatives et les associations organisatrices se réclament d’une approche intersectionnelle. C’est important pour moi. 

Les alternatives à la Pride CSD

  • 25 juillet - CSD sur la Spree / Berlin Canal Pride : Jeudi soir, 19 bateaux navigueront sur la Spree, juste avant le grand week-end de la Pride berlinoise, pour promouvoir la visibilité queer. Cette année, le CSD attire l'attention sur ces thèmes avec l'action « Queeres Aktionsbündnis für Respekt, Toleranz und Vielfalt » (Alliance queer pour le respect, la tolérance et la diversité) en collaboration avec les participants. Les excursions en bateau passent notamment par l'île aux Musées et le quartier gouvernemental. Tous les bateaux sont malheureusement déjà complets mais vous pouvez vous rendre sur les berges de la Spree pour observer le cortège.
  • Infos :
  • Quand ? 25 juillet – soir
  • Où ? Berges de la Spree – quartiers île aux Musées et quartier gouvernemental
  • Site internet 

 

  • 26 juillet - Dyke* March Berlin : La manifestation débutera à 18h sur la Karl-Marx-Platz à Neukölln et se dirigera vers l'Oranienplatz à Kreuzberg. Les festivités commenceront à 21h au Ritter Butzke. Actuellement, des bénévoles pour l'encadrement de la manifestation sont recherchés – en remerciement, les bénévoles bénéficieront d'une entrée gratuite à la fête. Ceux qui souhaitent aider peuvent contacter l'organisation de la manifestation par e-mail ou par message direct sur Instagram.
  • Infos :
  • Quand ? 26 juillet, 18h00
  • Où ? Karl-Marx-Platz (Neukölln)  - Oranienplatz (Kreuzberg)
  • Soirée : À partir de 21h, soirée au Ritter Butzke
  • Instagram : @dykemarch_berlin

 

  • 27 juillet - Internationalist Queer Pride : Une des nouvelles manifestations de la Pride à Berlin est la Internationalist Queer Pride, qui se tient depuis 2021 en parallèle de la grande parade du CSD. Elle commence à 15h à  Hermannplatz (Neukölln) et se termine à Oranienplatz (Kreuzberg). La manifestation est organisée par une multitude de petits groupes, majoritairement à caractère international ou défendants les droits des personnes immigrées. Parmi eux, des groupes kurdes, latino-américains, juifs et roms, ainsi que des réfugiés et des personnes en situation de handicap. Pour accompagner la manifestation de la Internationalist Queer Pride, divers artistes et musiciens se seront présents.
  • Infos :
  • Quand ? 15h
  • Où ? Hermannplatz
  • Instagram : @iqpberlin

 

  • 10 août - TIN* Pride Berlin : Sous le slogan « Personnes Trans*, Inter* et Non-Binaires fières et visibles dans les rues », une nouvelle Pride dédiée aux préoccupations des personnes TIN* (Trans*, Inter*, Non-Binaires) aura lieu cette année à Berlin. Le départ se fera à la Zillepromenade (dans la baie de Rummelsburg) et le point d'arrivée sera à la statue « Mutter-Heimat-Statue » dans le parc de Treptow.
  • Infos :
  • Quand ? Départ prévu à 12h 
  • Où ? Itinéraire : Zillepromenade – Gustav-Tempel-Str. – Ulrich-Plenzdorf-Str. – Ingrid-Reschke-Str. – Hauptstr. – Markgrafendamm – Elsenbrücke – B96a An den Treptowers – B96a Am Treptower Park – Monument de la Mère Patrie
  • Instragram : @transprideberlin

 

  • 10 août - LesBiSchwules Parkfest : La date du LesBiSchwules Parkfest est déjà fixée. Le festival aura lieu le 10 août, sur le terrain du cinéma en plein air du Volkspark Friedrichshain et célébrera la visibilité queer avec divers stands communautaires, des programmes et des stands de street food.
  • Infos :
  • Quand ? de 15h à 21h avec une fête et un DJ set
  • Où ? Au Volkspark Friedrichshain
  • Site internet

 

  • 31 août : Queens & Flowers : Retenez la date ! Un nouvel événement marquant de la fin de l'été se profile à l'horizon : le 31 août 2024 aura lieu pour la première fois Queens & Flowers, le festival de drag en plein air. Cet événement est organisé par Place2Be Berlin, la plateforme de tourisme queer de la SIEGESSÄULE. Dans l'oasis verdoyante du Jardin Botanique de Berlin, le plus riche en espèces d'Allemagne, la splendeur florale et l'art du drag fusionneront pour célébrer la culture queer. L’évènement s’adresse aux personnes LGBTQIA+ et à leurs alliés. Un programme complet attend les visiteurs : des heures de lecture par des drag queens pour les enfants, des DJs, des food trucks et des boissons, ainsi que deux spectacles de drag de haut niveau sur la scène principale.Des artistes drag comme Pandora Nox, gagnante de Drag Race, Kelly Heelton, Nikita Vegaz, Jurassica Parka, Jacky-Oh Weinhaus, Foxglove, Lola Rose, Vivienne Lovecraft, Antina Christ, Kaey et bien d'autres sont annoncés.
  • Infos :
  • Quand ? De 16h00 à 22h00 
  • Où ? Jardin Botanique de Berlin 
  • Instagram : @queens.and.flowers

 

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