Après une double explosion qui a fait deux blessés légers à Bangkok, la junte thaïlandaise, qui impose toujours sa loi martiale, entend renforcer les contrôles dans tout le pays, neuf mois après sa prise de pouvoir.
Dimanche 1er février au soir, deux bombes artisanales ont explosé sur une passerelle piétonne reliant le métro aérien et un grand centre commercial du centre de la capitale thaïlandaise, blessant légèrement deux passants.
Les deux engins explosifs improvisés étaient cachés derrière un transformateur électrique, selon la police.
Les autorités n'ont pas fait de lien entre cet incident et les tensions politiques actuelles, alors que les critiques se multiplient contre la junte au pouvoir et sa détermination à maintenir la loi martiale depuis mai.
"Nous ne pouvons dire qui est derrière cela… cela pourrait être des gens mal intentionnés, ou qui sont liés à la politique, ou des gens qui pensent différemment," a déclaré le Premier ministre adjoint, Prawit Wongsuwon tout en prévenant que les dispositifs de sécurité allaient être renforcés dans tout le pays.
"Nous avons besoin de contrôles de sécurité élevés dans certaines zones", a-t-il dit.
"J'ai demandé depuis la nuit dernière que la sécurité soit renforcée, en particulier dans les lieux publics", a déclaré devant la presse lundi le chef de la junte, Prayuth Chan-O-Cha.
Les autorités n'ont pas désigné de coupables, mais le ministre de l'Intérieur, Anupong Paochinda, a assuré que "l'explosion n'avait pas pour but de faire des victimes humaines mais de créer le trouble".
Ce genre d'attaque à la bombinette, qui est le plus souvent destinée à intimider qu'à blesser, n'est pas rare en Thaïlande, surtout lors de fortes tensions politiques (voir notre encadré). Il arrive aussi que ces actions soient perpétrées par le propre camp des "victimes" ou cibles supposées pour accabler le camp adverse.
Peu après le coup d'Etat militaire de 2006, une série d'explosions le soir du réveillon avait fait trois morts et plusieurs blessés dans divers endroits de la capitale. Les auteurs de ces crimes n'ont pas été officiellement identifiés. Mais la seule piste sérieuse évoquée à l'époque par les enquêteurs, était celle "d'hommes en uniformes "proche du cercle du pouvoir ayant pu agir pour ou contre ce dernier (lire aussi notre article du 9 janvier 2007 ATTENTATS – A qui profite le crime ?).
Un calme précaire règne dans la capitale thaïlandaise depuis le mois de mai dernier, lorsque l'armée a pris le pouvoir après des mois de manifestations de rue souvent violentes qui ont conduit à l'éviction du gouvernement de l'ancienne Première ministre Yingluck Shinawatra. Pendant ces mois de manifestations, plusieurs bombes artisanales avaient explosé à Bangkok, les deux camps s'accusant mutuellement de vouloir semer le trouble.
En raison de la loi martiale, les rassemblements politiques et la critique du coup d'Etat sont interdites, et la junte réprime toute forme de protestation.
D'après le rapport d'une importante ONG d'avocats thaïlandais publié lundi, depuis la prise de pouvoir de la junte, au moins 666 personnes ont été convoquées par les militaires, 134 arrêtées lors de manifestations pacifiques et au moins 362 autres arrêtées pour des motifs politiques.
Et au moins 36 personnes ont été poursuivies pour crime de lèse-majesté, punissable de 15 ans de prison en Thaïlande.
Les militaires, défenseurs auto-affichés de la monarchie, ont fait de la lutte contre le crime de lèse-majesté leur cheval de bataille, dans un contexte de grande incertitude liée à la succession du roi Bhumibol Adulyadej, 87 ans.
P.C. avec AFP (http://www.lepetitjournal.com/bangkok) mardi 3 février 2015