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A Bangkok, des manifestants appellent à la démission du gouvernement

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REUTERS / Chalinee Thirasupa - Une manifestante tient une pancarte lors d'une manifestation anti-gouvernement à Bangkok le 18 juillet 2020
Écrit par Lepetitjournal.com Bangkok avec Reuters
Publié le 19 juillet 2020, mis à jour le 20 juillet 2020

Environ 2.500 Thaïlandais se sont mobilisés samedi pour demander la démission du gouvernement et la dissolution du parlement, défiant l'interdiction de rassemblement dans l'une des plus grandes manifestations depuis un coup d'État de 2014.

Les participants à ce rassemblement, organisé par des étudiants près du Monument de la démocratie à Bangkok, ont déroulé toute une série de griefs contre le gouvernement du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, l'ex-chef de la junte qui avait renversé un gouvernement élu il y a six ans.

Les organisateurs ont émis trois demandes: la dissolution du parlement, la fin du harcèlement contre les détracteurs du gouvernement, et l’amendement de la Constitution rédigée par les putschistes et qui, selon les opposants, a été faite pour assurer le pouvoir sur le long terme à leur propre camp.

"Comment pourrions-nous être d'accord avec un tel manque de démocratie ?", a lancé à la foule Tattep Ruangprapaikit, un militant étudiant.

On pouvait également voir sur des panneaux et banderoles des allusions à peine voilées à la très puissante monarchie thaïlandaise. 

Manifestation anti-gouvernement a Bangkok
Des manifestants lèvent la main en faisant le signe anti-dictature du roman "Hunger Games" à Bangkok, le 18 juillet 2020. (photo REUTERS / Chalinee Thirasupa) 

La police a formé un cordon pour bloquer le rassemblement mais n'a pas cherché à disperser la manifestation. Des panneaux indiquant "aucune entrée sans autorisation, chantier de maintenance en cours" étaient censés barrer l’accès au très symbolique monument de la démocratie.

La manifestation a commencé dans la journée avec quelques groupes d'étudiants, mais des centaines d'autres personnes se sont jointes au mouvement au cours de la soirée, faisant grimper le nombre à environ 2.500, selon les organisateurs et les estimations des journalistes sur place.

Le rassemblement s'est dispersé vers minuit, mais les organisateurs ont déclaré qu'ils reviendraient battre le pavé dans deux semaines si leurs demandes n'étaient pas satisfaites.

Economie et démocratie sacrifiées

L'impopularité de Prayuth Chan-O-Cha et son gouvernement s'est accrue ces derniers mois.

Alors que l’économie battait déjà de l’aile depuis le coup d’Etat, les élections de l'année dernière supposées sonner le retour à la démocratie, ont été marquées par deux dissolutions de partis d'opposition par la Cour constitutionnelle, l’une pendant la campagne électorale et l’autre en février dernier ayant permis à la coalition menée par le parti de Prayuth de renforcer sa domination du Parlement.

La dissolution le 21 février du parti Anakot Mai (de son nom anglais "Future Forward"), deuxième plus important parti d'opposition, avait déclenché des séries de manifestations étudiantes un peu partout en Thaïlande, avant que les autorités ne décrètent l’état d’urgence au nom de la lutte contre l’épidémie de Covid-19 et interdisent les rassemblements.

Manifestation anti-gouvernement a Bangkok
Des policiers bloquaient l’accès au monument de la démocratie mais n’ont pas cherché à disperser la manifestation à Bangkok, le 18 juillet 2020. (Photo REUTERS / Chalinee Thirasupa)

L’Etat d’urgence est toujours en place malgré le bilan très rassurant de la Thaïlande qui n’a enregistré que 3.249 cas d’infections et 58 en six mois et aucune infection locale depuis sept semaines.

Certains dans l’opposition ont d’ailleurs critiqué le maintien du décret d’urgence, dénonçant une décision sans fondement destinée à conserver des pouvoirs extraordinaires pour contenir la grogne populaire plus que le Covid-19 qui a virtuellement disparu du territoire.

Le zèle du gouvernement Chan-O-Cha pour imposer des mesures dites d’urgence sanitaire au détriment de l’activité économique et sociale dans un pays exempt de la maladie contribue aussi beaucoup à son impopularité croissante.

Et les choses se sont accélérées la semaine dernière lorsque plusieurs ministres liés à l’économie ont démissionné, ajoutant à l’incertitude quant à l’avenir du royaume et celui de milliers de PME et autres petits commerçants sur la sellette en raison des restrictions imposées au nom de la lutte contre le Covid-19.

Le droit de perdre la foi

Le parti de Prayuth, le Palang Pracharat, avait fait campagne sur le retour à une vision traditionnelle de la culture thaïlandaise centrée sur la loyauté envers le roi Maha Vajiralongkorn.

Mais ce dernier réside la majorité de l’année en Allemagne où il a une grande propriété, ce qui suscite une certaine incompréhension au sein de la population qui s’exprime de temps à autres sur les réseaux sociaux et se reflétait samedi à travers certains slogans.

Manifestation anti-gouvernement a Bangkok
Un manifestant tient une pancarte disant "La foi perdue n'est certainement pas un crime !!! #Thiwakorn" à Bangkok, le 18 juillet 2020. (Photo REUTERS / Chalinee Thirasupa)

La Thaïlande est officiellement une monarchie constitutionnelle, mais insulter le roi est passible de 15 ans de prison et beaucoup parmi les conservateurs considèrent la monarchie comme sacro-sainte.

Dans la manifestation samedi, un panneau disait "La foi perdue n'est certainement pas un crime !!! #Thiwakorn", en référence à une manifestation organisée vendredi dans le nord-est de la Thaïlande en soutien à un homme interné dans un hôpital psychiatrique après avoir porté un t-shirt disant qu'il avait perdu foi en la monarchie.

Une autre bannière disait "Le Parti populaire n'est pas mort" - en référence au groupe politique qui a mis fin à la monarchie absolue en 1932.

Le mois dernier, Prayuth Chan-O-Cha avait averti publiquement les militants politiques de ne pas risquer leur avenir en critiquant la monarchie.

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