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Réforme de l'Enseignement Supérieur en Grèce : une menace pour l'éducation publique?

Université AthènesUniversité Athènes
Écrit par Viviane Bonnier
Publié le 31 janvier 2024

Le gouvernement de Nouvelle Démocratie envisage de présenter prochainement un projet de loi intitulé "Universités Libres", visant à autoriser la création d'universités privées en Grèce. Les opposants considèrent cela comme une violation de l’article 16 de la Constitution de 1974 qui stipule que l'enseignement supérieur est exclusivement dispensé par des institutions publiques sous la supervision de l'État.

Les manifestations et grèves se multiplient avec des revendications telles que le retrait du projet de loi, la préservation de diplômes de valeur, et des études gratuites. La campagne "NON aux universités privées, #metoarthro16 circule sur les réseaux sociaux. Les opposants redoutent la dévalorisation des diplômes, l'injustice dans l'accès à l'éducation, et une concurrence déloyale. Ils craignent que l'existence d'universités privées ne profite qu'aux grandes entreprises, affaiblissant ainsi les institutions publiques, et conduise à une détérioration générale de l'éducation supérieure.

D'un autre côté, le gouvernement justifie cette initiative par la nécessité de moderniser le système éducatif, soulignant que la Grèce est le seul pays au monde sans enseignement supérieur privé. Les deux parties s'affrontent sur des questions constitutionnelles, d'égalité d'accès et sur l'impact potentiel sur la qualité de l'éducation supérieure en Grèce.

Quelques échos sur le projet de loi

Le projet de loi du ministère de l'Éducation, intitulé "Université Libre", inclura, en plus du développement d’universités privées, l'égalité des droits professionnels et académiques des diplômés de ces universités avec ceux des diplômés des universités publiques. Il prévoit de renforcer "l'autonomie" des universités, en matière de gestion. Le ministère évoque un financement des universités par des organismes privés, soit directement soit par le biais de partenariats Public-Privé

Enfin, la possibilité sera donnée aux collèges privés existants (dont les droits professionnels ont déjà été alignés sur ceux des universités publiques) de se transformer en "universités".

Qu’en est-il de la position des enseignants ?

Certains enseignants, interrogés sur le projet de loi, ne s'y opposent pas nécessairement. Ils notent que des unités d'enseignement supérieur privées existent déjà en Grèce et estiment que cela pourrait améliorer leurs salaires et leurs conditions de travail. Cependant, ils expriment des préoccupations quant à la capacité des universités privées à attirer des universitaires de renom et des intellectuels des pays développés, ainsi qu'à la question des subventions pour la recherche, qui devraient rester dans le domaine du financement public.

Ils soulignent par ailleurs la concurrence déloyale qui favoriserait les étudiants des classes économiquement les plus aisées. D'autres enseignants s'opposent au projet de loi, craignant qu'il n'ouvre la porte à des "universités-entreprises" où de grandes entités économiques proposeraient des services d'enseignement supérieur, mais seraient peu enclines à financer des activités de recherche non alignées sur leurs intérêts. Pour ces opposants, la soumission des développements scientifiques aux intérêts privés met en péril la protection de la vie et de la dignité sociale, dépendant davantage des aspirations des grandes entreprises et de leurs propriétaires que des conclusions de la recherche scientifique indépendante.

La situation de l’endettement des étudiants américains

Selon Jean-Philippe Ammeux, Directeur de l’IESEG School of management, la dette étudiante américaine, estimée à environ 1 500 milliards de dollars en 2019, suscite des inquiétudes quant à une possible crise financière similaire à celle des subprimes. Bien que l'endettement massif des étudiants soit en augmentation en raison des coûts croissants de l'enseignement supérieur et de la réduction des financements publics, la nature de cette dette diffère de celle des crédits à la consommation ou immobiliers.

Les études de l'OCDE soulignent la rentabilité de l'investissement dans l'enseignement supérieur, avec des titulaires de bachelor ayant des revenus à vie considérablement plus élevés. Malgré des taux de défaut de remboursement élevés, notamment dans les établissements privés lucratifs ( for-profit), la dette étudiante reste majoritairement financée par des fonds fédéraux, réduisant ainsi le risque de crise systémique.

Cependant, des préoccupations persistent quant aux pratiques prédatrices de certaines institutions lucratives, un grand nombre de formations dispensées par ces établissements ne correspondant pas aux besoins de l’économie et l’écart de revenu entre ceux qui ont fréquenté un for-profit college et ceux qui ne sont pas allés dans l’enseignement supérieur, n’étant pas statistiquement significatif. Cela a conduit à des appels en faveur d'une régulation plus stricte pour garantir la qualité des formations et leur adéquation avec les besoins économiques, une initiative autrefois soutenue par l'administration Obama mais qui a perdu de la vigueur sous Trump.

Par exemple ALBA Graduate Business School dans le centre d’Athènes, partenaire depuis décembre 2023 de l'IDRAC Business School une école privée française avec 9 campus en France: Bordeaux, Grenoble, Lille, Lyon, Montpellier, Nantes, Nice, Paris, et Toulouse.

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