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Débat FrenchFounders: "Créer un Airbus européen du véhicule autonome"

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Publié le 4 février 2019

Tandis que les revenus associés au transport sont à l'échelle mondiale en pleine croissance et alors que la question de la mobilité est devenue un sujet crucial au niveau social -on l'a vu avec le mouvement des gilets jaunes en France- plusieurs intervenants, à l'invitation du réseau FrenchFounders, ont pris la semaine dernière à Madrid, au sein de la concession Renault de la calle Alcalá, la parole sur la thématique "Mobility & Sharing Economy: New Ways of Moving in the City" (Mobilité et économie de partage : les nouvelles modalités de déplacement urbain). 


 
L'exercice promu par FrenchFounders, club d'intermédiation d'affaires francophone présent dans une trentaine de villes dans le monde et avec une claire stratégie de développement en Espagne, consistant à faire intervenir, devant un public de startupers, d'investisseurs et de hauts dirigeants corporates, des spécialistes sur un sujet lié au monde de l'entreprise, a permis à cette occasion un débat sans langue de bois, dont une bonne partie a néanmoins été transmise "off the record", confidentialité entrepreneuriale oblige. S'il fallait être présent sur place pour profiter de l'intégralité du franc-parler adopté par les intervenants, la conférence a néanmoins permis de mettre à plat quelques-uns des grands défis associés à la question, qui nous concernent tous, tandis que l'exemple de la ville de Madrid a servi de fil conducteur à l'échange.
 
Urgence environnementale, innovation, organisation des infrastructures : les enjeux liés au déplacement sont d'actualité et reflètent un certain bouleversement des principes qui régissaient, il y a 20 ans ou 30 ans en arrière, nos sociétés en la matière. Finie l'époque où l'effort portait sur le développement de grandes infrastructures, à l'instar du rail de la grande vitesse. Place désormais à la mobilité quotidienne et urbaine : les investissements portent aujourd'hui sur ce secteur en pleine mutation, territoire vierge, presque, de toute régulation, marché à créer et à conquérir dans bien des cas encore. Avec l'intermodalité au centre de la réflexion, les grandes villes, en collaboration avec les acteurs privés, dans une relation n'empêchant pas certaines frictions dans quelques cas, cherchent à promouvoir un modèle de déplacement permettant de faciliter et fluidifier le mouvement, c'est une évidence, mais aussi de réduire les émissions polluantes, ou encore connecter plus efficacement les différents quartiers et leurs habitants aux zones les plus dynamiques.


Les avancées technologiques associées au big data, et à la capacité d'utiliser les données liées aux déplacements intra-urbains, désormais recueillies et analysées -reste à savoir par qui et comment- sont le vecteur commun à cette évolution. Dans une économie marquée par le "tout sharing" (du carsharing au Vélib', en passant par les trottinettes ou les scooters en libre partage), et avec le véhicule autonome dans le viseur, nos déplacements sont étudiés, servent à établir des patrons de conduite, font l'objet de modèles économiques, ou servent à l'élaboration de protocoles de sécurité. 

 

Les constructeurs automobile font face à un triple défi inédit

 
Dans ce contexte, les constructeurs automobile font face à un triple défi inédit : la tendance des consommateurs à aller d'un véhicule en propriété à un véhicule en partage, l'avènement du véhicule autonome et le passage d'une énergie fossile à une énergie "propre". Au fait que les investissements en R&D pour être à la pointe de ces changements sont particulièrement conséquents, s'ajoutent les incertitudes concernant les choix de développement stratégiques qui doivent être entrepris. "Nous sommes dans une phase d'apprentissage d'un nouveau métier, où l'enjeu est de maximiser le nombre d'utilisations par jour et par voiture" a exprimé Ivan Segal, Directeur commercial de Renault Iberia, à propos du développement en collaboration avec Ferrovial du carsharing à Madrid, avec le service Zity. Evoquant une période de "test and learn", ville par ville, région par région, il a souligné qu'il n'existait en la matière "aucune formule unique". 
 
L'exemple du carsharing et la manière dont les opérateurs assument son développement dans les grandes villes est symptomatique d'une décentralisation en la matière des compétences vers les municipalités, avec la diversité de situations que cela suppose, et illustre le déficit de régulation -ou de stratégie politique- existant à l'heure actuelle sur les nouveaux enjeux de la mobilité. Stéphanie Priou, fondatrice du cabinet de conseil Ubiquity, chargé d'aider les autorités de transports à prendre le virage de la mobilité en les accompagnant sur les sujet contemporains ou futurs, notamment concernant leur relation avec les opérateurs privés, a mis le doigt sur le flottement existant sur le sujet en Europe. La question de la juridiction territoriales desdites autorités est clairement posée : qui des villes, des régions, des Etats ou des organisations supranationales est le mieux à même de prendre le sujet à bras le corps ? 

 

Soit on laisse Google prendre la main sur un secteur clé en Europe, le transport, soit on réfléchit à un système nous permettant de devenir des champions en la matière


 
Pour Yasmine Fage, cofondatrice Et Chief Operating Officer de Goggo Network, startup de mobilité de véhicules autonomes ayant pour mission d'assurer une transition à la mobilité autonome encadrée, l'UE est en tous cas en retard sur la question. A l'échelle technologique, à l'échelle régulatoire, à l'échelle politique. Centrant son discours sur le véhicule autonome, elle a défendu que la tendance est désormais inéluctable. "Soit on laisse Google prendre la main sur un secteur clé en Europe, le transport, soit on réfléchit à un système nous permettant de devenir des champions en la matière, une sorte d'Airbus européen du véhicule autonome", a-t-elle déclaré. Et de poursuivre : "Il faut mettre en place des standards européens à l'instar de ce qui s'est fait pour la téléphonie dans les années 2000". Si à moyen terme le développement des véhicules autonomes devrait concerner en premier lieu les transports collectifs, pour des raisons de sécurité et de facilité de mise en place, "qui va être le premier à opérer un service d'autonomie partagée, qui représente un marché colossal ?" s'est-elle interrogée. La question n'est pas anodine, au-delà des enjeux économiques. Elle pose notamment la capacité des Etats à assurer l'universalité des services lorsqu'ils seront réalité -par opposition à leur développement dans les seules zones où ils s'avèreront rentables.  

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