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MINANGKABAU - Des femmes au coeur de la légende

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Écrit par Lepetitjournal Jakarta
Publié le 25 avril 2018, mis à jour le 26 février 2021

Dans ce monde de stéréotypes, qu'ils soient positifs ou négatifs, l'image d'Epinal de la femme indonésienne est celle d'une dame s'exprimant d'une voix douce, docile jusqu'à la servilité, et bien entendu très bonne cuisinière. Mais ce que le monde, et bien souvent les indonésiens eux-mêmes, oublie, c'est que l'Indonésie a eu son lot de femmes fortes et intelligentes qui ont aidé à façonner le pays. Et ce, bien avant même que les colonisateurs arrivent, puis pendant la guerre d'indépendance et jusqu'à nos jours. C'est certainement très insuffisant car seules 12 femmes figurent au panthéon indonésien en tant que héros national alors que 150 hommes en font partie. Rétablissons l'égalité et rendons hommage aux femmes indonésiennes avec la légende des Minangkabau. 

 

Le concept de la femme forte et indépendante a été profondément intégré dans l'imaginaire des enfants indonésiens. En lieu et place des princesses habituelles, les contes indonésiens parlent souvent de femmes de petite condition qui travaillent durement pour gagner leur vie. Contrairement à Cendrillon, la femme dans le conte indonésien n'est jamais dépeinte comme devant être sauvée par un prince. Elle s'en sort uniquement grâce à son esprit et son intelligence. 

 

L'un des contes les plus célèbres raconte l'histoire des femmes très fières de la tribu des Minangkabau. Dans la région de Sumatra ouest, près de Bukittinggi, cette société matrilinéaire se laisse découvrir. Les femmes sont propriétaires des biens, de la terre et des mobiliers qu'elles transmettent à leur filles, tout comme leur nom est transmis à leurs enfants. C'est l'oncle maternel qui élève l'enfant, les époux n'habitant pas sous le même toit. Seules les femmes d'une même famille se regroupent dans une maison appelée rumah Gadang. Les hommes, eux, vivent dans une maison commune près de la mosquée, surau.

 

Petit clin d'œil : lors de la demande en mariage, c'est la jeune fille qui demande la main du garçon.

A l'âge de 7 ans, le jeune garçon quitte la maison maternelle pour aller vivre dans la maison commune afin de recevoir une éducation. N'ayant pas d'attache, les hommes Minangkabau partent vers l'âge de 20 ans pour voyager à travers l'Indonésie ; ce voyage est appelé merantau. Cela leur permet d'acquérir une expérience et de revenir quelques années plus tard afin de faire profiter la communauté de leur sagesse et réussite. Ils deviennent membre du clan et peuvent prendre part aux discussions relatives à la religion et à la politique.

La légende Minangkabau parle d'un prince Javanais du royaume Majapahit venu envahir le territoire. Alors que la plupart des jeunes hommes étaient partis faire leur merantau, les femmes Minangkabau ont réussi à éviter la bataille frontale en proposant à la place un combat de buffles afin de régler le différent. 


Le prince javanais ne se méfie pas et accepte le combat de buffles, choisissant l'un de ses plus gros

buffles. Les femmes choisissent un bébé buffle non encore sevré. Elles ont affûté les cornes naissantes du petit buffle, tels des couteaux tranchants. Arrivé sur le terrain du duel, le bébé affamé se précipite vers le buffle qu'il prend pour sa mère et arrive ce qui devait arriver : ses cornes affutées éventrent l'énorme buffle qui ne s'était pas méfié de cet adversaire apparemment inoffensif. Depuis, la tribu porte donc le nom de Minang qui signifie victoire et Kabau le buffle, le buffle victorieux en fait. La morale de cette histoire démontre que la sagesse et la stratégie permettent d'éviter la guerre et la violence. Aujourd'hui encore, les toits des maisons de la tribu ainsi que les coiffes traditionnelles des femmes rappellent les cornes du buffle qui ont permis aux femmes Minangkabau de vaincre avec intelligence. 

Ivanna Mendels pour l'Indonesian Heritage Society (www.lepetitjournal.com/jakarta).

Article paru le mardi 6 décembre 2016

lepetitjournal.com jakarta
Publié le 25 avril 2018, mis à jour le 26 février 2021