

Trois s?urs qui mènent la partie sur un grand échiquier : Sylvie Testud présente Gamines, son troisième roman adapté ici pour la scène. La comédienne émérite et désormais auteur, fait remonter ses souvenirs de jeune fille à la surface, avec humour et décalage, mais aussi avec sincérité
? Une rubrique réalisée en partenariat avec ruedutheatre, le magazine du théâtre en Europe
Photo © Bruno Amsellem
Nous voici en compagnie de Corinne (Aure Atika), Sibille (Elodie Bouchez) et Georgette (Nathalie Beyer). Trois personnalités singulières dont les divergences et les heurts soulignent pourtant une marche à l'unisson. Une avancée curieuse et innocente vers une figure paternelle qui fait cruellement défaut. Un ?il? mystérieux dont l'absence nourrit l'imaginaire enfantin et conditionne inconsciemment les actes. De la tendre (re)construction fantasmatique à l'amertume de la rencontre réelle avec cet homme, les fillettes basculent brutalement de l'enfance à l'âge adulte, de l'insouciance à l'expérience.
Face à ce puissant trio féminin, Sylvie Testud place Albert Delpy, tour à tour dans les rôles de la tante, de la mère, du prêtre et enfin du fameux père. Multiples personnifications qui font se côtoyer l'absence et l'omniprésence masculine.
Un choix judicieux qui permet de faire surgir l'incarnation du père à travers tous les personnages proches des trois adolescentes. Ainsi, la metteur en scène fait de ce quidam, la ligne directrice de cette histoire où le sérieux, la douleur et le regret se cachent derrière les jeux et les sourires de gosses.
L'art du paradoxe
La réussite de la pièce, repose en partie sur la mise en valeur des paradoxes. Des gamines interprétées par de jeunes femmes, un comédien qui change étonnamment de peau, des caractères marqués mais toujours ambivalents, empêchent l'interprétation réductrice d'une situation ou d'un personnage. Car chez Sylvie Testud rien n'est tout noir ou tout blanc comme le damier qui lui sert de plateau de jeu.
Dans un cadre en perspective aux portes surdimensionnées, dans un monde où tout est à hauteur de grandes personnes, les demoiselles tentent pourtant d'atteindre le monde des adultes et de remettre à plat un univers familial bancal. Robes dorées et chevelures interminables, les actrices scintillantes apportent fougue et vie à ce décor figé et trop carré. Orchestrée comme une véritable partition, la pièce se joue au rythme de la vivacité enfantine, aux sons des voix fluettes et criardes. Porté par les talentueuses comédiennes de cinéma, pleinement investies dans cette première aventure sur les planches, le spectacle s'offre comme une récréation pleine de création.
Anne CARRON. ( www.lepetitjournal.com &www.ruedutheatre.info ) 28 mars 2007
Gamines, Texte, adaptation et mise en scène de Sylvie Testud
http://www.ruedutheatre.info/article-6153206.html
Avec : Aure Atika, Nathalie Beyer, Elodie Bouchez et Albert Delpy
Jusqu'au 31 mars au Théâtre de la Croix-Rousse, place Joannès Ambre 69317 Lyon cedex 04
Tel : 04 72 07 49 49
Site : www.croix-rousse.com
En tournée au Théâtre national de Nice du 4 au 7 avril, au Théâtre des Salins - Scène nationale de Martigues les 13 et 14 avril, au Théâtre de Wolubilis (Belgique) du 19 au 21 avril, au Théâtre de Namur (Belgique) du 24 au 28 avril et au Théâtre Municipal ? Le Mans les 3 et 4 mai.
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