Au-delà des tours du quartier des affaires et des buildings modernes de la Marina, Singapour essaye de conserver et entretenir des traditions anciennes qui constituent son identité.
A Singapour, on vit constamment au rythme des événements et des fêtes traditionnels qui se succèdent toute l’année. Le mélange des ethnies et la mixité culturelle font de la cité-Etat un pays culturellement riche, qui sait mettre en valeur chacune de ses cultures et permettre à toutes de s’exprimer. Croyances, superstitions et rituels font partie intégrante du paysage culturel singapourien. A la période de Nouvel An Chinois, où la ville entière s’habille de rouge, ces traditions sont d'ailleurs particulièrement visibles.
Singapour, mélange de cultures…
Par sa position géographique centrale et son ouverture sur le monde, Singapour est un melting pot où se côtoient des dizaines de nationalités. D’après une analyse du Pew Research Center, Singapour est également le pays du monde ayant la plus grande diversité religieuse. Les majorités chinoise, principalement bouddhiste et taoïste, et malaise, surtout musulmane, ont depuis longtemps imprimé leurs empreintes culturelles sur le territoire singapourien.
Passer d’un quartier à l’autre, de Chinatown, quartier chinois, à Kampong Glam, quartier traditionnel malais, en passant par Geylang, l’ancien quartier rouge, et Orchard Road, la principale artère commerçante, permet de se rendre compte de cette diversité culturelle. Si Singapour est une jeune nation, sa longue histoire coloniale et commerciale est toujours visible, et l’âme et le mode de vie des premiers pêcheurs peuvent toujours être ressentis.
… et diversité de traditions
Baladez-vous dans des magasins de sous-vêtements à l’approche du Nouvel An Chinois : les vitrines n’exposent presque que des pièces rouges ! C’est qu’il est de mauvais augure de ne pas commencer l’année en portant du rouge. Même les grandes enseignes internationales prennent compte de cette tradition en période de Nouvel An.
Regardez les portes et les fenêtres des appartements : beaucoup sont fermées par des grilles, non pas pour empêcher les voleurs, mais pour se protéger des mauvais esprits qui pourraient vouloir entrer dans le logement.
Sentez l’odeur âcre de la fumée et des bâtons d’encens : la communauté bouddhiste prie et brûle des papiers à prières et de l’encens dans les rues, particulièrement lors de la Fête des Fantômes, qui a lieu chaque année entre les mois d’août et de septembre.
Loin des tours et de l’image ultra-moderne que l’on se fait parfois du pays, la spécificité de Singapour est peut-être aussi et surtout d’avoir su préserver ses traditions, et d’avoir réussi à en faire un atout…touristique.
Le tourisme et l’authenticité
Dans son article « Culture and the state: Manufacturing traditions for tourism », Wai-Teng Leong, chercheur à l’Université de Californie à San Diego, écrit que Singapour a encouragé, voire exagéré, cette culture traditionnelle, pour attirer les touristes et en faire un élément économique. « Dans les jeunes nations, une culture nationale est créée et projetée à l’international. L’image principale du tourisme à Singapour est la diversité ethnique des “traditions” : le mode de vie, la nourriture, la religion, les rituels et les mœurs de certains groupes sont publicisés pour augmenter le potentiel touristique. Les politiques de tourisme national ont d’importantes conséquences sur la manière dont les différentes cultures sont vécues.»
Dans un pays où la compétitivité et l’attractivité internationale sont les maîtres mots de la société, difficile de démêler le vrai du faux. Pourtant, un habitant qui brûle de l’encens dans la cage d’escalier d’un immeuble, ou une lumière qui brille toute la nuit dans le petit temple familial semble nous montrer que Singapour n’est pas qu’une carte postale. Derrière le vernis, une véritable histoire et une vraie culture, encore empreinte de traditions et de superstitions, est là : il suffit de savoir la regarder.
Anne Pouzargues. Article paru dans le magazine SINGAPOUR, n°03, "Les 50 glorieuses"