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L’archéologie, une discipline d’avenir à Singapour ?

fort canning park (c) J.Protzenkofort canning park (c) J.Protzenko
fort canning park (c) J.Protzenko
Écrit par Clémentine de Beaupuy
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 17 janvier 2018

 

Le 11 janvier  dernier, le Singapore History Prize a été remis à un archéologue John N. Miksic pour son livre Singapore and the Silk Road of the Sea, 1300-1800. Cette récompense pour un archéologue peut surprendre à Singapour mais s’inscrit dans une nouvelle tendance : celle de la cité-Etat à renouer avec son patrimoine et son histoire; le nouveau plan du National Heritage Board (2018-2022) souhaite d’ailleurs faire de Singapour une terre de formation et de recherche en archéologie.

 

 

Dans le livre primé, le professeur Miksic a rassemblé 25 ans de recherches archéologiques qui décrivent en détail comment les habitants de Singapour au XIVe siècle transformaient les matières premières, utilisaient l'argent et avaient des occupations spécialisées.

Cette découverte, d’un Singapour du XIVème siècle caché sous la colline de Fort Canning, s’est faite fortuitement mais grâce à l’obstination de certains.

 

L'histoire d'une découverte 

 

Au début des années 1980, le gouvernement planifiait la mise en valeur de Fort Canning et souhaitait en faire un centre de divertissement et de culture, avec un parking souterrain pour 300 véhicules.

Cependant, certains employés du Musée national, aujourd’hui le National Museum of Singapore, avaient émis quelques doutes face à ces travaux. Ils savaient qu'il y avait des légendes selon lesquelles un palais se trouvait sur la colline au XIVe siècle. En janvier 1984, ils invitèrent donc un archéologue américain, spécialiste du Sud-Est asiatique  à explorer le site pour trouver des traces du passé.

 

L'archéologue s'appelait le Dr John Miksic. Il se souvient encore très bien de ce voyage. "Nous avions dix jours, dit-il. J'avais trois groupes de travailleurs: le personnel des musées, les ouvriers indiens embauchés pour les travaux et certains militaires nationaux qui étaient punis. Je ne savais pas quel genre de coopération j'allais obtenir de leur part, mais une fois que j'ai expliqué ce que nous faisions, ils se sont montrés très intéressés".

 

Cependant, le début de sa fouille ne fut pas concluant. Son équipe n'avait trouvé que le squelette d'une chèvre, un vieux casque de l'armée britannique et quelques briques du 19ème ou 20ème siècle. Pour ajouter à leur déconvenue, il pleuvait beaucoup …

 

« L'équipe a commencé à creuser près du Keramat Iskandar Shah, un sanctuaire qui est censé marquer la tombe du dernier roi de Singapour. Soudainement, nous avons vu le changement de couleur du sol et nous avons commencé à trouver différentes sortes d'artefacts ", dit le Dr Miksic. Parmi ces objets figuraient des pièces de porcelaine chinoise bleue et blanche, fabriquées sous la dynastie des Yuan (1279-1368). Cela signifiait que le site remontait au moins aux années 1300.

 En réponse à cette découverte, le gouvernement a accepté de modifier ses plans de développement et le Dr Miksic a pu continuer ses fouilles.

 

« La vie à Singapour au XIVe siècle ressemblait beaucoup à la vie moderne ", explique-t-il. La population était multiraciale, y compris Malais, Chinois, Indiens et Orang Laut. Ils ont occupé divers emplois, comme la pêche, la vinification, la salaison et le travail du métal. Ils semblent avoir surtout vécu dans un petit quartier, à l'intérieur d'une ville fortifiée. Il y aurait probablement eu des arbres dans ces murs, ce qui signifie que nous étions déjà une cité-jardin dans les temps anciens! »

 

Le professeur enseigne aujourd’hui au département d'histoire de la National University of Singapore (NUS) et dirige maintenant une partie du département des études d'Asie du Sud-Est de l'université.

 

Le livre primé et relatant ses fouilles et découvertes n’est pas récent : il a été publié en 2013. Mais ce prix en mettant la lumière  des fouilles archéologiques à Singapour s’inscrit parfaitement dans une politique de mise en valeur de son histoire, détaillé notamment dans le nouveau plan du National Heritage Board, qui veut aider à  accueillir et à  former des archéologues dans la cité-Etat. Un des objectifs de ce plan dans les 5 années à venir est à la fois de développer avec les Universités les formations adéquates, de définir les sites mais également de mettre au point une législation permettant de les préserver.

 

Livre John N. Miskiz

 

Qu’est-ce que le Singapore History Prize ?

 

Le prochain Prix d'histoire de Singapour sera décerné en 2020 ou 2021 et pourra être étendu à des œuvres de fiction sur différents supports.

 

Ce prix a été lancé en 2014 pour soutenir les programmes visant à célébrer les cinq décennies d'indépendance de la nation, et le premier à être consacré à l'histoire du pays. Il est destiné à récompenser une publication qui a  un impact sur la compréhension de l'histoire de la nation singapourienne.

 

Administré par le Département d'histoire de l'Université nationale de Singapour (NUS), il sera remis tous les trois ans et le lauréat recevra 50. 000 dollars.

 

Le professeur Kishore Mahbubani, conseiller principal (relations universitaires et internationales) à la NUS, a déclaré aux journalistes qu'il pourrait y avoir des plans pour élargir le type d'œuvres qui peuvent se qualifier pour le prix. Utilisant le film 12 Years a Slave comme exemple, il a dit que l'histoire peut parfois être racontée plus efficacement à travers la fiction, les films, les bandes dessinées et d'autres formats.

 

"C'est encore en discussion, mais nous pourrions peut-être l'élargir, car en fin de compte, le but est de faire en sorte que les citoyens de Singapour acquièrent une meilleure compréhension de leur histoire", a-t-il ajouté.

 

 

 

 

Sources : NUS/ National Heritage Board

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