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Jean-Luc Bernard, un entrepreneur précoce, éclectique, nomade, à l’écoute des besoins

jean-Luc Bernardjean-Luc Bernard
Écrit par Jean-Michel Bardin
Publié le 7 juillet 2022, mis à jour le 2 décembre 2022

Polytechnicien et ingénieur IT de formation, Jean-Luc Bernard a très tôt monté sa propre entreprise et n’a depuis cessé de multiplier les initiatives dans divers pays à travers le monde. La gestion de la pandémie à Singapour, où il est arrivé il y a 4 ans en provenance de Saint Barth, l’a amené à s’interroger sur son avenir ici.

 

Jean-Luc, comment vous êtes-vous lancé dans l’entreprenariat ?
Après mes études, j’ai commencé à travailler dans diverses entreprises, mais je m’y ennuyais assez rapidement. En 1988, après trois expériences, je me suis dit que la seule manière d’avoir une vie professionnelle satisfaisante serait de monter ma propre entreprise. C’est ainsi qu’est né Astek.
Après un début très modeste, avec un projet que je gérais, cette société s’est peu à peu étendue jusqu’à aujourd’hui compter 5200 employés dans 18 pays avec un chiffre d’affaires de 360 millions d’euros. Le principal but de cette société est de recruter des talents de haut niveau, puis de les garder en leur trouvant des projets intéressants au service de clients. En effet ce type de profils est très demandé et pas facile à trouver lorsqu’on en a besoin. Si le dénominateur commun de la société est l’IT, nous cherchons à être aussi ouvert que possible, tant en domaine d’intervention (expérience digitale, infrastructures, cybersécurité, intelligence artificielle, ingénierie de processus, …) que de type d’intervention (du projet clés en main à la mise à disposition de ressources).
D’une manière générale, j’aime beaucoup démarrer des choses, essayer des nouveautés, même si à la fin cela échoue souvent. Mes initiatives vont du 36.15 de l’émission Thalassa au temps du Minitel, à l’importation d’articles en bois de Bali, en passant par le lancement d’une version française du « Groupon » américain, qui permet des réductions en groupant des achats pour le compte de clients intéressés par les mêmes produits. Compte tenu de la variété de mes initiatives, j’ai été amené à créer une société holding, « Robinson Technologies », pour les regrouper.
Je soutiens aussi en tant qu’actionnaire ou conseiller d’autres initiatives comme Dietsensor, une entreprise américaine spécialisée dans l’application de l’IT au domaine de la santé, ou Jumpster, une société singapourienne visant à aider les start-ups localement.


Quand et comment êtes-vous arrivé à Singapour ?
Dans les années 1990, j’allais en vacances avec ma nombreuse famille (7 filles !) à Saint Barthélémy (« Saint Barth » pour les intimes), petite île française des Antilles, à laquelle j’avais été introduit par un parent. C’est un lieu paradisiaque, spécialement pour les familles, avec un environnement très sécuritaire et un ensoleillement de 340 jours par an. Nous nous y plaisions tellement que nous nous sommes demandés pourquoi ne pas s’y installer. En effet, avec les techniques de communication modernes et des implantations sur les cinq continents, la localisation de ma base est assez indifférente. L’important était de pouvoir visiter régulièrement mes diverses équipes pour vérifier que tout allait bien. En 2010, nous avons donc posé notre tente là-bas.
En 2016, ma femme et moi commencions à nous sentir des fourmis dans les jambes et pensions à changer de décor. J’avais découvert l’Asie lors d’un voyage de promotion à la fin de mes études à Bangkok. Cela avait été le coup de foudre et j’y suis revenu souvent pour en découvrir les divers pays. Donc l’Asie était un candidat privilégié pour notre future implantation et un ami m’a conseillé de visiter Singapour, rare pays d’Asie que je n’avais pas encore vu. J’ai été séduit par ce pays, avec sa végétation luxuriante, son infrastructure moderne, son environnement sécuritaire, sa communauté tech très vivante, et sa connectivité, importante pour pouvoir rester en contact physique avec mes
équipes et mes clients.
A la fin de l’été 2017, Irma a précipité le mouvement. En effet, ce cyclone, extrêmement violent, avec des rafales a 350 km/h, a dévasté Saint Barth, pourtant habitué et préparé à ce genre de phénomènes. Notre maison a été endommagée et dès la fin 2017, nous étions installés à Singapour.


Quelles sont vos activités en dehors de votre travail ?

Je m'astreins à une heure de sport quotidienne. J’ai pour cela une salle à la maison. Quand j’étais plus jeune, j’ai fait du VTT et même des marathons. En dehors de cela, j’aime bien sortir en famille au restaurant. Singapour est particulièrement bien équipé en la matière. J’aime aussi les voyages.


Comment avez-vous vécu le COVID à Singapour ?
Assez mal, je dois dire. Au début, nous avons accepté sans trop rechigner les contraintes, mais avec le temps, c’est devenu de plus en plus difficile à supporter.

Sur le plan personnel, certains des attraits de Singapour que j’apprécie particulièrement, comme les sorties et les voyages, avaient disparu. Ne pas pouvoir revoir mes parents ou mes enfants qui ne résident pas à Singapour était éprouvant. Les allers et retours sur les mesures concernant les écoles ont été parfois difficiles à comprendre : le suivi des cours à domicile, très contraignant, a été motivé par la protection des élèves en vue d’examens qui ont finalement été annulés.

Sur le plan professionnel, la difficulté de voyager, particulièrement quand on n’est pas PR comme moi, a été un handicap majeur, compte tenu de mes activités qui m’amènent à me déplacer en moyenne une semaine par mois. Pendant plusieurs mois en 2020 et 2021, il m’a été impossible de voyager. De plus, il était très difficile de faire venir des talents étrangers à Singapour, où le réservoir local ne suffit pas à couvrir les besoins. Cela était particulièrement irritant, quand on sait que le domaine IT connait en ce moment une expansion jamais vue pour diverses raisons : les limitations de mouvement des personnes qui ont conduit à de nouvelles solutions digitales (travail à distance, visites virtuelles, loisirs on line, automatisation de processus pour pallier des pénuries de ressources) et le redémarrage de l’activité après une période de creux (comme après une guerre, les gens sont avides de consommer et de s’amuser).
Dans ce contexte, se faire arrêter dans un bois à vélo parce qu’on est à 17 km/h (mesuré au radar !) au lieu des 10 km/h permis sur une voie à usage mixte et devoir payer 300 $ peut être la goutte d’eau qui fait déborder le vase !

Certes, Singapour, comme d’ailleurs beaucoup de pays d’Asie, a joué la carte de la sécurité, avec des résultats positifs en termes de décès, mais le maintien de contraintes trop fortes a ralenti la reprise et pu conduire au départ de sociétés et de ressources critiques pour le pays.

 

 

X polytechnique - Jean Luc Bernard
Singapour représente moins de 0,2 % de la population de l’Asie. Ce pays n’en regroupe cependant pas moins de 25% de la population polytechnicienne résidant sur ce continent, soit plus d’une centaine d’entre eux. Beaucoup sont de jeunes entrepreneur(se)s attiré(e)s par le dynamisme et la qualité de vie de la cité-état.

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