Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 2
  • 0

Comment le séisme de 2010 a marqué l’histoire du Chili ?

Un homme tient son vélo à la main à côté de bâtiments détruits par le tremblement de terreUn homme tient son vélo à la main à côté de bâtiments détruits par le tremblement de terre
montenbaik | Source : Google Images
Écrit par Édouard Maury
Publié le 13 mai 2021, mis à jour le 23 janvier 2024

Le Chili est le pays avec la plus forte activité sismique au monde. Ces prochaines semaines, nous vous proposons une série d’articles sur la relation séculaire qui lient les tremblements de terre à ce territoire coincé entre les Andes et l’océan Pacifique. Aujourd’hui, deuxième édition sur le tremblement de terre de 2010 qui a marqué durablement le pays.

C’est pendant que la plupart des Chiliens dormait ou fêtait les derniers jours de l’été que le mal frappa. Le 27 février 2010 à 03h34, un tremblement de terre de magnitude 8,8 sur l’échelle de Richter touche le sud du Chili. Concepción, la ville la plus proche de l’épicentre, est fortement affectée : les ponts et les routes sont brisés, des immeubles s’écroulent, l’électricité est coupée et on déplore déjà plus d’une vingtaine de victimes. C’est le huitième séisme le plus fort enregistré dans l’histoire de l’humanité. Et la violence provoquée par la secousse ne fut qu’une préparation au tsunami dévastateur qui suivi.

C’était la première fois que j’entendais la terre trembler

Une trentaine de minute après les tremblements, des vagues d’une hauteur de 10 mètres de haut atteignent les côtes chiliennes. La commune de Constitución est frappée de plein fouet et 300 de ses habitants disparaissent. L’ampleur du tsunami est telle que des effets sont ressentis dans tout le pacifique, de la Nouvelle-Zélande à la Californie. De nombreuses villes côtières sont détruites, plus de 525 victimes officielles sont recensées, et environ 2 millions de personnes se retrouvent sans toit. L’état d’exception constitutionnelle en cas de catastrophe est déclenché dans les régions du Biobio et du Maule. Le coût total des dégâts sera estimé plus tard à 30 milliards de dollars, soit 15% du PIB.
 

Le port de Concepcion dévasté par le tremblement de terre
Constitución | International Federation of Red Cross or Red Croissant | Source : Flickr.com


Betsabel avait 15 ans au moment du tremblement de terre et elle se souvient parfaitement de cette nuit : "Au moment du séisme, j’étais chez ma famille près de Carahue (à plusieurs centaines de kilomètres au sud de Constitución NDLR). J’ai été réveillé par les fortes secousses et le bruit des objets qui tombaient au sol. C’était la première fois que j’entendais la terre trembler. La maison entière bougeait et la lumière s’est coupée au moment où j’ai voulu l’allumer." Les séismes sont fréquents au Chili, mais l’intensité de celui de 2010 était telle que les personnes qui n’étaient pas nées au moment du tremblement de terre de 1960, n’avaient jamais connu une magnitude aussi intense. "Les secousses m’ont paru interminables, deux minutes qui m’ont semblé être des heures, reprend Betsabel. Quand la situation s’est calmée, il a fallu beaucoup de temps avant que les choses reviennent à la normale. Je suis allée voir mes grands-parents pour prendre de leurs nouvelles. L’électricité et les communications téléphoniques étaient coupées. Nous avons attendus trois jours avant de rejoindre la ville. C’est là où nous nous sommes rendu compte de la gravité de la situation, et où nous avons appris ce qu’il s’était produit dans le pays."

La présidente Michelle Bachelet pointée du doigt

Le tremblement de terre s’est fait ressentir jusqu'à Santiago et beaucoup de dégâts matériels furent à déplorer. "Mon père et mon frère étaient à Santiago au moment du séisme, explique Betsabel. J’avais senti que les secousses étaient plus fortes que d’habitude mais je ne pensais pas qu’eux aussi auraient pu être touchés. C’est lorsque j’ai pu les contacter des jours plus tard que je l’ai appris." Le terremoto de 2010 a mis en lumière la vulnérabilité du réseau d’électricité et de communication. Le réseau électrique s’est effondré avec la chute de poteaux et la panne du réseau interconnecté chilien, dont la production couvre 90 % de la population. C’est ce sentiment de vulnérabilité qui a le plus marqué le peuple chilien. Selon Betsabel, "le pays est habitué à subir des séismes, en majorité des temblores. Nous avions tous appris à l’école à réagir en cas de secousses, et nous avions confiance dans les systèmes d’alertes du pays. Il s’avère qu’ils n’ont pas fonctionné en 2010."

Ce dernier point est la défaillance de cette catastrophe. Quelques minutes après que le tremblement de terre eut lieu, le service sismologique de l’université d’Hawaï alerta le Service Hydrographique et Océanographique de la Marine Chilienne de l’arrivée d’un tsunami. Mais lors de son allocution suivant le séisme, la présidente de l’époque Michelle Bachelet, exclu la possibilité d’un raz de marée et appela la population à rester calme. Aucune alerte tsunami n’a été donnée. Mais une demi-heure après le choc, une grande partie du littoral fut ravagée par d’immenses vagues.
 

Allocution de Michelle Bachelet après le tremblement de terre
Gobierno de Chile |  Source : Wikimeida Commons


Le tsunami est, selon les chiffres, la catastrophe qui a causé le plus de dégâts humains lors de cette tragédie. Il y a encore aujourd’hui une grande rancœur envers Michelle Bachelet de la part de ceux qui ont perdu un proche lors de ce triste 27 février. Le pays a tout de même appris de ses erreurs, et aujourd’hui le système d’alerte est plus efficace. Les Chiliens reçoivent un message sur leur téléphone en cas de tremblement de terre ou d’alerte tsunami, les incitant à se mettre à l’abris. Les villes côtières disposent de parcours d’évacuation dûment signalés, d’ouvrages pour l’évacuation de l’eau, et de végétation pour freiner la puissance des vagues.

Le tremblement de terre de 2010 reste dans toutes les mémoires. Chaque chilien sait où il se trouvait et ce qu’il faisait le 27 février 2010. Et encore aujourd’hui, Betsabel déclare craindre un tsunami lorsqu’un séisme survient proche de zones côtières : "Je n’ai pas particulièrement peur des tremblements de terres puisque j’y suis habituée. Mais il est sûr que la violence de la secousse il y a 11 ans maintenant, me revient à la mémoire quand je vis un temblor."

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions

    © lepetitjournal.com 2024