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Rome sous les feux

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Écrit par Karine Gauthey
Publié le 28 juillet 2020

Honte à qui peut chanter pendant que Rome brûle, s’il n’a l’âme et le cœur et la voix de Néron

- Alfonse de Lamartine

Il n’était pas tous les jours facile de vivre dans la Rome antique, où la criminalité atteignait des sommets et les incendies étaient fréquents et dévastateurs (l’on pense notamment à celui qui endommagea la ville éternelle sous Néron) et se répandaient aussi vite au milieu des rues ou s’entassaient les nombreuses insulae insalubres, que les mœurs décadentes célébrées au cours d’orgies dans les palais.

Ces incendies furent une des seules craintes de la ville au quotidien pendant des siècles. De fait, au 1er siècle avant Jésus-Christ, le consul Crassus décida de mettre en place un système privé de formations de lutte contre l’incendie pour les esclaves des domus. 

L’empereur Auguste choisit de rendre ce système public, et c’est en 24 avant Jésus-Christ qu’il créa le corps de « vigiles urbani ». Après avoir essuyé quelques incendies ravageurs, ce système fut réformé en l’an 6 : les nombreux vigiles, répartis en 7 cohortes sous le commandement d’un préfet (chacune devant protéger deux quartiers de Rome), furent chargés de la protection contre les incendies.

Dans ces cohortes, on retrouvait différentes sections : les porteurs d’eau (vigiles acquarii), les arroseurs (vigiles siphonarii), les porteurs de couvertures et de matelas (vigiles emitularri) pour ne citer qu’eux. Pour lutter contre les incendies, ils disposaient d’outils spécifiques comme les siphones, pompes servant à remplir des troncs d’arbre évidés. D’une manière générale, pour éviter qu’un feu se propage, les vigiles créaient une zone de vide autour de l’incendie, en détruisant les édifices mitoyens. Vêtus d’une tunique et d’une armure légère en cuir, les vigiles urbani durent défendre la ville contre le terrible incendie de 64.

 

Négligence des Romains

Le préfet était chargé de maintenir l’ordre public durant la nuit et de prévenir et éteindre les incendies. Ainsi, il pouvait saisir les incendiaires, cambrioleurs, voleurs, crocheteurs, complices etc. En outre, la plupart des incendies étant causés en raison de la négligence des Romains, le préfet était en droit de donner des avertissements ou de faire fouetter ceux qui avaient été imprudents au sujet des feux. Être vigiles pouvait considérablement améliorer les conditions de vie. En effet, les vigiles (qui étaient souvent des esclaves affranchis) pouvaient obtenir le droit de cité complet après un temps fixé de service au corps, qui fut amené à six ans en 24 et ramené à trois ans sous Septime Sévère (apr. 193).

On peut donc juger de l’importance de ce service si l’on s’amuse à le comparer aux états de services dans la légion à l’époque impériale (qui eux aussi permettaient d’acquérir la citoyenneté aux « étrangers ») qui étaient au départ de 30 ans, puis progressivement ramenés à 20.

Ces cohortes de vigiles sont créées à la même époque que les cohortes urbaines, qui jouent le rôle de police et de service de défense de la cité et du pouvoir, tout comme les cohortes de prétoriens. Il s’agit-là d’ailleurs d’un parcours de magistratures, les officiers (tribuns) passaient d’abord par les vigiles, pour diriger ensuite les cohortes urbaines (équivalent des légionnaires), puis des cohortes prétoriennes (troupes d’élites).

On constate alors une véritable organisation des magistratures aux services de la cité, dès l’époque augustéenne, la gigantesque Rome se transforme en un immense appareil urbain, qui nécessite l’emploi constant de très nombreux effectifs.

Cette organisation incarne le premier exemple d’installation urbaine de casernes, occupées par des hommes affectés à la prévention et l’extinction des feux dans des zones géographiquement délimitées. Si vous êtes curieux et souhaitez voir les vestiges de ces casernes, il vous suffit de vous promener dans le Trastevere via della VII Coorte pour y découvrir l’excubitorium, siècle de la VIIème cohorte des vigiles.

En 1986, le bâtiment subit des travaux de restauration ; l’on peut néanmoins regretter la disparition d’une mosaïque durant la Seconde Guerre Mondiale. 

 

Karine Gauthey
Publié le 28 juillet 2020, mis à jour le 28 juillet 2020

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