La sédentarité est à l’origine de 3.2 à 5 millions de décès par an selon l’OMS. Ces chiffres inquiétants mettent en évidence le manque d’activité physique auquel essaie de remédier WeWard. Cette application française incite plus de 20 millions de personnes à marcher dans le monde. Elle a été cofondée par Yves Benchimol, PDG de WeWard. Dans un entretien pour lepetitjournal.com, il raconte son parcours entrepreneurial et son aventure au sein de son entreprise : “J'ai encore beaucoup à faire avec WeWard.”
Yves Benchimol a fait une prépa math sup, math spé avant d'intégrer l'École polytechnique. Fort de cette formation, il s’envole pour les États-Unis et plus précisément dans la Silicon Valley. Une fois sur place, Yves Benchimol se découvre une appétence pour l'entrepreneuriat. Il rencontre des entrepreneurs de la tech et devient passionné de ce domaine, notamment grâce à un stage à Palo Alto. Après un “master computer science et entrepreneurship” à Berkeley, il monte sa première entreprise “Occi”, un logiciel d'analyse de données pour la grande distribution. Après 4 ans, il ferme l’entreprise après avoir eu du mal à lui faire prendre de l'ampleur. En 2019, il co-fonde WeWard, une application mobile innovante qui encourage ses utilisateurs à pratiquer une activité physique au quotidien en convertissant les pas en argent.
D'où vous vient votre fibre entrepreneuriale ?
J’ai toujours été orienté par le côté business. Mais je suis quand même passionné de mathématiques, d’informatique et naturellement de tech. L’entrepreneuriat m’a donc toujours attiré. D'ailleurs, sur ma 3e année à Polytechnique, j'ai fait un master en entrepreneuriat. Puis, une fois arrivé dans la Silicon Valley, mes envies d'entreprendre se sont confirmées et j’ai pu avoir les armes pour me lancer.
Comment votre parcours entrepreneurial vous a amené à la création de Weward ?
La création de WeWard se base sur plusieurs points notamment sur mon expérience personnelle. Je travaille derrière un ordinateur donc j'ai un style de vie assez sédentaire. Je passe la plupart de mon temps assis derrière un écran. Les étudiants sont plutôt actifs, mais une fois dans la vie active, la tendance s’inverse. Il y a beaucoup de gros succès technologiques dans la Silicon Valley qui ont pour but de simplifier notre vie en la rendant plus sédentaire notamment avec l'ubérisation. Ces technologies contribuent à rendre les personnes plus isolées et à moins sortir.
J'ai encore beaucoup à faire avec WeWard
Cela m’a fait penser qu’il y avait probablement un créneau à prendre. J’avais aussi l’envie de créer un produit avec un impact humain. J'étais B to B et je voulais passer B to C. J'avais envie d'avoir beaucoup d'usages et d'apporter de la valeur aux autres, sans pousser à passer du temps derrière un écran. Aujourd'hui, tous les smartphones ont un podomètre et permettent de compter les pas, ce qui n’était pas le cas il y a 20 ans. Il n'est donc pas très surprenant qu’il y ait des applications montées autour de ça.
Comment avez-vous fait face à l’évolution rapide de votre start-up en entreprise internationale ?
Ce n’était pas ma première entreprise donc les premières étapes ont été beaucoup plus simples à mettre en place. Nous avons rapidement construit la première version du produit grâce à des compétences en interne, notamment techniques, pour créer une application. Ensuite, au niveau du marketing, j'ai travaillé sur de la presse et sur la viralité de l'application. Cette stratégie a plutôt bien marché, et ce presque dès le début.
Nous avions des utilisateurs rapidement tout en sortant du cercle de nos amis qui utilisaient l'application. Quelques mois après le lancement, nous avons eu les premiers journalistes qui parlaient de WeWard. Cela a créé de la viralité et de la visibilité. Les premiers problèmes auxquels nous avons dû faire face étaient plutôt techniques. Il fallait avoir des serveurs qui tiennent autant d'utilisateurs. Nous avons dû reconstruire notre modèle, faire rentrer de nouveaux salariés pour avoir une application qui ne soit pas trop lente et qui fonctionne bien. Au début, la situation était plutôt dramatique d’un point de vue technique, mais l’entreprise s’en est quand même sortie.
Comment l’entreprise s’y retrouve financièrement au vu du concept très attrayant qui permet de gagner de l’argent en marchant ?
Le concept est simple. Il y a plusieurs sources de revenus. Il y a des partenaires qui font de la pub sur l'application. Il y a ce qu'on appelle de la filiation, c'est-à-dire que WeWard prend des commissions sur des ventes que nous réalisons. Et il y a aussi de l'In app purchase, les utilisateurs peuvent acheter des bonus sur l'application comme des collectibles ou une version premium. Une partie de ces revenus va être redistribuée à nos utilisateurs parce qu'ils marchent. Il s’agit d’un modèle économique circulaire. Cette partie dépend des pays, des partenaires, de l'entreprise et de sa forme du moment. Nous essayons de redistribuer au maximum à nos utilisateurs car cela les stimule à continuer de marcher. Faire marcher plus est notre vision. Grâce notamment à tous ces partenaires, nous arrivons à financer les pas des utilisateurs.
Pourquoi avez-vous eu le besoin de venir aux États-Unis pour développer votre branche américaine ?
L'entreprise s'est bien développée en France. Aujourd'hui, notre équipe sur place est assez solide avec des personnes autonomes, qui savent comment gérer et lancer des marchés européens. Par contre aux États-Unis, le fait d’être à distance n’est pas forcément la meilleure manière de faire. Je suis donc parti là-bas pour voir, pendant quelques années, si je peux développer une équipe, monter un bureau, recruter des premiers Américains, mais surtout véhiculer la culture française de notre boîte. Cela permet aussi de montrer que l'entreprise n’a plus un focus uniquement français et européen mais réellement international.
Nous continuons à développer le produit pour stimuler le plus de monde à marcher
Nous avons choisi New York pour plein de raisons. D’abord les New-Yorkais marchent beaucoup. Ce qui se prête donc bien au produit. Mais la tech est aussi très présente et très dynamique. De plus, par rapport à la Silicon Valley, il n’y a pas un décalage horaire aussi important. À New York, je peux travailler avec les équipes en France pendant une demi-journée.
Comment voyez-vous WeWard se développer dans les années à venir ?
Il y a déjà un sujet d'internationalisation en continuant à développer l'application à l’étranger. L’entreprise se concentre sur les États-Unis, mais à partir de là, WeWard va pouvoir se lancer dans beaucoup de pays, notamment en Amérique du Nord, du Sud ou centrale. Nous continuons à développer le produit pour stimuler le plus de monde à marcher. Il y a un énorme enjeu de développement de produits, pas seulement au niveau des récompenses, mais aussi au niveau de la gamification et du social. Ce genre de développement nécessite beaucoup de travail avec les équipes techniques, produit, marketing et revenus.
Avez-vous déjà en tête d’autres idées de startup ?
Je suis le type d'entrepreneur qui aime bien être à 100 % dans des projets. Mais j’ai des idées tous les jours. Après, il faut savoir se concentrer et ne pas trop se diversifier. J'ai encore beaucoup à faire avec WeWard, donc pour le moment je ne me pose pas trop la question. Quand je peux aider d’autres entrepreneurs, je suis toujours ravi de le faire, surtout dans le domaine des applications mobiles. Nous avons de beaux projets avec WeWard. L’application peut se diversifier et, peut-être à l’avenir, travailler sur d'autres choses que la marche. Aujourd'hui, nous avons quand même construit une entreprise avec beaucoup de valeur et j’essaie de la développer.
La persévérance est une des qualités premières des entrepreneurs.
Avez-vous des conseils pour quelqu’un qui veut se lancer dans l'entrepreneuriat ?
Il faut commencer aujourd'hui et pas demain. Tout le monde a des idées, il n’y a pas de bonnes et de mauvaises idées, il y a juste des bonnes et des mauvaises exécutions. Le fait d’attendre est une mauvaise exécution en elle-même. Il n’y aura jamais 100 % de certitude qu'une idée va marcher sinon ce serait trop facile. Il faut donc se lancer aujourd'hui, quitte à ce que le concept pivote.
Deuxièmement, ceux qui ont réussi ne sont pas ceux qui n’ont jamais échoué, mais ceux qui n'ont jamais abandonné. La persévérance est une des qualités premières des entrepreneurs. Troisièmement, essayez de créer un projet ayant un impact soit social, soit économique ou apportant quelque chose de positif dans la vie des autres. Le chemin est très long. Il est beaucoup plus facile de se réveiller le matin et de faire quelque chose ayant une valeur, au-delà de celle monétaire. Un projet seulement économique reste une stimulation, mais je pense que ça ne permet pas de tenir sur 10 ans pour développer une entreprise et l'emmener très haut. Il faut que votre projet ait une valeur, qu’il apporte quelque chose d’assez sain aux personnes.