L’association Share My Meals part du constat que deux problèmes peuvent finalement devenir une solution. Lancée par une expatriée belge en 2020, l’association basée dans le New Jersey apporte une solution au gaspillage alimentaire en distribuant des repas équilibrés provenant de cafétérias aux résidents les plus démunis. « Il faut que cela soit aussi simple pour les entreprises de donner des repas que de les jeter à la poubelle », nous explique la directrice générale, Hélène Lanctuit.
Cette idée simple et ingénieuse est venue à Isabelle Lambotte, tout début 2020. Cette Belge résidant à Princeton dans le New Jersey est alors volontaire dans une banque alimentaire. « Elle s’est rendue compte des besoins des bénéficiaires et surtout qu’ils faisaient parfois deux heures de queue pour repartir sans les voir assouvis », nous raconte Hélène Lanctuit, directrice générale de l’association. 10% de la population du New Jersey (0.9 million de personnes) souffriraient ainsi d’insécurité alimentaire et 42 millions au niveau national, des chiffres en plein boom avec l’inflation. Autre constat sans appel, pour celle qui a évolué dans de grosses entreprises : « il y avait énormément de gaspillage généré dans les cafétérias ». Les chiffres officiels évoquent même 38% de gaspillage alimentaire à l’échelle du pays et 20 % des déchets alimentaires sont des repas préparés, pour la plupart provenant des prestataires de services de restauration. Or seulement 1% des aliments sont récupérés pour être donnés. Les deux problèmes identifiés se sont réunis pour former une belle solution : lutter contre l'insécurité et le gaspillage alimentaires en récupérant et livrant des repas sains aux communautés locales les plus démunies.
Share My Meals, un lancement accéléré par la pandémie
L’association Share My Meals voit le jour, presque en même temps qu’une pandémie mondiale qui fragilise encore davantage la population locale : « Le Covid a été une période terrible mais a finalement été une chance pour l’association car elle a permis d’accélérer les choses en recevant des fonds du gouvernement du New Jersey pour acheter des repas à prix coûtant et les distribuer aux personnes en situation d’insécurité alimentaire, nous explique la Française aux manettes de l’association depuis 2023. Nous nous sommes spécialisés dans la récupération des repas préparés, un concept inédit ».
Après 15 ans chez Nestlé et diverses expatriations (Etats-Unis, Suisse, Espagne), Hélène Lanctuit revient outre-Atlantique en 2021 et est tout de suite conquise par le projet d’Isabelle. L’expatriée française avait été sensibilisée lors d’une formation à l'Université de Cambridge à la problématique du changement climatique et son retour aux Etats-Unis coïncide avec une envie de se « réorienter vers un métier plus impactant et plus proche de mes valeurs ». Après quelques années au sein du board, elle prend la direction de l’association qui aujourd’hui distribue en moyenne 10.000 repas par mois.
Une association digne d’une « start-up spécialisée dans la logistique »
Pour convaincre les entreprises et les collectivités de donner des repas équilibrés à l’association, « nous avons rendu le processus le plus fluide possible, souligne Hélène. Il faut que cela soit aussi simple pour eux de donner des repas que de les jeter à la poubelle mais suivant un protocole solide au niveau sécurité alimentaire». Des bénévoles s’occupent de venir récupérer les plateaux qui permettent aux personnes identifiées par des associations de profiter de repas équilibrés. « Le profil des bénéficiaires est très varié : il y a des sans-abris qui peuvent profiter des repas dans des centres, des bénéficiaires de programmes d’aides au logement, des personnes âgées isolées ou encore des mères célibataires », explique Hélène. « Nous aidons aussi beaucoup de « working poor », c’est-à-dire des personnes qui cumulent plusieurs emplois pour s’en sortir et qui n’ont pas les moyens de se nourrir correctement », ajoute-t-elle.
Cette logistique bien huilée grâce à une plateforme technologique innovante, fait la réputation de Share My Meals, qui arrive à convaincre de plus en plus d’entreprises dans tout le New Jersey. « Nous nous sommes constitués comme une véritable start-up spécialisée dans la logistique », se réjouit Hélène Lanctuit. Le coût de fonctionnement de l’association est absorbé par des campagnes de dons, un travail sans relâche. « Une partie des dons vient de particuliers, de fondations de la région et du gouvernement. Les entreprises qui nous accompagnent apportent aussi un soutien financier », nous explique Assetou Gaudissard, responsable développement et communication.
La coalition pour peser dans le débat
Share My Meals souhaite aujourd’hui développer une coalition pour récupérer davantage de fonds mais aussi peser dans le débat au niveau local et national. « L’objectif de la coalition est aussi de créer un modèle de réplique nationale. La contribution du gouvernement nous permettrait d’élever le sujet et de pouvoir répliquer notre modèle dans d’autres états. Il faut être plus gros pour sensibiliser le public et influer sur les lois pour réduire le gaspillage alimentaire », insiste la Française, qui regrette que la donation alimentaire soit aujourd’hui moins prioritaire que d’autres solutions comme le compost. « Nous espérons faire changer les choses et que la donation devienne la norme », souligne-t-elle.
Share My Meals en appelle aujourd’hui à votre générosité. « Nos défis financiers sont permanents et nous naviguons toujours avec cette incertitude. Les dons des particuliers et des entreprises sont toujours les bienvenus », explique Hélène Lanctuit. Les résidents du New Jersey peuvent également donner de leur temps en devenant bénévoles ou bien en partageant leurs compétences avec l’association.