Ce qui nous frappe dans Rupture et Avènement (Terre d’Accueil, 2025) de Lélia Young, c’est la cohérence discrète mais tenace de l’ensemble : un livre qui relie l’intime au collectif, le minuscule à l’universel, l’ici au très loin. Cette poésie ne cherche pas à imposer une vérité, mais à suggérer une attention, une écoute du monde.


Lire un poème, c’est faire une traversée. On croise un mot qui nous touche, une phrase qui nous emmène quelque part, un rythme qui donne du plaisir esthétique, de réfléchir et de voir le monde autrement. Il y a des poèmes qui se lisent avec hâte, d’autres lentement, comme on regarde un soleil couchant. Dans Rupture et Avènement (Éditions Terre d’accueil, 2025), la poésie se lit comme on regarde un horizon qu’on vient à peine de découvrir, avec admiration, enthousiasme. Il y a une humanité dans ce livre qui touche notre sensibilité. L’auteure explore plusieurs thématiques avec une grande ouverture sur le monde. Une sensibilité partagée, une réflexion sur les portes qui s’ouvrent et se ferment, sur l’exil, la migration, la nature, le monde d’aujourd’hui et celui à venir. Sur l’existence.
Rupture et Avènement est un grand voyage parce qu’il traverse des territoires multiples, géographiques, intérieurs, historiques et sensoriels, sans jamais se figer dans une seule direction. Chaque poème est une escale, une respiration différente, un pas vers l’ailleurs ou vers le plus profond de soi. On y entend le murmure du fleuve, le souffle du désert, le chant d’un oiseau, l’écho d’une mer. Le poète nous emmène de l’Afrique aux rues de l’Amérique du Nord, de la mémoire à l’instant présent, de l’enfance à la conscience politique. Ce n’est pas un voyage simple, mais un parcours d’éveil, où l’on se déplace avec les mots comme avec des compagnons de route. Ce recueil nous transporte, non pour fuir, mais pour mieux voir, mieux ressentir, et mieux habiter le monde.
Le temps du poème
Le temps. Quel temps sommes-nous. Ce livre porte en lui la densité de toutes les saisons. Ici, la langue est juste, épurée, portée par un souffle méditatif. Une poésie qui ne cherche pas l’effet, mais qui atteint, en silence, le cœur de ce qui compte, la vérité nue, la mémoire, et le refus de se complaire dans l’oubli. Il n’y a aucun avenir / à laisser périr l’innocent… écrit l’auteure. La poésie de Lélia Young interroge notre époque et notre manière de la regarder.
Une méditation poétique sur le monde contemporain ; ses fractures, ses élans, ses pertes et ses espoirs. D’un poème à l’autre, elle trace une cartographie sensible où se croisent l’intimité du quotidien, la conscience politique et la contemplation du réel. Il y a aussi une forte présence du corps et du lieu : le café brûlant, le chant matinal, l’hiver torontois, la chaleur d’un coin d’Afrique. Elle observe un monde où l’humain, parfois, se désaccorde de lui-même.
Sa poésie se distingue par une langue maîtrisée, fluide, mais traversée de tensions, où l’image poétique n’est jamais gratuite : elle interroge.
Elle engage. Elle ouvre. Chaque vers semble écrit contre l’oubli et l’indifférence, avec le souci de restituer la vibration du réel sans le trahir.
Il propose un autre rythme, une autre manière d’habiter le langage : avec gravité, avec tendresse, parfois avec une forme de révolte. Une poésie qui ne dort pas, qui « frappe le mur des secondes », et nous rappelle que même dans l’inertie, la conscience peut encore inventer du mouvement.

Lélia Young, Rupture et Avènement, Terre d’Accueil, Ontario, 2025, 112 p.
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