

Comme l'avait promis Silvio Berlusconi au moment de la création de son quatrième gouvernement le nombre de ministères octroyés aux femmes a augmenté. Mais à quel prix ? Ex-show girls, souvent ex-maîtresses, ces ministres nouvelles générations entachent le combat de la femme pour la parité.
De la parité à la promotion canapé
Le combat pour la parité homme-femme en politique comme ailleurs est une lutte de tous les jours. L'article 51 de la Constitution italienne modifié en mai 2003, garantit l'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions politiques en ces termes : " tous les citoyens des deux sexes peuvent accéder de manière égale à l'administration publique et aux fonctions électorales, selon les conditions prévues par la loi. [?] Dans ce but la République promeut l'égalité des chances entre les femmes et les hommes". Si la loi garantit l'égalité elle n'établit pas de quotas pour autant. La fonction doit se gagner au mérite ? en théorie. Mais en Italie, depuis bientôt une décennie, loin d'être majoritaires au gouvernement, il semblerait que les femmes se fassent rares. Le gouvernement Giuliano Amato (2000-2001) comptait quatre femmes dans sa composition; les gouvernements II et III de Silvio Berlusconi entre 2001 et 2006 intégraient deux ministres de sexe féminin (pour une seulement dans son gouvernement de 1993-1994) ; Romano Prodi lui féminisait largement son gouvernement par rapport à ses prédécesseurs en 2006 avec six femmes, et Berlusconi qui avait pourtant promis d'intégrer plus de femmes ne dépassa pas les ambitions de Prodi avec cinq femmes. La représentation du sexe féminin dans la politique italienne reste donc faible. C'est sans parler des ministères qui sont confiés à ces femmes, souvent sans portefeuille et jamais stratégiques. Une ministre italienne de l'intérieur ou de la défense n'a encore jamais existé.
Mais ce n'est malheureusement pas là que réside le plus gros problème, mais bien dans les conditions d'accès de ces femmes au gouvernement. N'a-t-on jamais vu le ministre de l'intérieur Roberto Maroni poser nu dans un magazine ? c'est peut-être préférable? Cependant, "les femmes de Berlusconi" ont pour la plupart obtenu leurs positions actuelles grâce à leur passé sulfureux. Car ce n'est un secret pour personne, les belles femmes plaisent au Premier Berlusconi qui n'est plus à une "berlusconnerie" près sur le sujet. Certaines rumeurs laissaient entendre que ce dernier faisait passer des cours accélérés à ses protégées du PdL en vue de les nommer candidates aux élections européennes. Patrizia d'Addario faisait éclater le scandale en 2009 en annonçant qu'elle avait passé la nuit avec Berlusconi en échange de la promesse d'un poste de député européen. Déçue de se retrouver sur une liste du PdL dans les Pouilles elle décidait alors de dévoiler cette information. Parmi les listes du PdL on retrouve les ex maîtresses du Premier, des ex show-girls comme Nicole Minetti en Lombardie. Toutes ces frasques viennent entacher l'image de la femme en politique. En 2008 Berlusconi lançait une boutade sur la composition du gouvernement espagnol trop féminisé et donc "difficile à gérer". Il paraît dès lors évident que le Premier actuel ne sera celui qui nommera au sein de son gouvernement des femmes compétentes, à la tête bien pleine. Mais qui sont ces cinq ministres et qu'ont-elles fait pour obtenir de tels postes ?
(Mara Carfagna, dessin de Marina L.)
Les ministres selon Berlusconi
Elles sont deux parmi les cinq femmes du gouvernement à trainer derrière elles un lourd passé. Si elles cherchent encore à prouver leurs compétences et se montrer crédibles face aux italiens, on peut légitimement se dire que sur la scène internationale rien n'est réellement acquis.
Michela Vittoria Brambilla, actuelle ministre (sans portefeuille) du Tourisme, a fini finaliste du concours Miss Italie en 1986 avant d'animer les émissions des chaînes du groupe Mediaset (propriété de Berlusconi) et de poser nue pour des magazines de charme. Un beau jour, elle se lance en politique, fonde l'association nationale Cercle de la Liberté qui pose les bases du Peuple de la Liberté. Fidèle et loyale au Premier elle finit au gouvernement. Aidée par Berlusconi ? Qui sait?
Mara Carfagna, au c?ur du divorce de Berlusconi qui disait au sujet de cette dernière en 2007 "Si je n'étais pas déjà marié, je l'aurais épousée immédiatement", est aujourd'hui ministre de l'Egalité des chances. Mais comment est-elle devenue ministre ? Ancienne show girl, elle participe elle aussi au concours de Miss Italie en 1997 (coïncidence), puis travaille elle aussi pour les chaines de télévision du groupe Mediaset (coïncidence encore). Elle aussi entame une carrière politique, d'abord député de Forza Italia, en passant par député du Peuple de la liberté pour finir ministre pour l'Egalité des chances.
Ces deux femmes n'ont pas un cursus des plus prestigieux, a priori rien ne les prédisposait à une telle carrière politique. Comme l'explique Silvio Berlusconi, elles apportent un peu de glamour à la politique italienne. C'est peut-être cela faire de la politique comme une femme et ce n'est pas tant à leur avantage. Cependant quelques ministres viennent redorer l'image de la femme en politique. Les trois autres dames du gouvernement actuel ont un parcours plus similaire à ceux des hommes, leur donnant plus de poids et de crédibilité dans un monde principalement masculin.
Pas toutes des ministres "berlusconiennes"
Quel que soit le bord politique pour lequel on penche, il n'en reste que les trois ministres qui suivent semblent avoir un bagage un peu plus solide que la Brambilla et la Carfagna. Une lueur d'espoir dans le combat pour l'égalité des chances (la vraie) entre les hommes et les femmes, où la femme serait nommée pour ses compétences intellectuelles plus que pour ses charmes.
Giorgia Meloni, à 34 ans elle est la ministre la plus jeune du gouvernement, actuellement en charge de la Jeunesse. Elle entame sa carrière politique en adhérant au "Front de la jeunesse" à 15 ans et devient par la suite responsable nationale du mouvement étudiant d'Alleanza Nazionale. En 1998, elle est élue conseillère de la Province de Rome pour Alleanza Nazionale. Sa carrière s'étoffe ainsi de suite au sein de la droite italienne. En 2006 elle est élue à la chambre des députés sur la liste du Parti Alleanza Nazionale, pour devenir entre 2006 et 2008 une des plus jeunes vice-présidente de la chambre des députés de l'histoire de l'Italie.
Stefania Prestigiacomo, ministre de l'environnement du gouvernement Berlusconi IV est élue présidente du groupe des jeunes entrepreneurs de la ville de Syracuse dont elle est originaire en 1990. Elle étudie les sciences de l'administration publique, fait carrière dans l'entreprenariat et épouse Angelo Bellucci, ancien coordinateur provincial de Forza Italia. En 1994 elle adhère au Parti Forza Italia et est élue la même année à la chambre des députés. Elle devient entre autres suppléante de la délégation italienne au Conseil de l'Europe et à l'Assemblée parlementaire de l'Union de l'Europe occidentale. En 2001 elle est nommée ministre pour l'Egalité des chances dans le gouvernement Berlusconi, puis ministre de l'Environnement en 2008.
Mariastella Gelmini, juriste de profession spécialisée en droit administratif, est l'actuelle ministre de l'éducation. Elle débute sa carrière politique comme coordinatrice régionale de Forza Italia en Lombardie. En 2006, elle est élue à la chambre des députés.
Ces femmes disposent d'un véritable parcours politique. Pourtant du fait des frasques de Berlusconi et de sa politique du paraître, leurs compétences sont passées à la trappe. Quand on parle de la Gelmini par exemple c'est pour rappeler qu'elle a voté contre sa propre loi (la privatisation des universités).La secrétaire d'Etat Daniela Santanché qui défend corps et âme Silvio Berlusconi est très populaire dans les médias pour ses réactions et ses coups de gueule. Le 20 janvier dernier elle quittait le plateau de l'émission télévisée Anno zero (Rai due) à la vue d'une caricature contre Berlusconi ("si tu aimes tant les jeunes filles devient prêtre"). On parle peu en revanche de leurs programmes, ou du moins trop peu et on oublie que toutes les femmes du gouvernement italien n'ont pas été des soubrettes (show-girls italiennes). Que l'on soit d'accord avec leurs choix politiques ou non, il est navrant de constater que le passé de deux ministres décrédibilise la femme politique italienne sur la scène internationale
Elise BONNARDEL (www.lepetitjournal.com/rome) lundi 14 février 2011
