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APA CONDE DE ORGAZ - "On est en permanence en position de négociation"

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 16 juin 2013, mis à jour le 25 juin 2013

Entre les sites de Saint-Exupéry et de Conde de Orgaz, ce sont quelque 2.200 familles dont la progéniture est scolarisée au Lycée Français de Madrid. Une communauté qui partage pour préoccupations le bien être de ses enfants, la qualité de l'enseignement dispensé et les débouchés post-baccalauréat offerts par l'établissement. Et des parents qui, loi française oblige, disposent d'un droit de participation aux commissions et aux conseils d'établissement, apportant un regard attentif aux décisions de l'administration, questionnant, proposant ou négociant si nécessaire.


Avec près de 2000 familles utilisant ses services sur Conde de Orgaz, 2 représentants sur 5 au Conseil d'Etablissement, la plus ancienne des associations de parents d'élèves, l'APA Conde de Orgaz, constitue une véritable institution à elle seule, cristallisant une grande partie des débats et des inquiétudes qui animent cette communauté de familles. Travaillant en bonne entente et en complémentarité avec les 2 autres associations actives, l'APA de Saint-Exupéry et l'ALI sur Conde de Orgaz, l'APA Conde de Orgaz se bat au quotidien pour défendre les intérêts des parents. Rencontre avec Gabriel Camacho, Président de l'association, et visite guidée en compagnie des personnels permanents et des bénévoles, au sein des multiples dossiers ouverts. Attention : sujets sensibles. Mais pas de panique, nous avons déminé le terrain pour vous.

(Certains membres du bureau de l'APA / Photo lepetitjournal.com)

"Nous sommes entre le marteau et l'enclume", admet au cours de la conversation Renaud Rivain, membre bénévole du conseil d'administration de l'APA et en charge de la commission bourses. "Notre objectif est de rendre service aux parents dans le cadre de la communauté scolaire", décrypte pour sa part Gabriel Camacho, Président. Le marteau : 2.200 familles, dont une grosse majorité espagnoles ou franco-espagnoles, qui scolarisent leurs enfants au LFM. 4400 papas et mamans qui attendent que leurs intérêts soient défendus au mieux par les associations de parents d'élèves. Une tâche souvent ardue, "d'autant que les familles ne parlent pas toutes d'une même voix", explique Renaud Rivain, "et que l'implication des parents reste insuffisante". Insuffisante, mais en hausse. Avec des sujets brûlants, tels que la préparation à la selectividad (et à l'accès à l'université espagnole), ou encore les projets d'extension du site de Conde de Orgaz, la participation des parents à nettement augmenté ces dernières années, atteignant près de 30% aux dernières élections. Mieux, mais pas assez, quand on mesure l'ampleur des tâches gérées par les associations de parents d'élèves. "A l'étranger, la contribution des parents à la vie des établissements scolaires du réseau est plus importante qu'en métropole, où nous avons une véritable culture de prise en charge par l'Etat", analyse Renaud Rivain. "Cette plus forte présence, qui se traduit par exemple par un fort dynamisme de l'Association Culturelle et Sportive (ACS) à Madrid, n'est possible que grâce au travail des bénévoles, qui s'impliquent énormément". "Le système français permet aux parents d'intervenir à de nombreux niveaux", complète Gabriel Camacho. "C'est un privilège, il ne faut pas y renoncer".

Politiquement correct
Et l'enclume alors ? "Nous travaillons avec l'administration de l'établissement, certes, mais aussi avec les autorités espagnoles, l'Ambassade de France en Espagne ou les représentants des Français de l'étranger (députés, membres de l'AFE)", commente Gabriel Camacho, "afin de transmettre les requêtes des parents d'élèves et de défendre leur position sur différents sujets". "On est en permanence en position de négociation", ajoute le Président. "Notre volonté est de faire avancer les dossiers défendus par les parents, mais dans un esprit de collaboration avec nos interlocuteurs, en travaillant sur le long terme", explique-t-il.
Une position pas toujours confortable, un tantinet "politiquement correcte", que l'APA assume. Un style qui lui permet de maintenir le dialogue avec l'ensemble de ses interlocuteurs, mettant le doigt sur les sujets sensibles, mais se gardant d'enfoncer jusqu'à la garde, le couteau dans la plaie. Prudente, l'APA soigne sa com', souhaitant s'assurer que son message ne sera pas trahi, ni déformé.

gabriel camacho apa liceo madrid
(Gabriel Camacho, Président de l'APA / Photo lepetitjournal.com)

Une capacité unique de prendre la température à tous les niveaux de la vie scolaire
On l'a dit, l'APA est une grosse machine. Dans ses nouveaux locaux mis à neuf il y a peu, l'association est en ce début de mois de juin, en pleine campagne de livres scolaires, en préparation de la rentrée prochaine. Au total, 30.000 ouvrages gérés par le bureau, entre manuels scolaires, cahiers d'exercices et livres de lecture. Une organisation qui permet aux parents de disposer facilement et moyennant moindre coût des livres que le Lycée demande chaque année, avec en prime un système de remplacement en cas de perte de la part de l'élève. 2.063 enfants sont concernés par ce service cette année. Farah Ouezzani, Vice-présidente, bénévole à temps complet, énumère les principaux services assurés par l'APA : outre les prêts de livre, la gestion des casiers, ou celle, particulièrement pointue, des routes de ramassage scolaire, 35 trajets au total qui sillonnent la capitale selon des configurations très précises (voir encart). Mais au total, ce sont une quinzaine de commissions que le conseil d'administration chapeaute, avec une capacité unique de prendre la température à tous les niveaux de la vie scolaire : de la "commission hygiène et sécurité" à la suscitée "commission des bourses", en passant par la "Caisse de solidarité" ou la "Commission Menu". Surtout l'APA est présente au Conseil d'établissement, au Conseil d'école, au Conseil de second degré et au conseil de vie lycéenne. Avec son nez à tous les étages du LFM, l'APA rapporte, dans un esprit de collaboration toujours, les incidents du quotidien et suggère les améliorations possibles. "C'est nous qui recevons les plaintes des parents, si l'élève a un problème", résume Farah Ouezzani.

Projets d'agrandissement du site Conde de Orgaz
Il est certain que l'APA met, à bien des égards, de l'huile dans les rouages du LFM. Mais pas que. Si ses domaines d'intervention sont multiples, une partie toujours plus importante de l'énergie de l'association est dédiée à la défense du porte-monnaie des parents d'élèves. Avec l'arrivée de la crise, c'est un front particulièrement sensible, sur lequel l'APA apporte des réponses à différents niveaux. A commencer par la négociation des frais de scolarité : "C'est un débat récurrent", souligne Gabriel Camacho, qui rappelle que sur l'année 2012 / 2013, la hausse des frais a été scellée à 2,5%, contre les quelques 5% proposés par l'établissement. Dernièrement, cette "lutte historique" qui consiste à contenir la partie des ressources du LFM assumée par les parents d'élèves (environ 60% des quelque 18 millions d'euros de budget de l'établissement, estime l'association), a pris une coloration particulière, avec les projets d'extension du site de Conde de Orgaz. "C'est un projet avec une certaine dose d'incertitude", juge Renaud Rivain. De fait, une étude de financement menée par l'AEFE a été demandée cette année, afin de remettre à plat l'ensemble des coûts des différentes phases qu'impliquerait l'agrandissement. "Sur le fond, nous sommes plutôt en faveur d'un agrandissement", explique encore Renaud Rivain, "mais nous sommes surtout en faveur d'avoir toute l'information, de façon fiable, pour pouvoir nous prononcer. Aujourd'hui, nous ne sommes pas en mesure de mesurer l'impact du projet sur les coûts de scolarité. Nous n'avons aucun engagement de prise en charge de la part de l'AEFE".

De la PEC aux bourses
Une inquiétude qui, avec la disparition de la PEC (Prise en Charge des frais de scolarité de la Seconde à la Terminale, mise en place sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy et abolie par le gouvernement de François Hollande), explique la place prise par le débat économique dans l'action de l'APA. Aujourd'hui, les commission des bourses étudie les conditions sous lesquelles les fonds dédiés à la PEC on été transférés vers cet autre système d'aide. "On nous a dit que le budget alloué à la PEC serait restitué intégralement sur les bourses", commente Renaud Rivain, "dans la réalité on doute fortement que cela a été le cas". Et d'ajouter : "Beaucoup de personnes qui étaient dans le besoin et bénéficiaient de la PEC n'ont pas eu de bourse". L'APA a depuis plusieurs mois alerté ses interlocuteurs sur une clause particulièrement sensible concernant les conditions d'attribution des bourses : celle relative à la possession d'un bien immobilier. "Quels que soient les revenus et le nombre d'enfants scolarisés, on est par principe exclu des bourses si l'on est propriétaire d'un appartement d'une valeur supérieure à 220.000 euros", s'agace Renaud Rivain, "or l'immobilier est cher à Madrid et il est très facile de tomber dans cette catégorie, sans pour autant vivre dans l'aisance". Un processus de révision du système d'allocation des bourses serait en cours, en attendant l'APA est confrontée à des situations toujours plus dramatiques, auxquelles elle essaye, dans sa mesure, d'apporter des solutions.

La commission transport : l'APA gère le ramassage scolaire, un service primordial pour permettre aux familles éparpillées dans la capitale d'accéder dans de bonnes conditions à Conde de Orgaz. Au total 22 routes quotidiennes et 12 routes "de lettres", pour les activités extra-scolaires, plus une route en cas de panne, qui permettent à près de 700 élèves de voyager en moins d'une heure, entre leur domicile et l'établissement. Nouveauté en ce mois de juin, un système d'arrêts géolocalisés a été développé par l'association, permettant d'identifier sur une carte de Madrid la position exacte de l'arrêt le plus proche du domicile.
Les routes sont pensées pour que tous les élèves soient au Lycée à 8h50 au plus tard et dans chaque autobus, une monitrice accompagne les enfants du début à la fin du trajet, pour s'assurer qu'aucun incident n'émaille la commutation des élèves.

Le rôle de la Caisse de solidarité
Outre la transmission d'information de la part de l'APA, c'est via la caisse de solidarité, cet organisme repensé il y a quelques années pour venir en aide aux familles dans l'embarras, que nombre de situations complexes sont au cas par cas et au coup par coup, traitées. Gérée conjointement entre associations de parents d'élèves et administration, alimentée par une cotisation de 6 ? par élève et par trimestre, elle permet de décharger ponctuellement les parents confrontés à des difficultés économiques. Et elle tourne dernièrement à plein régime. "Nous avons de plus en plus de parents qui viennent nous solliciter. Dans la plupart des cas, il s'agit de situations dramatiques", commente Renaud Rivain. "L'objectif est de redistribuer la globalité du montant collecté par cette caisse", souligne Gabriel Camacho. "Nous nous réunissons régulièrement en commission pour évaluer les demandes, vérifier les dossiers et décider vers qui les fonds seront distribués". Utilisée pour la prise en charge de certains frais ponctuels (cantine, transport... débat : faut-il financer les voyages scolaires ?), la caisse de solidarité permet aussi d'assurer, pour un élève en Première, une aide qui lui permet d'arriver jusqu'au Bac, afin de l'aider à conclure sa scolarité dans le réseau.

Un investissement pour la cause commune
Une solidarité qui n'est pas qu'un vain mot. Dans les bureaux de l'APA, on aime ainsi à rappeler qu'on est à l'origine de la fameuse Course de la Solidarité, avec 600 élèves ayant couru cette année pour différentes ONGs, choisies en collaboration avec le Lycée. Il y a d'ailleurs au sein de l'association, un investissement pour la cause commune qui souvent ne compte pas ses heures. Et s'il y a regard critique, dans la bonne tradition de l'éducation à la française, c'est toujours au service de la communauté qu'il s'exerce. "Notre intérêt, c'est que le LFM reste parmi les établissements d'élite de la capitale, et garde tout son attrait", conclut Gabriel Camacho.

Vincent GARNIER (www.lepetitjournal.com - Espagne) Lundi 17 juin 2013
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Publié le 16 juin 2013, mis à jour le 25 juin 2013