Au cœur de la cinquième semaine de confinement en Espagne, la condition particulière des enfants est mise en avant par de nombreux parents qui souhaiteraient leur faire prendre l'air. L'État assure se préoccuper des mineurs, mais maintient l'interdiction de sortie pour le moment pour des raisons de santé publique.
L'Espagne est soumise à un état d'alerte exceptionnel qui retient la population en confinement depuis le 14 mars 2020. L'article 7.e. du décret publié au BOE, qui définit les conditions du confinement, stipule bien que les sorties sont autorisées dans des cas exceptionnels pour "l'assistance et les soins des personnes âgées, dépendantes, et des mineurs". Mais il faut bien comprendre que cette exception n'est tolérée que dans des cas bien précis : celui des mineurs atteints d'une maladie ou d'une incapacité particulière, ou le cas des familles monoparentales. En effet, un parent vivant seul ne peut pas laisser un enfant en bas âge seul au domicile lorsqu'il doit aller acheter de la nourriture, et c'est dans ce cas exceptionnel que le mineur peut accompagner le parent au supermarché. Mais en dehors de ces exceptions, le confinement à l'espagnole n'autorise pas la sortie des enfants, sous peine de contravention pour les parents.
L'importance des sorties
Un mois après le début du confinement, parents et spécialistes tirent la sonnette d'alarme. De nombreux psychologues prennent la parole dans la presse espagnole pour alerter des dangers du manque de sortie pour les plus jeunes. Bien que les médecins assurent que le confinement ne laissera aucune séquelle sur les mineurs, ils avertissent néanmoins des risques : les enfants, et plus particulièrement les moins de 6 ans, sont encore en phase de développement neuronal. Le manque de lumière directe et le manque d'exercice en plein air sont donc davantage préjudiciables pour eux que pour les adultes. Les principales préoccupations concernent le stress et l'anxiété que la situation de confinement peut provoquer sur le long terme, si l'état d'alerte se prolonge, sur les plus jeunes enfants qui n'ont pas encore la capacité d'exprimer toutes leurs émotions. D'autre part, les mauvaises habitudes qui peuvent être prises durant le confinement représentent un risque pour la santé des plus jeunes : les enfants sont les premiers menacés par une mauvaise alimentation, une prise de poids voire même l'obésité, comme par des troubles du sommeil. Les spécialistes insistent sur la nécessité d'un temps d'adaptation pour sortir du confinement, afin de remettre en place un rythme de vie et des bonnes habitudes.
Les solutions des voisins européens
Le ras-le-bol des parents confinés en Espagne avec leurs enfants est renforcé par les mesures observées chez les pays voisins. En effet, les mineurs sont autorisés à sortir sous certaines conditions dans d'autres pays d'Europe. La France et l'Allemagne par exemple, tolèrent des "déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile". Les mineurs sont donc autorisés à prendre l'air et à se défouler un instant à l'extérieur, s'ils le font pour une courte durée, près de leur domicile, et en respectant les règles de distancement social lorsqu'ils croisent d'autres personnes ou d'autres enfants. De plus, les sorties de groupe étant interdites, seul l'un des deux parents est autorisé à sortir pour accompagner l'enfant. En Italie, l'un des principaux pays touché par le Coronavirus, qui fut pendant un temps l'épicentre de l'épidémie, se remet avec précaution de la crise qui a emporté avec elle plus de 20.000 habitants. L'Italie maintient le confinement de sa population au moins jusqu'au 3 mai, mais en a assoupli les règles. La sortie des enfants est désormais autorisée avec un seul de leurs parents, pour aller faire les courses ou pour un court instant devant leur domicile.
Un danger tant que le virus n'est pas contrôlé
Le gouvernement espagnol assure prendre sérieusement en compte les recommandations des psychologues et les exigences des parents, mais leur demande de comprendre qu'il faut agir "avec la plus grande prudence et avec une précaution extrême" dans la situation sanitaire exceptionnelle que nous sommes en train de vivre. Le ministre de la Santé Salvador Illa a mis fin au débat en expliquant en conférence de presse que "rien ne nous satisferait plus que d'annoncer des mesures permissives pour les enfants, mais cela n'est pas encore possible pour le moment". Le gouvernement espagnol considère l'autorisation de sortie des enfants comme une mesure précipitée, et craint que cela ne provoque un nouveau pic de l'épidémie de Coronavirus.
Le ministre a souligné la raison principale de ce refus : les enfants sont un important vecteur de transmission. En effet, les statistiques démontrent que les enfants sont ceux qui souffrent le moins de l'épidémie, et qu'ils développent des infections généralement bien plus légères que les adultes lorsqu'ils sont touchés. Mais ils représentent un risque de contagion élevé pour le reste de la population, notamment pour les grands-parents qui sont eux considérés comme personnes à risque. Autoriser les enfants à sortir prendre l'air ou jouer en bas de chez eux reviendrait à autoriser de nombreux adultes à sortir par la même occasion. Le gouvernement assure que l'assouplissement des mesures de confinement, lorsqu'il aura lieu, considérera les nécessités des enfants comme priorité. Les plus petits seront donc les premiers autorisés à sortir. Mais aucune date n'est fixée pour le moment.