Le ton monte chez les socialistes. L'ancien premier ministre Felipe González et son vice-président Alfonso Guerra se sont unis pour déclarer leur totale opposition à une possible amnistie des indépendantistes catalans.
Pedro Sanchez a réussi l'impossible: Réunir "le couple le plus important de la politique espagnole", selon les propres mots du président de l'Ateneo, où se tenait la présentation du livre d'Alfonso Guerra. En effet, l'ancien président du gouvernement entre 1982 et 1996 Felipe González et son vice-président Alfonso Guerra ne s'étaient plus revus -ni parlé?- depuis presque 30 ans. Alors, autant dire que la présentation de ce livre revêtait une toute autre importance, d'autant que la nouvelle de l'expulsion du PSOE de l'historique Nicolas Redondo était encore toute fraîche.
Je sais que beaucoup résistent avec moi
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le vieux couple réconcilié pour l'occasion, Gonzalez-Guerra, n'a pas déçu! "Si un homme voit une injustice, il doit le dire haut et fort", a commencé l'ancien vice-président. Il a ensuite qualifié "l'autre" de "dissident", "l'autre", en référence à Pedro Sánchez qui, selon lui, change d'avis et "un jour défend une chose et un autre, une autre". "Moi, a-t-il dit, j'ai toujours défendu la même chose".
Précisément, Guerra et González, qui sont critiqués de ne pas soutenir le PSOE et d'être des "dissidents", ont ainsi rappelé que Pedro Sánchez étaient contre l'amnistie et l'avait déclaré anticonstitutionnelle jusqu'à il n'y a pas si longtemps. "Je ne suis pas déloyal ou dissident, les dissidents sont ceux qui changent constamment" a déclaré l'ancien numéro deux du parti socialiste.
Il n'y a pas de place pour l'amnistie dans la Constitution
De son côté, Felipe Gonzalez a rappelé que "le PSOE est la seule force politique qui conserve son acronyme et qui a participé à l'élaboration de la Constitution. Et en ce sens, en tant que 'seul survivant du pacte constitutionnel', il se doit de le défendre. On peut défendre les idées que l'on veut, mais ce que l'on ne peut pas faire, c'est bafouer la légalité. L'amnistie n'est pas constitutionnelle", a-t-il déclaré. "Elle n'a pas sa place, tout comme l'autodétermination".
Ils ne peuvent pas nous faire chanter
Le leader historique du PSOE a déclaré qu'il ne connaissait aucun pays démocratique qui introduirait un élément "d'autodestruction de son unité, de son intégrité". "Nous ne pouvons pas nous permettre d'être soumis au chantage de qui que ce soit. Par qui que ce soit. Et encore moins par des minorités en voie d'extinction". Felipe Gonzalez a rappelé qu'avec la Transition, ils avaient construit une démocratie qui avait été un succès car, pour la première fois dans l'histoire de l'Espagne, tout le monde était inclus: conservateurs, socialistes, communistes et nationalistes.
L'amnistie transformerait le démocrate en répresseur et les félons qui ont attaqué la démocratie en démocrates
Guerra s'est alors montré solennel : "Je demande, en tant que citoyen, démocrate et socialiste, qu'une amnistie qui falsifierait l'histoire ne soit pas accordée. Elle transformerait le démocrate en répresseur et les félons qui ont attaqué la démocratie en démocrates". Guerra a d'ailleurs regretté que toute la politique espagnole dépende des nationalistes, qui représentent à eux seuls à peine 6% de l'ensemble de la nation.
L'amnistie, une condamnation de la démocratie
L'amnistie serait, selon ses mots, "une humiliation délibérée de la génération de la Transition et une condamnation de la démocratie". Échanger les votes d'investiture contre "l'effacement de leurs crimes" serait une "criminalisation du système constitutionnel qu'un démocrate ne peut accepter".
Pour les deux hommes, la solution passe à présent par la conclusion de grands pactes entre le PSOE et le PP, faute de quoi "aucune réforme importante ne pourra être menée à bien". "Face au risque pour la démocratie, je ne me résigne pas", a proclamé l'ancien numéro 2 du parti socialiste, et je sais que beaucoup résistent avec moi", "la liberté et la démocratie se nichent dans le cœur de nombreux socialistes".
Le PSOE , en tant que 'seul survivant du pacte constitutionnel', se doit de le défendre
Pour l'heure, de nombreux ministres de González et des dizaines de socialistes "historiques", du "PSOE de toujours" étaient présents. Mais c'est tout. Personne du gouvernement actuel. Seul poids lourds de la nouvelle génération, le président de Castille-La Manche, Emiliano García-Page, raison pour laquelle Felipe González a alors ironisé en déclarant: "Au train où vont les choses, soit nous nous mettons tous sous la protection de García-Page, soit je ne sais pas où nous irons"…
Mais entre les mots et l'action, pas sûr que nos retraités octogénaires franchissent le Rubicon et décident par exemple d'organiser un nouveau mouvement ou de se présenter aux prochaines élections, comme l'insinuaient certains, si finalement Pedro Sanchez n'obtient pas la majorité des voix. Pas plus d'ailleurs que le PSOE n'ose expulser Felipe Gonzalez… La suite, après l'échec de l'investiture d'Alberto Nuñez Feijoo le 27 septembre prochain.