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Priti Woman ?

Priti WomanPriti Woman
Kat Love-Unsplash
Écrit par Marie Lagache
Publié le 30 septembre 2020, mis à jour le 30 septembre 2020

Priti Patel, Secrétaire d’Etat à l’Intérieur, a songé à une solution digne d’un film à l’égard des demandeurs d’asile au Royaume-Uni. Sauf que ce n’est pas inspiré de Pretty Woman, mais plutôt d’Hunger Games.

Steven Spielberg n’aurait pas fait mieux. Priti Patel, secrétaire d’État à l’Intérieur pour le gouvernement de Boris Johnson, voulait “envoyer des demandeurs d’asile sur une île isolée de l’Atlantique”, selon des documents révélés par le Financial Times mardi 29 septembre. Un projet qui attriste.

La conservatrice aurait alors demandé à ses équipes d’examiner les “aspects pratiques de l'expédition des migrants vers ces endroits éloignés”. Mais, a-t-elle demandé à l’un d’entre eux d'étudier l’aspect humain d’une telle mesure ? Même si finalement Priti Patel aurait abandonné l’idée, le seul fait d’y avoir pensé peut faire douter.

Car, au-delà de ressembler à un début de scénario pour le remake des Hunger Games, une proposition pareille pose des questions fondamentales de dignité humaine. Si plusieurs sources du gouvernement citées par le Financial Times estiment qu’un tel projet pourrait apporter une “protection” ou un “refuge” aux migrants, on peut s’interroger sur la vision qu’on a de l’être humain.

Et sur cette île, comment les migrants prouveront-ils qu’ils méritent d’obtenir l’asile au Royaume-Uni ? En réalisant des travaux forcés ? Un concours de cuisine autour du fish and chips ? Une battle de chant sur God Save the Queen ? De manière générale, comment peut-on mesurer au milieu d’une île déserte la valeur de quelqu’un aux yeux d’un pays ?

Paulo Coelho, romancier brésilien, explique : “La façon dont tu traites les autres est un reflet direct de la façon dont tu te sens envers toi-même”. À plus grande échelle, on peut donc se dire que la manière dont un pays traite ses migrants reflète beaucoup de choses sur lui même. Le Royaume-Uni aurait alors encore beaucoup de progrès à faire dans ce domaine, mais il n’est pas le seul.

L’idée de Priti Patel n’est pas sortie de son chapeau à histoires de science-fiction dystopique car elle a déjà été soumise ou inspirée par d’autres. L’île de Lesbos entre la Turquie et la Grèce est ainsi devenue une prison géante dans des conditions insalubres pour des migrants en attente d’un avenir en Europe après avoir fui la guerre et la misère dans leur pays.

Pourtant, la version britannique 2.0 est pire. Il n’est pas question de créer un nouveau camp à la frontière ou de le construire sur une île sur la Manche entre la France et la Grande- Bretagne. Le centre imaginé par Priti Patel se situerait sur l’île de l'Ascension isolée à 4 000 kilomètres du Royaume-Uni. Loin des espoirs de nouveau départ des demandeurs d’asile.

L’île de Sainte-Hélène, territoire britannique perdu dans l’Atlantique, aurait aussi été envisagée pour le projet. Presque symboliquement, cette île avait accueilli Napoléon 1er lors de son exil. Dommage pour les migrants : ils auraient pu faire du tourisme pendant leur temps libre !

Le Parti travailliste aurait quant à lui jugé le projet "inhumain, totalement irréalisable et extrêmement coûteux". Alors, heureusement pour les demandeurs d’asile et l’humanité : le projet coûte trop cher et le Royaume-Uni traverse une crise économique. Merci le Covid-19 et le Brexit pour avoir sauvé la dignité humaine.

 

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