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PORTRAIT - Bénédicte Paviot : deux cultures, un visage

Écrit par Lepetitjournal Londres
Publié le 7 août 2012, mis à jour le 5 janvier 2018

 

Elle est probablement l'un des visages les plus connus des Français de Londres. Bénédicte Paviot, la correspondante de France 24, rythme le quotidien des téléspectateurs de la chaîne française d'information en continu. De mère britannique et de père français, elle est à elle seule un exemple de biculturalisme réussi et assumé

(Crédits: Simon Gleize)

Dans sa vie de tous les jours comme dans sa façon d'appréhender son métier de journaliste, Bénédicte Paviot n'est jamais l'un ou l'autre, jamais l'un sans l'autre. La France et la Grande-Bretagne forment un tout pour celle qui recevait en septembre le titre de "Personnalité française la plus influente de Londres", dans la catégorie médias.

Vive la différence

"Je suis un mélange un peu spécial. J'espère avoir gardé les qualités de mes qualités", dit la journaliste, intimidée par le fait de devoir, pour une fois, parler d'elle. Née à Paris d'un père français metteur en scène et d'une mère britannique journaliste, elle hérite immédiatement des deux cultures. Très vite, la famille s'installe à Londres où Bénédicte fréquente le Lycée français Charles de Gaulle.  Une période dont elle garde un souvenir extraordinaire: "C'était un vrai cadeau. Mon quotidien c'était des amis français, britanniques mais aussi italiens ou encore libanais avec qui on partageait toutes nos différences. On découvrait la nourriture et les habitudes de chacun. C'était un bain culturel merveilleux qui a changé ma vie".

Dès son plus jeune âge, Bénédicte Paviot se passionne pour la poésie, dévore les livres et fait preuve d'une grande curiosité. Il faut dire qu'en raison des professions exercées par ses parents, il était difficile d'imaginer une enfance autre. "J'ai su très tôt que mon métier consisterait à communiquer par l'image, l'écrit ou la parole", se souvient Bénédicte. Effectivement, dès l'âge de 16 ans, (tout en suivant des cours au Lyçée) elle commence à travailler pour la BBC. Dans cette radio qui constitue selon elle "la meilleure école pour apprendre le métier", elle retrouve les valeurs que lui a transmises sa mère : "une éthique du travail, une grande rigueur et la recherche de la vérité". "Même si la vérité des uns n'est pas celle des autres, j'aime donner sa chance à celle de chacun. Ce qui compte c'est l'histoire de chacun, avec un grand ou un petit H", explique-t-elle.

Une "globe-trotteuse"

Son baccalauréat en poche, elle retourne à Paris, une ville qu'elle adore: "C'est là où je suis née. Je regrette de ne pas y aller plus souvent. Être entourée d'une telle beauté et de tant d'Histoire?" Elle termine une licence de LEA (Langues étrangères appliquées) à la Sorbonne mais sait déjà qu'elle veut devenir journaliste. Suivant son instinct, elle décide d'aller voir ailleurs. Direction les États-Unis. "J'ai eu envie de comprendre la culture américaine de l'intérieur. J'aime aller à la source d'une culture, d'une histoire. C'était une expérience extraordinaire à vivre. Même si beaucoup de gens sont critiques de la culture américaine, il faut vraiment essayer de la comprendre", témoigne celle qui en a profité pour voyager dans tout le pays. Elle restera six ans à New York où elle réalise des interviews culturelles. Une ville forcément passionnante pour une femme qui aime être au coeur des choses, à la source de l'information. "Ces années m'ont appris beaucoup de choses, professionnellement et personnellement... Comme dit la chanson sur New York, "If I can make it there, I'll make it anywhere".

Finalement, ses racines européennes lui manquent trop et Bénédicte rentre à Londres. Elle postule à la BBC et est rapidement embauchée à plein temps. Elle travaille dix ans au service français de la radio britannique et ses employeurs se rendent rapidement compte qu'elle est totalement bilingue et biculturelle. La jeune femme reçoit de plus en plus d'appels de tous les services de la BBC, est interviewée sur des grands événements en France, participe à quelques reportages pour BBC World, diffuse vers l'Europe et vers l'Afrique? "Un journaliste qui n'a qu'une langue et qu'une culture, quand il part en poste à l'étranger, le danger c'est qu'il projette sur le pays dans lequel il est ses habitudes culturelles, ses réflexes culturels et qu'il juge tout en fonction de son éducation", explique Bénédicte. Le plus grand cadeau que mes parents m'aient fait c'est justement d'avoir ces deux cultures et de comprendre que s'il y a de telles différences entre la France et le Royaume-Uni, c'est aussi vrai pour toutes les autres cultures. Cela m'a donné un respect profond pour la découverte de l'autre. J'essaie d'être à l'écoute et de ne pas considérer les choses uniquement par le bout de la lorgnette."

Le Londres de Bénédicte Paviot :

"Je suis une vraie Londonienne. J'aime les nombreux parcs que comptent cette ville. Ce sont ses véritables poumons au sens propre mais aussi spirituel. Ils aèrent l'esprit. J'apprécie énormément les musées même si je n'y vais pas assez et puis bien sûr le théâtre et le cinéma. J'aime la grande variété de restaurants étrangers: indiens, chinois, grecs, italiens? J'adore aussi les Londoniens, leur côté excentrique qui les rend vivants. Le Royaume-Uni est pour moi un mélange de tradition et de rébellion. J'adore le slogan "Keep calm and carry on". J'essaie de l'appliquer dans ma vie de tous les jours".

Un souvenir marquant:

"J'ai couvert la mort de la Princesse Diana. J'ai contribué à diffuser la nouvelle dans le monde entier sur la chaîne BBC World et le Service français du BBC World Service. C'est un moment qui a changé le Royaume-Uni. C'était impressionnant à vivre, la nuit de l'accident comme le jour de l'enterrement."
?Et lorsque j'ai couvert en direct l'ouverture du Tunnel sous la Manche et l'inauguration de l'Eurostar. Ce lien révolutionnaire entre mes deux pays.
?

Propos recueillis par Simon Gleize (www.lepetitjournal.com/londres)

Le goût des autres

Une curiosité pour les autres qu'elle applique au quotidien. Elle n'hésite pas par exemple à s'interrompre au milieu d'une phrase pour écouter ce que raconte un passant. "C'est la meilleure façon de faire son métier et de vivre sa vie. Il faut permettre ce genre d'interruptions parce que même si je ne connais pas cet homme, il dit quelque chose d'intéressant et on ne sait jamais quand cette information pourra être utile", explique-t-elle. Une approche du métier de journaliste qu'elle défend, surtout dans cette période de crise: "Plutôt que de créer des barrières avec les gens, il faut amener cette humanité dans notre travail. Notre métier suscite beaucoup de méfiance, ce qui est normal puisqu'il y a eu pas mal de trahisons de la part des médias. Il faut donc encourager et montrer que l'on s'intéresse, que l'on veut écouter, voir, comprendre et partager tout cela à l'antenne".

Après avoir présenté pendant deux ans l'émission "Global" sur BBC Radio Five Live entre 1998 et 2000, elle devient correspondante à Londres pour BFM Radio et rapidement aussi pour la chaîne de télévision du même groupe. Puis France 24 la contacte. Pendant quelques mois, elle travaille pour les deux chaînes puis est embauchée à plein temps par cette dernière. Depuis cinq ans, elle relève le défi de travailler pour la chaîne en continu dans les deux langues, passant d'un direct en anglais à un autre en français avec deux minutes d'intervalle maximum. Passionnée par son métier, elle s'interroge aussi en permanence sur son évolution: "Le monde s'accélère. La rapidité de l'information, la multiplicité des sources, les réseaux sociaux posent un nouveau défi à relever. La remise en question des relations entre les politiques, les médias, la police et les groupes de pression en fait aussi partie. Il y a beaucoup de points d'interrogation et c'est passionnant d'essayer d'y répondre".

Bénédicte travaille aussi comme animatrice de conférences internationales, notamment pour l'Union européenne. Elle anime des conférences en français et en anglais sur la crise financière, la mondialisation, la coopération transnationale, la santé et l'environnement.

L'envie de faire changer les choses

La journaliste reconnaît volontiers que France 24 est faite pour elle. "Si j'avais voulu créer une plate-forme me permettant de profiter pleinement de mes deux cultures, je n'aurais pas imaginé mieux", dit Bénédicte Paviot, qui se verrait bien avec son propre programme d'interviews avec des leaders mondiaux. "La vie est courte et je trouve qu'il y en a beaucoup à qui on ne pose pas de vraies questions.  Avec ma connaissance de la France, de la Grande-Bretagne et des États-Unis, j'ai envie de les poser. On donne trop l'occasion à ces dirigeants de faire de longues réponses qui n'apportent rien, simplement parce qu'ils comptent sur le fait que les journalistes n'ont pas été bien briefés ou ne sont pas assez courageux". Celle qui dit avoir gardé "un côté français instinctif et passionnel" l'affirme: si cela peut faire un peu de bien, elle est prête "à déranger".

Simon Gleize (www.lepetitjournal.com/londres) lundi 16 janvier 2012

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