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Déballage de l’Arc de Triomphe : qu’en ont pensé les Britanniques ?

L'Arc de Triomphe, WrappedL'Arc de Triomphe, Wrapped
Écrit par Judith Chouzenoux
Publié le 4 octobre 2021, mis à jour le 5 octobre 2021

C’est le jour du grand déballage pour l’Arc de Triomphe empaqueté par Christo. L’ultime projet posthume de l’artiste a pris fin ce dimanche. L’occasion pour nous de faire un point sur ce qu’en ont pensé nos amis British.

 

L’incompréhension : tel est le sentiment qui a remué les touristes les moins avertis à l’art contemporain. Certains visiteurs, qui n’étaient pas au courant de l’opération, ont même douté du caractère fini de l'œuvre, pensant que quelque chose se tramait sous l’immense drap. Le site anglais Artview a rapporté que des curieux avaient comparé l’élégante et imposante silhouette du monument à celle d'un éléphant vêtu d’un tissu gris. Une œuvre que le site a par ailleurs critiquée en déclarant qu’il y avait quelque chose de « futile dans la dépense d'énergie incarnée dans ce gros bloc rectangulaire brillant, ce chocolat niché dans cette boîte hors de prix qu'est devenu Paris ».

 

Une attaque sévère que Geneviève, étudiante aux Beaux-Arts et surveillante de l'œuvre, comprend cependant. Dans un entretien accordé à Artview, elle a expliqué qu’environ un quart des personnes qui viennent voir l'œuvre « sont opposées à l’emballage », mais que « tout le monde est curieux et a quelque chose à dire à ce sujet »

 

De fait, si l’Arc de Triomphe empaqueté de Christo n’a pas su trouver son public chez les critiques de la revue artistique, Ben Luke, de l’Evening Standard, a, lui, été conquis. Dans son récit contant sa rencontre avec l'œuvre, il s’est dit absolument fasciné par son « étrangeté, sa puissance irrationnelle et radicale ». Pour lui, le fait que le dernier projet du couple Christo prenne place à Paris est un symbole très fort et apparaît comme une évidence. Les amoureux s’y étaient rencontrés en 1958 et y ont donné naissance à leur fils Cyril en 1960, avant de s’y marier deux ans plus tard. Le critique a expliqué avoir eu l’impression d’assister à un événement culturel majeur et a rappelé, à juste titre, que cette œuvre sera à jamais la toute dernière du défunt et regretté Christo.

 

 

Wilson Tarbox, critique pour le site Frieze, a pour sa part retenu l’aspect « à la fois joyeux et terrifiant du monument » . Selon lui, l’Arc se présente comme « un fantôme de lui-même, reconnaissable seulement en silhouette », mais dont le spectre imposant conserve une « élégance fulgurante ». Tarbox a souligné l’effort qui a été fait pour adoucir la rugosité de l’Arc par rapport aux œuvres précédentes et le rendre, selon les mots de Christo lui-même, "sensuel" plutôt que repoussant. Il remarque pourtant que « la morbidité des premières œuvres persiste dans la version finale ». Pour lui, cela est dû, en partie, à la peinture argentée qui recouvre les draperies extérieures et qui est conçue pour s'user au cours de l'installation, révélant progressivement le dessous bleu. Le manque d’esthétique est alors rattrapé par le concept, mettant l’emphase sur le caractère éphémère de toute l'entreprise. Destinée à se décomposer en temps réel, le critique de Frieze a caractérisé l'œuvre de véritable memento mori de l'ère moderne.

 

Contributeur pour le site Artlyst, James Payne a pour sa part livré un retour très enthousiaste de sa rencontre avec l'œuvre de Christo. Sur la place de l’Etoile, l’amateur d’art a rencontré une foule bourdonnante d’excitation à l’image de celle à l’entrée d’un concert de pop. James Payne a salué cette initiative gratuite dans une ville où tous les musées sont payants, et où les parisiens, pour qui l’Arc de Triomphe s’est parfois fondu dans le décor, font à nouveau sa rencontre. Le critique confère à l'œuvre le pouvoir de répandre une certaine « excitation dans nos vies » et de nous « (submerger) de stupéfaction et de confusion. »

 

Adorée ou détestée, l'installation de Christo et Jeanne-Claude se veut porteuse d’un message fort : la vie est courte, la beauté est éphémère, et tout a une fin.