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PROCÈS MONFLANQUIN – L’épisode britannique de la famille Védrines

Écrit par Lepetitjournal Londres
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 21 novembre 2012

 

Depuis le 24 septembre se tient à Bordeaux le procès de Thierry Tilly, accusé d'avoir manipulé de 2001 à 2009 onze membres d'une famille d'aristocrates bordelais. Retranchés jusqu'en 2008 dans leur manoir de Monflanquin, les Védrines ont ensuite passé près de deux ans à Oxford. Récit de la dernière étape de leur calvaire

(Leg : Ghislaine de Védrines avec ses avocats lors du procès à Bordeaux) (Crédit : AFP)

En posant le pied en Angleterre en 2008, les Védrines ont déjà tout perdu. Ou presque. Recluse dans son château de Monflanquin (Lot-et-Garonne) depuis 2001, sous l'emprise mentale de Thierry Tilly, un manipulateur qui s'est introduit dans la vie du clan suite à sa rencontre avec Ghislaine de Védrines en 1999, la famille a cédé tous ses biens à l'escroc. Les comptes bancaires des Védrines sont vides et leurs appartements d'Arcachon et Bordeaux ont été vendus. Bilan du préjudice, entre 4 et 5 millions d'euros selon la justice. Et les "reclus de Montflanquin", qui vivent dans la terreur d'un complot ourdi contre eux par la franc-maçonnerie selon la thèse de Thierry Tilly, qui se fait lui-même passer pour un agent secret de l'OTAN, ont rompu avec leur vie professionnelle et leurs proches.

Pourtant, à leur arrivée au Royaume-Uni, la descente aux enfers des Védrines n'est pas terminée. En février 2008, huit membres de la famille, de 24 à 96 ans, s'envolent pour Oxford. Ils rejoignent leur "gourou", installé là-bas et qui conversait avec eux principalement par e-mail et téléphone depuis 2001.

Charles-Henri Védrines, un gynécologue qui était candidat non-éligible sur la liste d'Alain Juppé aux municipales de 1995, symbolise le destin brisé de la famille. D'un poste de médecin en Gironde, il devient jardinier à Oxford. Pour nourrir la famille. D'autres membres du clan enchaînent également les petits boulots. Ils sont ainsi plusieurs à travailler régulièrement au Burger King du coin. Mais là encore, les Védrines obéissent aveuglement aux ordres de Thierry Tilly. Ils lui reversent 90% de leur salaire le jour de la paie. Celui-ci réussit même à ponctionner encore un peu des 10% restants en leur présentant la facture de courses qu'il leur demande de faire pour lui.

Des repas faits d'eau et de sucre

Dans leur maison d'Oxford, les huit membres de la famille, toujours enfermés dans leur paranoïa d'un complot mortel à leur encontre, vivent dans un isolement total. Tilly maintient la pression. Interdiction de sortir sans son accord. Leur quotidien est réduit à la misère.

Au micro de France Télévision, Ghislaine de Védrines confie : "On a appris qu'avec de l'eau et du sucre on mangeait très bien". Même discours dans la bouche de Diane, la plus jeune du groupe, qui lâche à la barre : "je sais qu'on peut manger un yaourt jusqu'à un mois après qu'il soit périmé." Seule à être scolarisée, elle embarquait un fruit par jour de la cantine pour que ses frères et s?urs puissent en manger au moins un par semaine.

Plus grave encore, Christine de Védrines, femme de Charles-Henri et belle-s?ur de Ghislaine, subit des violences physiques de Thierry Tilly, mais aussi de la part de d'autres membres de la famille qu'il a monté contre elle. Elle est attachée sur un tabouret, maltraitée, empêchée de dormir plusieurs jours d'affilés puis assommée de médicaments, selon Le Monde. C'est par elle que se dénouera l'histoire.

Une opération d'exfiltration quasi-commando

En mars 2009, Christine de Védrines réussit à s'enfuir "grâce à l'aide de son patron, un traiteur français installé à Oxford", écrit Libération. C'est sa plainte qui permet au juge bordelais de lancer un mandat d'arrêt européen contre Tilly. Ce dernier est interpellé en octobre de la même année à Zurich en Suisse, au cours d'un de ses nombreux passages pour déposer de l'argent sur les comptes de la Blue Light Foundation, une pseudo association humanitaire québécoise dont les deux représentants ont été interpellés quelques mois plus tard.

Pourtant, même après l'interpellation de leur "gourou", le clan reste enfermé dans sa maison d'Oxford, persuadé que l'arrestation est le fait de ceux qui les menacent. Une opération d'exfiltration menée en décembre 2009 avec l'aide d'un psychanalyste et d'un criminologue, leur permettra de retrouver leur liberté. Les Védrines, qui vivent désormais dans une barre HLM à Bordeaux, espèrent aujourd'hui regagner leur dignité lors du procès de Thierry Tilly.

Camille Belsoeur (www.lepetitjournal.com/londres) jeudi 4 octobre 2012

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Publié le 4 octobre 2012, mis à jour le 21 novembre 2012
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