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L'UNIFORME SCOLAIRE – Une tradition discutée par les Français

Écrit par Lepetitjournal Londres
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 14 novembre 2012

L'uniforme scolaire constitue un vieux débat. "Beaucoup d'encre pour un peu de tissus" dira t-on; cependant il reflète l'un des traits caractéristiques de la culture britannique auquel les expats et leurs enfants doivent s'adapter lors de leur arrivée à Londres

[crédits photo: Justine Martin]

Faire accepter l'uniforme scolaire aux familles françaises qui débarquent à Londres peut paraître chose peu aisée. En effet, l'uniforme est associé en France aux écoles privées et religieuses ; par conséquent restrictives en matière de liberté et d'épanouissement personnel. Cependant, la Grande-Bretagne est porteuse de valeurs différentes que sa voisine et qui ne s'expriment pas de la même manière dans les institutions. Ainsi, à travers des points de vue distincts, on se rend compte que l'uniforme ou l'absence d'uniforme sont deux tentatives différentes pour obtenir la même chose : le respect des élèves vis-à-vis de l'école et vis-à-vis d'eux-mêmes. Par ailleurs, le débat est souvent troublé par des questions sociales qui sont liées à l'acceptation d'un vêtement commun pour tous. En effet, le port de l'uniforme ne gomme pas toujours les différences de milieu social. Quelle fonction conserve t-il alors ?

La première réaction: le rejet
Certaines mamans ont eu l'habitude dans leur enfance de porter une simple blouse scolaire à l'école. Mais la France reste actuellement hostile au port d'un vêtement commun pour ses élèves. Ainsi, la première réaction des parents français qui placent leurs enfants dans des établissements anglais est négative. Véronique et Sandrine révèlent qu'elles se sont posées beaucoup de questions quant au port de l'uniforme. Véronique, l'a même jugé au début "ridicule et inutile". Cette réaction est souvent renforcée par la famille et les amis restés en France.

Un vêtement pratique qui construit un état d'esprit scolaire ?


Sandrine, maman d'une petite fille inscrite en maternelle confie que l'uniforme constitue un investissement à long terme puisque l'enfant le portera toute l'année. Il est peu coûteux dans les écoles publiques et reste très pratique car le budget des habits portés en dehors des classes s'allège considérablement. De même, Véronique, maman d'Elliott inscrit en CP, rappelle que la garde-robe de son fils s'est réduite et que les parents n'ont plus à se poser la question de ce que leurs enfants vont devoir porter le lendemain, l'armoire étant pleine de chemises et de pantalons/jupes similaires. Ainsi, si l'uniforme constitue une part importante du budget, il s'avère être moins coûteux que d'autre vêtements de marque ? lorsque les écoles laissent libre le choix du magasin. Les écoles imposent parfois l'achat de l'uniforme dans certains magasins, notamment pour les vêtements où sont cousus les logos de l'école. Cependant, le reste est libre. Véronique a donc préféré Mark et Spencer qui offrent des vêtements de bonne qualité à un faible coût. Elle remarque que le petit pantalon gris s'use moins.
L'uniforme n'est toutefois pas un déguisement. Si il ne revêt pas de caractère rébarbatif pour certains, il reste un vêtement scolaire qui permet à certains de se mettre dans l'état d'esprit de l'écolier. A l'école, il constitue un processus d'intégration. Sandrine se souvient des  "meetings" organisés par l'école pour montrer les nouveaux sacs et les dernières acquisitions.

L'uniforme comme un frein au développement personnel de l'élève?
La période du collège et particulièrement les classes de 4e et de 3e constituent des années charnières pour les élèves dans leur relation avec les parents, les professeurs et plus généralement avec les formes d'autorité. Selon Carine Rosier, conseillère principale d'éducation pour les 6e du Lycée Français, l'absence d'uniforme leur laisserait la possibilité de "trouver qui ils ont envie d'être". Cependant, l'appât des marques accentué par les nombreuses publicités reste un problème. Pour la CPE, il s'agit d'un travail pour les parents et les éducateurs. Pourtant, bien souvent, la mode est une affaire qui ne concerne pas les adultes.

La parole aux enfants
Si les petits français - et surtout les petites françaises - ont parfois du mal à accepter de porter l'uniforme, comme le rappelle Sandrine dont la  fille était habituée au rose et au violet, d'autres en sont très contents. Elliott rentrait en dernière section de maternelle dans un établissement anglais et il était très content de porter une cravate (un noeud  de cravate avec un élastique) pour "faire comme papa"?. "?Il était très fier et nous avons même pris des photos"? souligne Véronique. Cependant, l'acceptation de l'uniforme de la part des enfants en bas âge se modifie parfois de la même manière que la volonté d' "être comme papa" disparait à mesure que l'on grandit. Quoiqu'il en soit, le rejet de la part des élèves reste relatif car toute jeune personne prend ses marques par rapport à ses amis. Ainsi, lorsque tout le monde est habillé de la même manière, peu nombreux sont ceux qui voudraient sortir du rang.

[image: Violette de Lataillade]

L'uniforme n'empêche pas la formation de groupes distincts
L'uniforme peut entraîner indirectement des discriminations entre les écoliers. En effet, pour équiper un enfant pour toute l'année, le budget s'élève à 580 livres. De plus, Laetitia, dont les deux filles sont scolarisées, souligne qu'une seule entreprise fournit les vêtements exigés par l'école. Ceux-ci étant d'un "très mauvais rapport qualité/prix". A Londres, chaque école possède son propre uniforme qui s'achète dans un magasin spécialisé. L'habit reflète l'appartenance à un établissement, ce qui conduit les élèves à se reconnaître ou à se mépriser mais dans tous les cas à se différencier. En effet, Laetitia souligne l'aspect positif de cette identité en expliquant que les enfant "se reconnaissent et se disent bonjour même s'ils ne sont pas dans la même classe". D'un autre côté, Carine Rosier évoque le souvenir d'avoir aperçu des jeunes ayant des mots entre eux. Il constitue donc un facteur de distinction, de rivalité et de repérage au-delà des barrières scolaires. Elle souligne donc que "l'ensemble le plus souvent bleu marine pour les écoliers londoniens n'uniformise pas tant que ça". Sandrine souligne que les différences d'uniforme se remarquent dans la rue et au parc. Ainsi, si les élèves passent outre ces distinctions, en revanche les parents les notent. La couleur, les insignes et parfois la qualité qui diffèrent révèlent les milieux sociaux des familles. Véronique remarque que les enfants entre eux ? jusqu'à un certain âge ? ne remarquent pas non plus ces différences. Ce sont donc les parents. Ce propos peut toutefois être nuancé. L'uniforme uniformise au sein de l'école, car même si certains viennent de Tesco et d'autres de Harrods, on retrouve les mêmes couleurs et les élèves ne se formalisent pas des différences de surpiqure.

Un charme qui devient routine: l'adaptation à la culture britannique
Au début, le petit Elliott tellement enthousiaste réponds maintenant à sa mère qui lui demande si il aime porter l'uniforme ?ouais, bof ?. Le vêtement entre donc dans une routine. Il est accepté tout simplement. C'est un élément qui reflète la culture britannique, tout comme l'autorisation à l'école des signes religieux tels que le voile. Ainsi, Véronique souligne qu'il ne démontre pas une certaine rigidité de la culture britannique, la maîtresse de sa fille inscrite en maternelle portait un tchador, ce qui révèle davantage de laxisme sur la liberté religieuse, contrairement à la France.

Justine Martin (www.lepetitjournal.com/londres) mercredi 13 octobre 2010

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Publié le 13 octobre 2010, mis à jour le 14 novembre 2012
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