Dans un documentaire diffusé ce lundi 12 mai, la BBC dévoile les témoignages d’une trentaine de vétérans britanniques dénonçant de graves exactions commises par les forces spéciales en Irak et en Afghanistan. Exécutions sommaires, bavures dissimulées, culture de l’impunité : des crimes de guerre présumés qui ébranlent l’armée britannique.


Dans un documentaire inédit de la BBC publié ce lundi 12 mai, environ trente personnes ayant servi aux côtés ou au sein des membres des forces spéciales britanniques ont dénoncé des crimes de guerre présumés lors de leur déploiement en Irak et en Afghanistan.
Le déploiement des forces spéciales britanniques
Dans les années 2000, les forces spéciales britanniques ont été déployées en Irak et en Afghanistan aux côtés des troupes régulières et de la coalition menée par les États-Unis, pour lutter contre les talibans et al-Qaïda. Ces interventions se sont soldées par la mort de 457 soldats britanniques, des milliers de blessés, et plus de 300.000 civils tués. Aujourd'hui, l’ombre de graves exactions plane sur ces opérations.
Les témoignages accablants de vétérans
Au micro de la BBC, une trentaine d’anciens militaires sortent du silence : des membres des forces spéciales britanniques auraient assassiné des civils non armés, y compris des détenus menottés, des blessés laissés sans défense et même des enfants.
“Ils ont passé les menottes à un jeune garçon et ils l’ont abattu. Un enfant, loin d’être en âge de combattre. C’est injustifiable. Et c’est arrivé plusieurs fois”, témoigne un vétéran ayant combattu en Afghanistan.
Selon d’autres récits, tuer des prisonniers était “devenu une routine”. Les soldats “fouillaient quelqu’un, le menottaient, puis lui tiraient dessus”, avant de “placer un pistolet” à côté du corps pour simuler une légitime défense.
Un autre vétéran décrit une spirale de violence incontrôlée : “J’ai vu les gars les plus calmes changer, montrer de sérieux traits psychopathiques [...] Ils étaient sans loi. Ils se sentaient intouchables.” Tuer pouvait devenir “une chose addictive”, certains membres du régiment étaient “enivrés par ce sentiment”.
Les témoignages évoquent également des pratiques macabres : certains escadrons tenaient des “kill counts” (décomptes des personnes tuées) et entraient dans une forme de compétition. Une vidéo obtenue par la BBC montre même un groupe de soldats qui récapitule le nombre de personnes capturées et tuées au cours de leur mission, à la manière d’un jeu vidéo.
Ex-UK Special Forces break silence on 'war crimes' by colleagues https://t.co/MTghwyWuiT
— BBC News (UK) (@BBCNews) May 12, 2025
Le silence du ministère britannique de la Défense
Contacté par la BBC, le ministère britannique de la Défense affirme être “pleinement engagé” à soutenir une enquête publique sur les crimes de guerre présumés et invite les vétérans disposant d’informations à se manifester. En revanche, il a estimé qu’il “n’était pas approprié pour le ministère de la Défense de commenter des allégations”.
Un système de dissimulation généralisé de ces exactions ?
Le documentaire va également plus loin, il met en lumière un système de dissimulation au sein de la chaîne de commandement. “Les commandants supérieurs étaient au courant” affirme un témoin. “Tout le monde savait. Il y avait une approbation implicite de ce qui se passait.”
Une analyste en charge de la vidéosurveillance raconte : “Ils pensaient avoir retrouvé le véhicule ciblé. Mais nous avions des doutes. Ils ont quand même attaqué et tué une famille entière. Le rapport qui a suivi est un tissu de mensonges et les détails ont été modifiés. À moi, on m’a dit de la boucler”.
“Ils pensaient avoir retrouvé le véhicule ciblé. Mais nous avions des doutes. Ils ont quand même attaqué et tué une famille entière. Le rapport qui a suivi est un tissu de mensonges et les détails ont été modifiés. À moi, on m’a dit de la boucler”.
David Cameron directement informé ?
Le documentaire avance que David Cameron, Premier ministre britannique à la fin du déploiement, aurait été directement alerté à plusieurs reprises de ces exactions durant son mandat. Selon la BBC, le président afghan de l’époque, Hamid Karzaï, l’aurait informé personnellement que des civils et des enfants étaient régulièrement tués lors d’opérations menées par les forces spéciales britanniques.
Sur le même sujet
