

Comment tomber amoureux? sans tomber, c'est une question que se pose Susie Morgenstern, auteur jeunesse, dans son dernier livre qui sort aujourd'hui. Née aux Etats-Unis et arrivée en France par amour, elle raconte les tribulations de ses personnages d'une manière juste et touchante. Rencontre.
(source photo: site officiel de Susie Morgenstern)
"L'amour ça sert à quoi ?"
Quand elle décroche son téléphone, Susie Morgenstern transmet sa bonne humeur. Et ce n'est pas la sortie de son livre qui semble la mettre dans cet état : "C'est jamais un grand tralala, mais je suis très intriguée à propos de celui là. On ne sait jamais si ça marchera ou pas". A l'image de ses histoires, elle respire l'espoir et la gentillesse. Et l'espoir, Annabelle, l'héroïne de "Comment tomber amoureux? sans tomber" en a bien besoin, à l'approche du baccalauréat. Le lecteur suit donc les aventures de cette adolescente allergique à l'amour, mais aussi de sa mère et sa grand-mère, toutes deux bien décidées à faire passer leurs intérêts propres avant les hommes. Jusqu'à ce que l'amour leur pende littéralement au nez. S'en suit cette question, qui donne son titre à l'ouvrage : "peut-on être amoureux sans tomber ?". "Le choix de l'amour était évident", confie Susie, qui s'attaque toujours à ce thème particulier, car c'est tout ce qui l'intéresse. "Cela fait 25 ans que je veux faire un livre qui porte ce nom. Et puis quand ma petite-fille était en terminale, j'ai commencé à écrire, elle était mon modèle. J'étais dans un état de bonheur à écrire ce titre".
Un livre (presque) autobiographique
Susie, comme Annabelle, recherche donc la réponse à cette question. "J'aime écrire des livres sur les questions que je me pose". Au début, elle pensait connaître la réponse, c'était d'ailleurs la fin qu'elle prévoyait pour ses personnages. Et puis, se laissant emporter par l'écriture, les sentiments, la tourmente de ses protagonistes, elle corrige, supprime, puis réécrit. Jusqu'à avoir une réponse, si tant est qu'il en existe une. Et pour trouver cette "solution miracle", elle s'inspire de ce qui l'entoure : sa famille principalement, ses filles à l'époque, mais aussi ses petits enfants aujourd'hui. "Je suis un écrivain de ma vie à moi", dit-elle simplement. C'est d'autant plus vrai pour ce dernier ouvrage. "Comment tomber amoureux? sans tomber est spécial pour moi", avoue t-elle. Car au détour des questions, on se rend rapidement compte (et elle l'admet plus tard) qu'il s'agit presque d'une autobiographie. Comme Samuel, le fils de l'ambassadeur américain à Paris, elle a quitté son Amérique natale pour s'installer en France, sans parler un mot de français. Comme Léonard, le père délaissé, ses racines juives jouent un rôle important dans son parcours amoureux. Et, comme Marguerite, l'ambitieuse grand mère, elle reconnaît ne pas espérer la même chose de l'amour que lorsqu'elle avait vingt ans. Son histoire et ses émotions sont la source d'inspiration principale de cet ouvrage, ce qui le rend d'autant plus personnel.

Comme certains de ses lecteurs, elle a donc posé ses bagages dans un pays dont elle ne connaissait ni la langue, ni les coutumes, par amour. Elle s'est inscrite à l'université, a passé son diplôme, sa maitrise, puis son doctorat, en anglais. Mais c'est en français qu'elle a écrit l'ensemble de ses livres, sans même s'en rendre compte. "Un jour j'ai écrit. Je pensais avoir écrit en anglais? et le lendemain, j'ai réalisé qu'il s'agissait du français". Une situation qu'elle ne s'explique pas vraiment, même si elle pense que cela vient de son entourage : ses filles, par exemple, s'exprimaient entièrement en français. Quand on veut dépeindre ce qui nous entoure, il faut aussi le faire dans la langue qui nous entoure. Cela fait donc 47 ans qu'elle vit en France, qu'elle est française. Et ce, malgré le petit accent que l'on perçoit au détour d'une conversation. "Je n'ai jamais vraiment fait d'effort là dessus". Elle raconte même des anecdotes sur le sujet : "L'année dernière, j'ai reçu le prix de la ville de Nice [où elle habite]. Le maire m'a dit : on donne même le prix à des étrangers. J'ai sorti ma carte d'identité, et ai répondu : je suis française, et je vote". En plus du prix de la ville de Nice, elle a notamment reçu le titre de Chevalier des Arts et des Lettres. Une récompense bien méritée pour cette femme qui transmet tant d'émotions dans une langue qui n'est, à l'origine, pas la sienne.
Susie Morgenstern est donc comme ses personnages : ils apprennent, s'adaptent, et découvrent. La langue, ou l'amour, selon les situations. C'est une auteur jeunesse qui, pourtant, défend la catégorie tout public : "il y a en Angleterre un mouvement qui défend la suppression de la limite d'âge sur les livres, et je suis d'accord avec eux. J'aimerais que mon livre soit tout public". Petit ou grand, chacun se retrouvera dans cette fable sur l'amour. Car ce qu'on apprend avec Annabelle, Lulu et Marguerite, c'est qu'il n'y a pas d'âge pour aimer.
Et la réponse à la question ? Pour le savoir, il faudra attendre la dernière page du livre. Et si vous en voulez davantage, Susie Morgenstern sera à la librairie La Page de South Kensington le 7 juin, à partir de 11 heures. D'ici là, elle est déjà en train d'écrire une nouvelle aventure. Affaire à suivre.
Comment tomber amoureux... sans tomber, Susie Morgenstern, L'Ecole des loisirs, parution le 12 mars 2014.
Cindy Jaury (www.lepetitjournal.com/londres) mercredi 12 mars 2014























