Dès le début du XVIIIº siècle, on connaît cette résidence sous ce nom, car elle est alors la demeure officielle du Garde-chasse principal du royaume. Aujourd´hui les divers édifices abritant le Musée du Costume et le Musée National du Théâtre.
Un peu d´histoire
Dom Pedro José de Noronha de Albuquerque Moniz e Souza, 3º Marquis de Angeja (1716-1788) en devient le propriétaire et premier ministre du gouvernement succédant celui du Marquis de Pombal. Grand homme d'Etat et passionné de science naturelle, il rassemblera une belle collection d'animaux empaillés, un herbier, de nombreux minéraux, fossiles et pièces ethnographiques du Brésil. Au palais du Lumiar, sa résidence de campagne, le Marquis invitera le botaniste italien Domenico Vandelli (1730-1816), le même qui participa à la création du Jardin botanique de Ajuda (1768)et de Coimbra (1772), à la réalisation d'un jardin d'inspiration italienne, dont subsiste encore les larges escaliers qui conduisent aux différents niveaux, le grand lac du Lion et les niches vides autrefois occupées par des statues baroques. L'existence de source et d'eau en quantité permettra d'introduire l'élément liquide dans ce contexte ludique de jardin de palais.
Un lieu riche en espèces depuis le traditionnel potager aux arbres venus d'horizons lointains
Suivant l'image classique des fermes traditionnelles de loisir portugaises, le parc est associé au palais, avec un jardin pourvu de lacs et de cascades, mais aussi plus fonctionnel avec son potager, un verger, une place aux plantes aromatiques et le grand bosquet d'espèces endémiques de la région de Lisbonne.
En 1840, la propriété est rachetée par le 1º Duc de Palmela, Dom Pedro de Souza Holstein (1781-1850). Ce dernier fera appel à un horticulteur suisse, J. Rosenfelder (?-1844), qui travaillait jusque là au Jardin des Plantes de Paris, pour y concevoir un jardin romantique de style anglais. Un autre professionnel suisse, Jacob Weiss (1815-1898), lui aussi recruté à travers le Jardin des Plantes, prendra ensuite la relève. Ce jardinier sera plus tard chargé du Parc Gertrude, future Fondation Gulbenkian. Pendant 30 ans, le jardin de Monteiro-Mor fut sous sa responsabilité et acquis une grande notoriété. De cette époque date la passion de cette demeure pour les Araucarias et leur multiplication afin d'enrichir Lisbonne de ces arbres venus d'horizons lointains.
En 1976, l'État portugais récupère la propriété de la famille Palmela pour y installer le Musée National du Costume, accompagné d'une profonde restructuration du jardin et de la ferme en elle-même. La mise en place d'un système d'irrigation, à partir de 1982, se joint à l'introduction de nombreuses espèces d'arbres et arbustes provenant des réserves de la Mairie de la capitale.
La surface totale de la propriété est d'environ 11 hectares, répartie en plusieurs niveaux différents, avec un jardin à la française constitué de buis, des serres, sans compter les divers édifices abritant le Musée du Costume et le Musée National du Théâtre.
Les Araucarias marquent la visite de ce jardin
L'Araucaria (A. heterophylla), originaire du Chili, qui s'érige au deuxième niveau du jardin est le premier de son genre planté en Europe, en 1842. Il atteint les 40 mètres de hauteur et on peut le distinguer des autres araucarias à sa forme pyramidale. Il porte le nom d'un peuple autochtone de la côte chilienne, les Araucanes, craint par les premiers navigateurs européens pour leur réputation belliqueuse et qui furent totalement exterminés au même titre que les Patagons d'Argentine. Dignes représentants des conifères, les araucarias sont parmi les arbres les plus anciens de la planète, puisque leur présence remonte au début de l'ère secondaire (-200 millions d'années) et qu'ils se trouvaient sur tous les continents. Aujourd'hui ne subsistent que des reliques de ce vaste espace d'occupation, tel au Brésil, en Australie, sur l'île de Norfolk ou celle de Nouvelle-Calédonie. Un autre représentant de ce genre dans le jardin de Monteiro-Mor est l'Araucaria colunaris, ou de Cook, rencontré par ce dernier au cours de son premier passage dans le Pacifique, en 1768, provenant d'Océanie et qu'il est facile de reconnaître par sa forme érigée avec de courtes branches, littéralement collées au tronc, formant une véritable colonne végétale.
Un séquoia imposant
Pour rester avec les conifères, un séquoia (S. sempervirens), juste à côté du restaurant, s'impose avec ses plus de 25 mètres de hauteur, ayant atteint les 12 mètres, en 1877, cette donnée nous permettant d'observer la lenteur de croissance d'un tel arbre qui peut battre des records (112 mètres de haut, en 2006, pour celui qui vit dans le Redwood National Park, en Californie) en vivant plus de trois ou quatre millénaires. Son nom se réfère aussi à un peuple amérindien d'Amérique du Nord, à moins que ce ne soit le souvenir d'un grand chef indien qui résista héroïquement aux colons européens. Son bois est très exploité pour ses qualités multiples, légèreté, résistance au feu, pérennité, ce qui a provoqué une nette diminution de son expansion géographique naturelle. Pour y remédier, il existe cependant de grandes superficies d'exploitation en régime de monoculture.
En poursuivant la visite d´autres espèces d´arbre attirent l´attention du visiteur
Au niveau inférieur, côté droit, on trouvera un sideroxylon (Metrosideros excelsa), originaire de Nouvelle-Zélande, qui par son nom indique qu'il possède un bois aussi dur que le fer, donc très résistant. De feuillage persistant, il apprécie les bords de mer et l'air salin à tel point qu'on le plante de plus en plus sur la côte atlantique portugaise. Pour preuve, le peuple Maori l'appelle "pohutukawa", qui veut dire "éclaboussé par la mer". Sa floraison tombe en décembre dans l'hémisphère Sud et ressemble aux fleurs rouges du callistémone (rince-bouteille), d'où sa vocation à servir d'arbre de Noël par les premiers colons britanniques. Par contre, il fleurira en juin sous nos latitudes. On le reconnaît aussi facilement à la particularité d'avoir des racines rougeâtres aériennes qui pendent à certaines branches. Près de lui, proche des volières, s'érige un gracieux ginkgo (G. biloba), certainement l'arbre le plus ancien qui existe sur la terre avec des fossiles de ses feuilles remontant à plus de 200 millions d'années.
En compagnie de l'araucaria de Norfolk déjà cité, nous avons un bel exemplaire d'hêtre (Fagus sylvatica) ou "faia", en portugais, de feuilles caduques, qui aime les zones montagneuses du sud de l'Europe. Cet arbre peut facilement atteindre les 40 mètres de hauteur et vivre jusqu'à 250 ans, créant des bosquets denses et épais, qui empêchent toute végétation autre de pousser. Ses graines sont très appréciées par les animaux, aussi bien mammifères que volatiles, car elles sont très riches en matière grasse. Son bois est depuis longtemps utilisé en menuiserie, notamment pour la fabrication de chaises.
Deux colosses de la nature, des platanes plantés en 1842, alors qu'ils étaient très à la mode, sont issus de croisement entre des espèces d'Amérique (Platanus.occidentalis) et d'Orient (Platanus.orientalis), hybrides dont les troncs atteignent les 2 mètres de diamètre.
Si on se dirige vers le Musée du Théâtre, on pourra admirer un magnifique figuier d'Australie (Ficus macrophylla) aux racines aériennes impressionnantes, qui lui confère un grand exotisme. D'autant plus qu'un philodendron (Monstera deliciosa) l'a pris pour support afin de grimper vers la lumière. Plus avant, en allant vers le bosquet, on croisera un cyprès du Mexique (Taxodium mucronatum), arbre sacré des civilisations mexicaines, qui connaissaient ses vertus médicinales pour soigner des maladies de peau et qui utilisaient sa résine comme dentifrice.
A la limite du parc, un dragonnier (Dracaena draco), emblématique de toute résidence de valeur dans le Lisbonne du XVIII ºsiècle s'impose, tout comme le bel-ombre (Phytolacca dioica) non loin de là.
Sur la grande surface réservée au bosquet, on trouvera plusieurs espèces endémiques comme le pin parasol (Pinus pinea), le cyprès (Cupressus sempervirens) ou le chêne-liège (Quercus suber), comme des arbuste caractéristiques du sud de l'Europe, représentés ici par le laurier-sauce (Laurus nobilis) ou l'arbousier (Arbutus unedo).
(Reprise du 15 janvier 2016)
Visite guidée en français : Samedi 2 mars 2019 de 10h30 à 12h30
La participation sera de 5 euros par adulte, avec une documentation fournie pour suivre la visite.
Inscriptions : Tel. 914 699 247 - laurins.andre@gmail.com