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La peine de mort est-elle vraiment abolie au Pérou ?

La peine de mort est-elle vraiment abolie au Pérou ?La peine de mort est-elle vraiment abolie au Pérou ?
Mise à mort de Túpac Amaru II à Cusco en 1781.
Écrit par Guillaume FLOR
Publié le 10 octobre 2021, mis à jour le 3 février 2022

Afin de mettre fin aux homicides judiciaires, chaque 10 octobre est organisée la journée mondiale contre la peine de mort, mais qu’en est-il au Pérou ? Est-il possible d'y appliquer la peine capitale ?

Alors que la France célèbre ses 40 ans de l'abolition complète de la peine de mort, intervenue le 18 septembre 1981, avec comme acteur central du débat à l'époque, l’ex-garde des sceaux Robert Badinter, le Pérou ne peut pas en dire autant, même si l'Amérique latine l’a presque intégralement banni dans la pratique. En 2021, 108 pays ont déjà aboli la peine de mort pour tous les crimes, et 144 pays l’ont abolie en droit ou dans la pratique.

Malgré la pandémie de COVID-19, certains pays ont impitoyablement continué de prononcer des condamnations à mort et de procéder à des exécutions, même si le nombre total d’exécutions est le plus bas jamais enregistré depuis 10 ans, pour la troisième année consécutive. Au niveau mondial, au moins 483 personnes ont, à la connaissance d’Amnesty International, été exécutées en 2020 (ce chiffre ne tenant pas compte des pays où les statistiques relatives à la peine de mort sont classées secret d’État ou pour lesquels on ne dispose que d’informations très restreintes : la Chine, la Corée du Nord, la Syrie et le Viêt-Nam).

 

La peine de mort dans le monde en 2020

Les difficultés sans précédent engendrées par la pandémie de COVID-19 n’ont pas suffi à dissuader 18 pays de procéder à des exécutions en 2020, souligne Amnesty International le 21 avril 2021 à l’occasion de la publication de son rapport annuel sur le recours à la peine de mort dans le monde. Alors que la tendance globale en la matière était au recul, certains pays n’ont pas ralenti le rythme des exécutions – l’accélérant même, dans certains cas –, ce qui témoigne d’un mépris terrifiant pour la vie humaine, dans un contexte où le monde cherchait à protéger la population face à un virus mortel.

Figurent au nombre des pays qui ont en 2020 procédé à des exécutions l’Égypte, où le nombre d’exécutions a triplé par rapport à 2019, et la Chine, où la répression annoncée des infractions liées aux mesures de prévention visant à juguler la pandémie de COVID-19 a abouti à la condamnation à mort et à l’exécution d’une personne au moins. Parallèlement à cela, le gouvernement de Donald Trump aux États-Unis a repris les exécutions fédérales après une pause de 17 ans, et a mis à mort 10 hommes en moins de six mois. L’Inde, Oman, le Qatar et Taiwan ont également repris les exécutions en 2020.

La peine de mort est un châtiment abominable, et la poursuite des exécutions en pleine période de pandémie ne fait que souligner davantage encore la cruauté qui lui est inhérente,

a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

 

Les cinq pays procédant au plus grand nombre d’exécutions

Comme en Chine les informations sur le nombre total d’exécutions et de condamnations à mort sont classées secret d’État, il est impossible de surveiller de façon indépendante la situation dans ce domaine. Les statistiques d’Amnesty International relatives à toutes les exécutions qui ont été recensées ne comprennent donc pas les exécutions qui ont eu lieu en Chine. Cependant, on estime que la Chine procède chaque année à plusieurs milliers d’exécutions, ce qui la classe en tête des pays où ont lieu le plus grand nombre d’exécutions, devant l’Iran (246+), l’Égypte (107+), l’Irak (45+) et l’Arabie saoudite (27). L’Iran, l’Égypte, l’Irak et l’Arabie saoudite ont été responsables à eux seuls de 88 % de toutes les exécutions recensées dans le monde en 2020.

Les États-Unis ont été le seul pays des Amériques à avoir procédé à des exécutions en 2020. En réalité, les Etats-Unis et le Japon sont les deux seuls pays démocratiques à continuer d'appliquer cette sanction.

 

La peine de mort existe toujours au Pérou !

La peine de mort a été abolie au Pérou en 1856, mais réintégrée en 1933 dans la législation du pays, pour être finalement abrogée en 1979. La dernière exécution au Pérou a eu lieu le 20 janvier 1979, sous le gouvernement de Francisco Morales Bermúdez. Julio Alfonso Vargas Garayar a été abattu après avoir été accusé d'espionnage en faveur du Chili et de trahison. C’est le dernier condamné à mort du pays.

Mais en réalité, la peine de mort fait toujours partie du système juridique péruvien, elle se trouve à l'article 140 de la Constitution politique du Pérou de 1993 : « Article 140.- La peine de mort ne peut être appliquée que pour le crime de trahison en temps de guerre et de terrorisme, conformément aux lois et traités ratifiés par le Pérou ».

Aujourd'hui, il n'est pas possible au Pérou de punir les meurtres ou les viols de la peine de mort, notamment parce que l'État a ratifié en juillet 1978 un traité international qui l’en empêche. Il s’agit de la Convention américaine des droits de l'homme, également connue sous le nom de Pacte de San José.

Mais tout comme le Brésil et le Chili, le Pérou est donc considéré comme abolitionniste UNIQUEMENT pour les crimes communs. Il maintient la peine de mort pour les crimes graves, comme ceux commis en temps de guerre. Alors que ses autres voisins ont totalement aboli la peine capitale, pour tous les crimes : depuis 1910 pour la Colombie, 1906 pour l’Équateur et 2009 pour la Bolivie.

 

La peine de mort est-elle vraiment abolie au Pérou ?
© Amnesty.org

 

Retrouvez ici l’histoire complète de la peine de mort au Pérou

Le débat a été particulièrement riche et intense sur cette question au Pérou, notamment dans le débat parlementaire qui a eu lieu lors des séances de la Convention nationale des 11 et 12 janvier 1856, lorsque José Gálvez a ardemment défendu que « la société n'avait pas le droit de tuer ».

Bien avant, les peuples préhispaniques n'étaient pas étrangers à l'application de la peine capitale. On sait que chez les Chancas, les Paracas, les Chimúes et, en général, la plupart des cultures qui se sont installées avant l'invasion espagnole, la peine de mort était pratiquée comme punition pour les crimes les plus déplorables. Une fois la vice-royauté établie, les Espagnols transférèrent leur droit pénal castillan sur le nouveau continent. Ont alors été punis par la mort, l'adultère, le viol, la trahison, l'homicide, entre autres délits.

Sans aucun doute, la condamnation à mort la plus notable de l'histoire vice-royale péruvienne est celle de Túpac Amaru II, de son vrai nom José Gabriel Condorcanqui Noguera. Le chef connaissait très bien les malheurs que vivaient les indigènes dans la vice-royauté du Pérou, exploités dans les mines et sans défense contre la corruption et la cupidité de certains fonctionnaires espagnols. Ainsi, le samedi 4 novembre 1780, Túpac Amaru II s'est rebellé, mais il fut très vite trahi et arrêté par les royalistes. Son exécution sur la Plaza de Armas de Cusco a eu lieu le vendredi 18 mai 1781, une date qui est entrée dans l'histoire du Pérou.

 

La peine de mort est-elle vraiment abolie au Pérou ?

 

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