Début mai 1883, à l’aube, le capitaine d’un navire de guerre allemand repère un nuage de cendres qui s’élève au dessus de l’île inhabitée de Krakatoa. A ce moment, il ignore sans doute qu’il est témoin de l’une des toutes premières éruptions documentées scientifiquement depuis au moins deux siècles.
Au cours des deux mois qui vont suivre, de nombreux navires de commerce et de croisières vont être les témoins privilégiés du même spectacle : explosions, nuages de cendre tourbillonnants et éruptions de bombes volcaniques incandescentes. Quelques expéditions scientifiques sont menées par les colons hollandais et la population qui vit sur les côtes du détroit de la Sonde est si impressionnée par ce que l’on raconte qu’elle organise des festivités régulières. Ce n’est malheureusement que bien plus tard que celle-ci comprendra que ces éruptions n’étaient que le prélude à l’une des plus grande catastrophe de l’histoire de l’humanité.
Suite à une série d’explosions, une colossale éruption a lieu le 26 août 1883, qui provoque l’affaissement des deux tiers du nord de l’île, une série de coulées de lave, ainsi que d’immenses tsunamis qui portent leurs macabres vagues vers les côtes toutes proches. Au soir des deux jours qui suivent, on dénombrera plus de 35.000 victimes et la destruction d’environ 200 villes et villages côtiers.
Krakatoa, les jours obscurs du cataclysme
Lors du pinacle du cataclysme, les nuées ardentes atteignent 80 km de hauteur et recouvrent une superficie de plus de 800.000 km2. La région est également plongée dans l’obscurité pendant deux jours et demi. Les cendres dérivent à travers l’éther et provoquent des effets de halo autour de la Lune et du Soleil.
L’une des autres conséquences est la chute des températures dans les mois qui suivent (elles ne reviendront à la normale que 5 ans plus tard).
L’explosion finale produit en outre le son le plus puissant jamais enregistré: elle a été entendue sur plus de 10% de la surface de la Terre !
C’est ainsi que des rapports sur des « tirs lointains » émis en Australie et sur l’île Maurice, situées à plus de 4.500 km du Krakatoa, ont été faits. En quelques heures, ce sont en réalité des ondes de pression qui font plusieurs fois le tour du monde et sensibilisent les instruments de mesures aux Etats-Unis et en Grande Bretagne. Et, lorsque le Krakatoa s’affaisse dans sa chambre magmatique, les dernières explosions propulsent les fragments de roches volcaniques à plus de 20 km à la ronde. L’effondrement d’une grande partie de l’île restante provoque alors une caldeira sous-marine d’environ 6 km de diamètre.
Les scientifiques, plus tard, ont estimé que l’éruption phénoménale du Krakatoa a engendré un flux pyroclastique, qui a presque tout détruit sur son passage. Ces nuées ardentes – comme on les appelle plus communément – contiennent en effet un mélange très dense de blocs de lave, de pierres ponces et de cendres volcaniques, et leurs vitesses, qui peuvent atteindre jusqu’à 80 km/h, ainsi que leurs températures (entre 200 et 700° Celsius) provoquent dès lors la destruction de tout ce qu’elles envahissent.
Plus dévastateurs encore sont les tsunamis qui se sont déversés sur les côtes de Sumatra et de Java. La plus haute vague a été estimée à 41m et la série qui a suivi a détruit plus de 200 villes et villages côtiers. La faune et la flore locales ont été dévastées, nombres d’infrastructures ont été emportées par les flots et, plus de 35.000 personnes ont perdu la vie dans la catastrophe, dont 34.000 doivent leur trépas aux tsunamis !
Après le cataclysme de 1883, l’activité volcanique est restée calme jusqu’au milieu des années 1920, lorsque de nouvelles éruptions ont donné naissance au fils du Krakatoa, « l’Anak Krakatau » en indonésien, au beau milieu de la caldeira sous-marine qui s’était créée à l’époque. La progéniture du Krakatoa connaît alors une croissance rapide et montre une activité continue depuis lors. Il croît de près de 5 mètres par an et chaque éruption fait régulièrement craindre une catastrophe identique à celle de 1883. La dernière en date, le 22 décembre 2018, a d’ailleurs provoqué un tsunami qui a emporté plus de 400 personnes sur son passage, ce malgré que l’Anak Krakatau soit considéré comme un volcan scientifiquement bien observé et étudié.