Alors que la COP29 soulève l’urgence climatique, la Turquie, 4ème exportateur mondial de textile, se démarque. À Gaziantep, RE&UP développe une technologie innovante pour recycler les déchets textiles.
Une industrie textile à fort impact environnemental
La Turquie, acteur clé de l’industrie textile mondiale, est également un contributeur majeur aux défis climatiques. L’industrie textile cause 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, un chiffre alarmant pour un secteur en pleine expansion.
Chaque année, environ 92 millions de tonnes de déchets textiles sont générées dans le monde, selon des études récentes. En Europe seulement, 5.8 millions de tonnes de produits textiles finissent à la poubelle, soit environ 11 kg par personne. Ces textiles, portés 7 à 8 fois en moyenne, posent des défis environnementaux majeurs. La plupart finissent dans des décharges ou des incinérateurs.
Les textiles mélangés, en coton et polyester, sont durs à recycler. Ils contribuent à l'accumulation de déchets. C’est dans ce contexte que l’usine RE&UP, filiale du géant turc Sanko, apporte une réponse innovante.
RE&UP : une technologie unique au monde
À Gaziantep, l’usine RE&UP a mis au point une procédé révolutionnaire pour transformer les déchets textiles en fibres de haute qualité.
“Cette ligne est spécialement configurée pour recycler tout type de déchets textiles”, explique Mahmut Bayram, ingénieur industriel.
Le processus commence par la découpe des textiles pour séparer les fibres. Les parties solides non-textiles sont éliminées, puis les fibres sont humidifiées pour éviter qu’elles ne se brisent. Une étape clé consiste à décolorer les fibres sans produits chimiques, avant de séparer le coton du polyester pour produire un coton “vierge”.
Les bénéfices environnementaux sont notables :
- 85 % de réduction des émissions de CO2 par rapport à la production traditionnelle
- 95 % d’économie d’eau, grâce à un circuit fermé
Cette approche répond à un double défi : traiter les textiles colorés et mélangés tout en préservant la qualité des fibres recyclées.
Un projet soutenu par des investisseurs internationaux
Cette technologie a rapidement attiré l’attention des acteurs internationaux. Proparco, filiale de l’Agence française de développement, a accordé un financement de 70 millions d’euros à l’usine RE&UP pour accélérer sa montée en puissance.
Stéphane Froissardey, directeur de Proparco pour l’Eurasie, souligne : “La demande pour des matières premières durables croît, tant du côté des industriels que des consommateurs. Soutenir une initiative comme RE&UP est essentiel pour rendre la filière textile plus verte.”
Les ambitions sont claires : recycler 200.000 tonnes de déchets textiles par an d’ici 2025 et un million de tonnes en 2030, en construisant une nouvelle usine en Espagne.
Une filière textile à réinventer
L’innovation portée par RE&UP montre qu’un modèle durable pour la fast fashion est possible. En donnant une seconde vie aux textiles usagés, cette usine pose les bases d’une économie circulaire dans un secteur où tout reste à faire.
Pour Özde Demirturk, directrice pour la finance durable chez Sanko, cette avancée ouvre la voie à un avenir plus responsable : “Chaque fibre recyclée est une victoire pour l’environnement et une preuve qu’il est possible de transformer un déchet en ressource.”
Une initiative qui inspire
Bien qu’elle ne représente encore qu’une “goutte d’eau” face aux besoins mondiaux, l’usine RE&UP symbolise un tournant pour l’industrie textile. Avec des objectifs ambitieux et un procédé unique, Gaziantep pourrait devenir un modèle de durabilité pour le secteur.
Cette initiative montre qu’un changement global est possible, une fibre à la fois.