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"Bachi-bouzouk", quel rapport entre l’insulte du Capitaine Haddock et la Turquie ?

Vous étiez de ces enfants qui se délectaient des aventures de Tintin, très certainement l’un des plus grands personnages de bande dessinée - créé en 1929 par le dessinateur prolifique Hergé - si bien que vous arboriez fièrement le titre de  "tintinophile" ? "Bachi-bouzouk", l’insulte préférée du Capitaine Haddock, l’inénarrable acolyte de Tintin - "Tenten" en turc - n’évoque pourtant, selon vous, que le nom d’un pachyderme ? Alors vous n’êtes pas aussi incollable que vous le pensiez ! Pas de panique, lepetitjournal.com d’Istanbul a mené sa propre investigation et vous offre de quoi épater en société !

Le Capitaine Haddock invective deux hommes avec sa fameuse insulte "Bachi-bouzouk"Le Capitaine Haddock invective deux hommes avec sa fameuse insulte "Bachi-bouzouk"
Écrit par Lepetitjournal Istanbul
Publié le 7 février 2022, mis à jour le 9 août 2024

Le Capitaine Haddock n’a pas attendu son "aventurque" à Istanbul, dans Tintin et le Mystère de la Toison d’or (1961), pour parler turc ! À l’origine d’un registre d’injures très dense, le meilleur ami de “Tenten” semblait avoir une préférence pour le fameux “bachi-bouzouk”, juron qui a très vite détrôné d’autres expressions incendiaires hilarantes allant du “Tonnerre de Brest” aux “Mille millions de mille sabords”. 

 

tenten tintin turquie bachi-bouzouk

 

"Bachi-bouzouk" - başıbozuk en turc - signifie littéralement "tête fêlée" ou "tête en panne". Le destinataire d’une telle invective, déjà alarmé par le caractère brutal de sa sonorité, comprend bien qu’il vient d’être traité d’abruti ou de crétin. Si le plus célèbre des capitaines n’a pas inventé la formule, il en a détourné l’utilisation originelle ! Mais d’où provient donc cette étrange diatribe ?

Bachi-bouzouk, quésaco ? 

Dans ses Curiosités esthétiques (1867), Charles Baudelaire écrivait à ce sujet: "voici les bachi-bouzoucks […], avec leurs officiers européens […], dont la physionomie de dandies tranche sur le caractère baroquement oriental de leurs soldats". Les têtes fêlées ont vraiment existé ! Il suffit de remonter le fil de l’Histoire jusqu’à la période ottomane pour retrouver leur trace.

Les bachi-bouzouks étaient de redoutables cavaliers mercenaires ayant servi dans l’armée de l’Empire ottoman. D’origine albanaise, égyptienne ou kurde, ces cavaliers se distinguaient par leur armement non-conventionnel et léger mais également par leur discipline médiocre. Aucune formation militaire ne leur ayant été dispensée, ces derniers ne pouvaient revêtir le même casque que les soldats réguliers de l’armée ottomane, d’où leur surnom başıbozuklar, que l’on pourrait aussi traduire par "les têtes non standardisées".

C’est au cours de la guerre de Crimée, qui a opposé entre 1854 et 1856 l’Empire ottoman et ses alliés franco-britanniques aux troupes russes, que l’expression bachi-bouzouk fait son apparition dans la langue française. Ces corps francs avaient été envoyés comme rempart aux velléités expansionnistes russes par le sultan Abdülmecid Ier. Très virulents, ils furent, au cours de l’Histoire, à l’origine de nombreux pillages et exactions. La répression la plus meurtrière à laquelle ils se sont livrés est celle perpétrée contre les Bulgares en 1876, dont les ambitions panslavistes inquiétaient un Empire ottoman déjà fragile. 

> Pour lire quelques extraits de Tintin en turc, cliquez ici.

Rediffusion

Isma Maaz, 6 février 2015

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Publié le 7 février 2022, mis à jour le 9 août 2024

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