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IL Y A UN AN, LE 5 AOUT – Soljenitsyne passait l’arme à gauche

L'un des plus grands dissidents russes du XXème siècle s'est éteint dans la nuit de dimanche à lundi. Alexandre Soljenitsyne, auteur de L'Archipel du Goulag n'a eu de cesse tout au long de sa vie de lutter contre le régime stalinien. A 89 ans, il laisse derrière lui une ?uvre littéraire de combat

"Il a vécu une vie difficile mais heureuse"a déclaré la femme de Soljenitsyne à l'agence de presse Itar-Tass (photo AFP)

(Rédaction Internationale) - Les mots sont des armes, et l'opposition un danger. Alexandre Soljenitsyne l'avait bien compris.
Dans la nuit de lundi à dimanche, à l'âge de 89 ans, l'un des monuments de la littérature russe a succombé à une crise cardiaque. Soljenitsyne, prix Nobel de littérature en 1970 souffrait depuis quelques années d'une insuffisance cardiaque aiguë. Mais sa lutte contre la maladie n'aura été qu'une lutte de plus dans sa vie, jalonnée par ses affrontements avec le régime stalinien.
Né le 11 décembre 1918 dans le Caucase, il avait pourtant adhéré au départ aux idéaux révolutionnaires communistes. Soldat décoré par Staline durant la Seconde Guerre mondiale, il a été arrêté en 1945, et envoyé huit ans au Goulag. Il avait critiqué dans une lettre à un ami les compétences militaires de "l'homme à la grosse moustache", et son éloignement de l'idéal communiste de Lénine.
Libéré en 1953 à la mort de Staline, il est néanmoins resté en exil forcé en Asie Centrale jusqu'en 1956. Survivant à un cancer de l'estomac, il a forgé durant ces années une haine tenace à l'encontre du régime soviétique qui ne le quittera plus.

Un académicien offensif
En 1962, réhabilité par le successeur de Staline, l'écrivain publie son premier ouvrage Une journée d'Ivan Denissovitch qui relate son expérience du Goulag. Le succès est immense. Mais l'accalmie est de courte durée. En 1967, Le Pavillon des Cancéreux a été interdit en Russie, mais c'est L'Archipel du Goulag (1973), brûlot anti-stalinisme qui a mis définitivement le feu aux poudres. Le pouvoir se durcit et lui retire sa citoyenneté en 1974. Expulsé de Russie, il part avec sa famille en Suisse, puis aux Etats-Unis. Mais ces années d'exil ne l'empêcheront pas de dévoiler au monde entier la réalité du système concentrationnaire soviétique.
Retrouvant sa nationalité russe en 1990, il est revenu en Russie après la chute du mur en 1994. Et là, l'homme de lettres a pris un nouveau tournant. Orthodoxe convaincu, attaché aux valeurs morales de la société d'antan, il prône une Russie moins étendue, voire un peu plus "pure". Une thèse qu'il défend dans le premier volume de Deux cents ans ensemble. 1795-1995. Soljenitsyne est alors accusé d'antisémitisme. Fervent supporter de Poutine, il soutient l'intervention en Tchétchénie, la peine de mort pour les terroristes, et la volonté de l'ex-président russe de réformer la Russie. Un rapprochement qui lui vaut un prix d'Etat en 2007.
Aujourd'hui, sa dépouille est exposée à l'Académie des Sciences de Moscou pour une cérémonie d'adieux nationale. L'écrivain doit ensuite être inhumé demain au cimetière du monastère Donskoï à Moscou. 
Adeline BOURG. (www.lepetitjournal.com) mardi 5 août 2008

En savoir plus
Le Point - Mort du prix Nobel russe Alexandre Soljenitsyne, auteur de L'Archipel du Goulag
Le Monde ? Un nostalgique de la Sainte Russie
La Tribune ? Mort d'un symbole de la dissidence
Libération ? "Le déclin du courage en Occident"

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