La quarantaine pour les voyageurs de Chine, Macao, et Taiwan vers Hong Kong a été prolongée jusqu’au 7 juillet mais au-delà, une bulle de voyage se précise. Les voyageurs au retour d’autres régions du monde, eux, feront la quarantaine, jusqu’au 18 septembre. Mais les bulles se multiplient, tour d'horizon.
Qu’est-ce qu’une bulle de voyage?
Ce terme imagé a vu le jour depuis l’épidémie de Covid-19 que nous vivons et à laquelle la très grande majorité des régions du monde a réagi en réduisant la circulation des personnes. Plusieurs leviers ont été utilisés :
- Mesures de frein migratoire (arrêt de la délivrance de visas, interdiction aux frontières même avec visa valide pour les citoyens de certains pays ou les voyageurs arrivant de certaines régions du monde);
- Mesures sanitaires (quarantaine obligatoire en centre spécialisé payant, quarantaine obligatoire avec bracelet, tests obligatoires, formulaires d’auto-déclaration);
- Contrôle des moyens de transports (fermeture des aéroports et gares, interdiction des vols sur certaines lignes).
Une bulle vise à relancer la circulation des personnes au sein d’un espace considéré comme de même niveau de risque, en y relâchant les restrictions. Les accords sont plutôt bilatéraux. Les motivations peuvent être, principalement:
- Sanitaires (les mesures sanitaires de distanciation sociale, le niveau de contrôle de l’épidémie, et le niveau attendu de soins médicaux sont similaires au sein de la bulle, des réciprocités de soin en cas de maladie peuvent être accordées);
- Economiques (intenses échanges en temps normal);
- Politiques (entamer des négociations sur une bulle reflète une confiance mutuelle et envoie un signal géopolitique).
Les gouvernements doivent trouver l’équilibre fragile entre protéger leur population d’une 2ème ou 3ème vague et relancer leur économie, dans un contexte où le pays partenaire peut signer d’autres accords bilatéraux qui mettront ses partenaires à risque.
Une première phase dans la Greater Bay Area
Des discussions sont en cours depuis plusieurs semaines entre les autorités de la région. L’enjeu est de reconnaître mutuellement les mesures de contrôle du Covid-19 et permettre une circulation plus fluide des personnes entre ces régions limitrophes. L’idée en clair est d’accorder des exemptions ou raccourcissements de quarantaine dès lors que le risque sanitaire individuel est maîtrisé. Macao et Zhuhai sont arrivés à un accord dès le 10 mai.
Hong Kong semble avoir du mal à clore un tel accord. Des difficultés informatiques, liées au partage de données nécessaires à la génération d’un passeport de santé Covid-19 en temps réel, seraient à l’origine de ce retard. Il s’agirait de problèmes de compatibilité de bases de données entre les hôpitaux des réseaux publics et privés, et non de confidentialité des informations.
Ce 3 juin, la secrétaire à la santé Sophia Chan Siu-chee s’est exprimée sur la première phase du déploiement de la bulle de voyage. Beaucoup d’interrogations restent mais une certitude s’affirme: la bulle ne concerne que Hong Kong, Macao et la province du Guangdong. Taiwan n’a pas été évoqué, alors que Taiwan est un modèle de contrôle de l’épidémie et que les raisons économiques abondent, mais la politique a tranché.
Comment ça marche à Macao et au Guangdong?
Macao a déployé son passeport de santé le 3 mai. Le système est fondé sur des déclarations volontaires (lieux de voyages, contacts avec des malades, symptômes ressentis…) et ne nécessite pas de tests médicaux. Il est compatible et reconnu par Zhuhai (Chine) depuis le 10 mai. 20.000 croupiers chinois ont ainsi pu rejoindre les casinos macanais. La prochaine étape est de faire entrer…des clients chinois.
Le Guangdong, comme toute la Chine, a son passeport de santé Covid-19 fondé sur l’utilisation de QR codes. Ces codes ont été créés par Tencent (WeChat) et Alibaba (Alipay) en collaboration avec les gouvernements locaux. Le premier déploiement de la technologie par Alipay a été effectué à Hangzhou dès le 11 février. Les codes couleurs attribués sont principalement liés à la géolocalisation: le passage d’un individu dans une région considérée à risque fait de lui une personne à risque.
En Chine, les systèmes sont provinciaux: ils permettent ou au contraire restreignent les mouvements à l’échelle de la province, mais sont compatibles. Un QR vert peut (condition nécessaire mais pas toujours suffisante) permettre le passage de la frontière inter-provinciale.
C’est pourquoi la bulle concerne la province du Guangdong et non pas la Chine: Hong Kong et sa province limitrophe peuvent décider d’exclure l’accès à d’autres provinces chinoises. Les facilités de déplacement concernent la Greater Bay Area seulement.
Hong Kong, c’est pour bientôt?
Le gouvernement doit annoncer cette politique dans les jours à venir. Le process évoqué est le suivant:
- Un test de salive doit être effectué en personne ou envoyé en laboratoire;
- L’hôpital saisit le résultat sur une plateforme gouvernementale et informe le demandeur au maximum 24 heures après le test;
- Ce résultat reste valide 7 jours, période durant laquelle le demandeur doit remplir un formulaire d’obtention d’un QR code;
- Le QR code peut être téléchargé ou imprimé, il servira au contrôle sanitaire au poste frontière.
Le passage de la frontière dépend ensuite des restrictions usuelles de voyage: un visa valide est nécessaire.
- Vers Macao: un séjour avec exemption de visa est possible jusqu’à 90 jours pour les Français.
- Vers Zhuhai: un visa "on arrival" valide 3 jours est ouvert aux citoyens français, il coûte CNY 168 et on peut en faire la demande aux postes frontière de Gongbei, Hengqin et Jiuzhou (ferry depuis Hong Kong).
- Vers Shenzhen: il faut un visa chinois, or le service délivrant les précieux sésames est toujours fermé.
Peut-on tenter l'Asie depuis Hong Kong?
Si la Chine ne vous tente pas, voici l'état des lieux des autres pays de la région.
- Cambodge: avec un visa en poche, un certificat médical obtenu moins de 72 heures avant le départ, il vous faudra quand même faire quarantaine à l’aller et au retour.
- Thailande: le 15 mai, la Thaïlande a enlevé Chine, Hong Kong, Macao et Corée du Sud de sa liste de régions infectées. Mais le 16 la Civil Aviation Authority of Thailand annonçait que tous les vols depuis l’étranger restaient interdits jusqu’à fin juin. Le nombre de nouveaux cas est ridiculement bas et la Thaïlande dépendante du tourisme: on peut parier sur une relaxation des contraintes cet été.
- Japon: les restrictions se sont détendues entre les préfectures mais la frontière reste très contrôlée, l’accès est encore interdit aux étrangers de Hong Kong, Chine, Etats-Unis et la plupart de l’Europe.
- Indonésie, Malaisie, Philippines restent très prudents.
Quid des autres bulles de voyage?
Des bulles déjà actives existent
- Depuis le 1er mai, Corée du Sud-Chine: Prévu pour les hommes d’affaires pressés, l’accord prévoit une quarantaine réduite et au moins un test négatif en Corée du Sud et en Chine. Des accès rapides (contrôles sanitaire et migratoire) sont en place à l’aéroport de Séoul et dans 10 aéroports chinois. 200 ingénieurs et techniciens Coréens ont été les premiers étrangers exemptés de la désormais traditionnelle (et redoutée) quarantaine chinoise.
- Depuis le 15 mai, les Pays Baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie): Toujours très proches politiquement et économiquement, les Pays Baltes ont eu une gestion sanitaire admirable de la pandémie (moins de 150 morts sur les trois pays). Pas de séjour hors des Pays Baltes pendant 15 jours, pas d’infection, et pas de contact avec un malade avéré, fait de vous un voyageur libre au sein de la bulle. La Pologne tente un rapprochement.
- Dès le 22 juin, France-Espagne-Portugal, et bientôt toute l’Europe: Officielle ce 4 juin, l’ouverture des frontières vers l’Espagne et le Portugal va faire des heureux cet été. D’autres pays européens réouvrent quasiment au même moment.
A suivre
- Australie-Nouvelle-Zélande: Le plan Oceania bubble ou Trans-Tasman bubble sera bientôt présenté. Si les deux pays ont très peu souffert de Covid-19 malgré leur proximité géographique et économique avec l’Asie, il est possible que leurs saisons inversées soit un trompe-l’œil: les coronavirus sont plus contagieux en hiver, or il commence seulement dans l'hémisphère sud. Il faudra donc sans doute attendre août pour des engagements.
- Singapour-Oceania bubble, Singapour-Canada, Singapour-Corée du Sud, Singapour-Chine: La cite-état a tout à gagner à un rapprochement avec un ou plusieurs de ces pays, étant très dépendante économiquement et plutôt en souffrance sur le front de la pandémie. Seule la Chine a semblé intéressée, un accord similaire à celui qui lie Pékin et Séoul est annoncé.
- Taiwan-Californie: La ministre de la Santé Chen Shih-chung citée dans The Financial Times, affirme que des restrictions resteront en place tant qu’un traitement n’est pas disponible. C’est une bulle très scientifique et prudente qui se met en place: dans le cadre d’un programme de Stanford University, une bulle constituée de 500 voyageurs testés négatifs et volant de San Francisco à Taipei en juin va se soumettre à plusieurs tests sur une période de 14 jours après leur arrivée. L’objectif est de trouver le nombre minimum de jours de quarantaine nécessaire à l’arrivée. C’est aussi un signal fort, alors que l’Amérique est dévorée par la pandémie et Taiwan largement épargné.
Toutes les négociations n’aboutissent pas: l’exemption de quarantaine évoquée pour les Français au Royaume-Uni n’a pas fonctionné.
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