Depuis 1979, 12.138 enfants vietnamiens ont été adoptés par des Français. Cette année, une trentaine se lancent, soit environ quinze fois moins qu’il y a 10 ans. Pourquoi et comment l’adoption internationale au Vietnam vers la France a-t-elle évolué ? Enquête.
« Nous avons connaissance d’une trentaine d’adoptants Français qui souhaitent adopter au Vietnam, c’est sensiblement le même chiffre qu’en 2022 » précise le service des Affaires sociales de l’Ambassade de France au Vietnam. D’après les chiffres officiels du ministère des Affaires étrangères, le nombre d’adoptions internationales du Vietnam vers la France a considérablement diminué ces dernières années et ce, pour plusieurs raisons.
Une situation trouble dans les années 90-2000
Début février 2023, une étude est publiée en France sur les pratiques illicites des adoptions internationales des historiens Yves Denéchère et Fabio Macedo. Elle explique que, l’adoption internationale étant plutôt populaire au Vietnam dans les années 90, plusieurs dérives ont été signalées : « L’analyse des correspondances des diplomates français en poste au Vietnam dans les années 90 fait apparaître le caractère ordinaire des pratiques illicites à l’œuvre dans le pays. (…) Leur récurrence, voire leur répétition, montre que le phénomène est demeuré considérable au moins jusque dans les années 2000 ». En 1999, la France suspend provisoirement les procédures d’adoptions en raison de l’opacité de la situation. Deux ans plus tard, le Vietnam et la France signent une convention bilatérale, l’adoption reprend.
Le tournant de l’adoption internationale au Vietnam
En 2012, le Vietnam ratifie la Convention de la Haye. Les procédures se durcissent et se rallongent. La priorité est donnée à l’adoption nationale. Une autorité centrale est mise en place, représentée par le Département de l’Adoption du ministère de la Justice vietnamien et de la Mission de l’Adoption Internationale (MAI), côté français. Les adoptions vers la France diminuent considérablement. A l’inverse, les adoptions nationales augmentent, car les dossiers sont priorisés et la procédure est plus courte. De plus le pays s’urbanise et évolue sociologiquement : ne pas (pouvoir) avoir d’enfants par voie naturelle n’est plus tabou par exemple.
En 2019, la crise sanitaire fige les procédures : « Aucun nouveau dossier n’a été déposé pendant le Covid » confirme le service des affaires sociales de l’Ambassade de France au Vietnam.
Adopter un enfant au Vietnam est très contrôlé
Aujourd’hui, encadrés par la Convention de la Haye qui régit la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, les dossiers à l’adoption doivent être transmis par un intermédiaire - l’Agence Française de l’Adoption (AFA) ou un Organisme Autorisé pour l’Adoption (OAA) -. Toute démarche individuelle ou déposée directement auprès d’une institution locale est prohibée, selon les directives de la Convention de la Haye. Une autre possibilité existe pour les Français, celle de l’article 28 de la Loi vietnamienne sur l’adoption de 2010 : Le texte autorise les étrangers résidant au Vietnam depuis plus d’un an à déposer un dossier directement auprès du Département de l’Adoption vietnamien. Cette procédure est considérée comme une adoption internationale. Les adoptants doivent identifier un enfant vivant au sein d’un centre de protection habilité et juridiquement adoptable.
Le Département de l’Adoption vietnamien est très vigilant sur les procédures, comme le souligne un intermédiaire local, chargé d’accompagner les adoptants sur place et transmettre les documents aux autorités « Les contrôles sont bien organisés. Pour preuve, les dossiers sont contrôlés à plusieurs niveaux : Département des affaires sociales, ministère de la justice de province, enquête de police de province…Et nous sommes là pour orienter et conseiller les adoptants Français qui adoptent au Vietnam. »