Avec un budget alloué à l’Institut Français qui repart à la hausse et de grandes ambitions pour exporter davantage ses artistes et renforcer sa zone d’influence, la France entend conforter son « soft power ».
« En 2019, notre budget augmente de 2 millions d’euros. Dans un contexte de contraction budgétaire, il s’agit d’un choix symbolique qui illustre la place de choix allouée à notre diplomatie culturelle », se félicite Pierre Buhler, président de l’Institut Français, après plus de sept ans de disette.
Les responsables de l’opérateur public ont présenté, mardi 15 janvier, les grands axes de travail et chantiers qu’ils entendent conduire en 2019. Cette politique s’articule autour de trois grandes missions : la promotion et l’accompagnement de la culture française et de la langue française et le développement d’échanges avec d’autres cultures, particulièrement avec les pays émergents et le continent africain. « Bien qu’à l’Institut, on aime beaucoup la polychromie ; la ville, la jeunesse et l’Europe marqueront nos programmes thématiques et pluridisciplinaires », complète Anne Tallineau, sa directrice générale.
Choyer sa sphère d’influence culturelle, Afrique en tête
Le 20 mars dernier, le président Macron présentait sa stratégie pour « une vision nouvelle, décomplexée, de la francophonie et du multilinguisme ». Depuis, tous les acteurs sont donc mobilisés et incités à revoir leurs méthodes.
« Que ce soit les biennales de danse, les festivals de photo ou les centres d’art indépendants, on reste partenaire mais on se défait peu à peu de notre rôle de coproducteur », explique Alain Corbier-Labasse, coordinateur du programme Afrique et Caraïbes en créations. L’objectif : accompagner la structuration des opérateurs culturels de la société civile à l’étranger.
Si le tropisme africain reste marqué, la mise en place de « saisons » culturelles, à l’image de la saison France-Roumanie lancée fin novembre, doit permettre à la France de développer ses échanges culturels avec le reste du monde. La diffusion, à l’étranger, d’œuvres françaises est un moteur économique important de notre industrie culturelle. C’est dans cet esprit que seront multipliées les invitations de professionnels étrangers à des rencontres fédératrices ou que le catalogue de spectacles à faire tourner sera étoffé, en comptant sur les collectivités territoriales pour mettre aussi la main à la pâte . « Connaître la scène française ne suffit plus à l’exporter, confie Marie-Cécile Burnichon, directrice adjointe du département développement et coopération artistique. Il faut passer d’une manifestation d’intérêt à une invitation d’artistes ».
« Aujourd’hui, le français est la 5ème langue la plus parlée dans le monde, la 3ème dans les affaires et la 2ème la plus apprise, après l'anglais » énumère Judith Roze, directrice du département Langue française, livre et savoirs. Fort d’un réseau de plus de 800 alliances françaises dans 132 pays, l’Etat pourra également compter sur des outils tels que « IF classe » ou « Label L », pour accompagner les enseignants de français dans le monde et promouvoir le français dans un contexte plurilingue professionnel - dans le tourisme notamment. Un vaste concours d’éloquence international à destination de jeunes apprenants en français issus d'une dizaine de pays sera organisé avec Eloquentia. La finale aura lieu à Paris à la fin de l’année.
Rationaliser les moyens et coordonner les acteurs
La ritournelle n’est pas nouvelle. Année après année, on se répète qu’entre Instituts, Alliances et Services de Coopération et d’Action Culturelle des ambassades, on ferait mieux de moins se marcher sur les pieds. A l’étude depuis le début du quinquennat, le rapprochement entre la fondation Alliance Française et l’Institut Français devient effectif. Le déménagement du siège de l'Institut dans les locaux historiques de l'Alliance française, boulevard Raspail à Paris, a ainsi été confirmé. La fondation devrait également transférer sous peu ses missions de soutien pédagogique et professionnalisation du personnel à l’Institut Français. Présage d’une fusion ? En ne conservant que l’animation du réseau et la protection de la « marque » Alliance Française, la fondation risque en tout cas de devenir une coquille à moitié vide.