À l’occasion de la rentrée 2025, Olivia Richard, sénatrice des Français établis hors de France, fait le point sur ses priorités : protection des jeunes face aux écrans, enjeux sociaux et budgétaires pour les Français établis hors de France et l’importance cruciale de l’engagement citoyen. Entre alertes et encouragements, elle affirme “il est crucial de s’inscrire, de voter, et de prendre pleinement sa place dans la communauté nationale en participant aux scrutins”.


En juin 2025, vous avez été cosignataire d’une proposition de loi visant à protéger les jeunes de l'exposition excessive et précoce aux écrans et des méfaits des réseaux sociaux. Pouvez-vous nous parler des grandes lignes de ce texte ?
Je crois qu’en France nous prenons de plus en plus conscience des risques liés au numérique et de ses conséquences sur les enfants, notamment le temps passé devant les écrans. La semaine dernière, on me disait que certains adolescents pouvaient passer jusqu’à huit heures par jour sur TikTok.
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Mais nous ne mesurons pas encore pleinement les effets que cela peut avoir sur leur développement, même si nous savons déjà que c’est préoccupant. Par exemple, en élémentaire, un enfant passe désormais plus de temps devant un écran que sur les bancs de l’école. Cela doit nous alerter sur l’impact que cela peut avoir, à la fois sur sa construction personnelle et sur son rapport aux autres.
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"Beaucoup n’ont pas conscience que laisser un enfant sans surveillance sur Internet revient à le laisser seul dans la rue", déclare Olivia Richard.
C’est donc une situation dramatique. Et je ne parle même pas encore des dangers et des violences. Il devient absolument essentiel de former les parents. Beaucoup n’ont pas conscience que laisser un enfant sans surveillance sur Internet revient à le laisser seul dans la rue. Or, il y a des prédateurs, des arnaques. C’est un point sur lequel je travaille particulièrement, un risque de violences et d’agressions sexuelles en ligne, qui peuvent malheureusement se prolonger par des agressions dans la vie réelle. Internet est un outil qu’il faut apprendre à utiliser et adapter à l’âge des enfants. Pour cela, la formation des parents est indispensable.
Quelles sont vos priorités pour cette rentrée 2025 ?
Mes priorités, pour l’instant, consistent avant tout à avoir un interlocuteur stable au gouvernement. Depuis mon élection il y a deux ans, j’en suis déjà à mon cinquième ou sixième.

Cela relativise beaucoup les initiatives que l’on peut lancer au Sénat, car tous les six mois en moyenne, il faut reprendre son bâton de pèlerin et recommencer à zéro. Ce n’est pas seulement épuisant, c’est surtout vain. C’est pourquoi nous cherchons d’autres manières de travailler, notamment en tissant des partenariats avec des responsables d’administration pérennes, ce qui permet de progresser sur les sujets qui préoccupent les Français de l’étranger. Et, bien sûr, ces sujets sont nombreux en ce moment.
Que pensez-vous de la nomination de Sébastien Lecornu et quels sont aujourd’hui les principaux enjeux pour les Français de l’étranger et leurs représentants ?
Je tiens à préciser qu’en tant qu’indépendante, je n’ai pas d’opinion particulière sur la nomination de Sébastien Lecornu. C’est à lui de se saisir des préoccupations des Français de l’étranger. D’ailleurs, nous avons pris soin, dans une lettre adressée la semaine dernière, de lui rappeler l’existence des conseillers des Français de l’étranger, puisqu’il a écrit à tous les maires de France pour leur assurer de son engagement. J’ai trouvé cette initiative très positive et essentielle mais ai tenu à rappeler qu'y a aussi des élus locaux à l'étranger.
"Il appartient au ministre de ne pas oublier les trois millions de Français vivant à l’étranger et celles et ceux qui les représentent", témoigne la sénatrice.
Il faut rappeler qu’il y a certes des municipales dans six mois, mais qu’il y a aussi, dans le même temps, des élections consulaires. Il appartient donc au ministre de ne pas oublier les trois millions de Français vivant à l’étranger et celles et ceux qui les représentent. C’est là un premier enjeu, avoir au gouvernement un interlocuteur sensibilisé à nos problématiques.
Un autre dossier sur lequel nous travaillons actuellement concerne le régime fiscal des indemnités des conseillers des Français de l’étranger. C’est un sujet technique, certes, mais qui révèle surtout le manque de définition du statut de l’élu français à l’étranger. Et alors qu’une nouvelle campagne pour les consulaires s’ouvrira dans quelques mois, il est crucial de réfléchir collectivement à l’avenir de ce mandat. Il est indispensable et ne doit pas s’essouffler car c’est une véritable courroie de transmission, qui risque de s’enrayer si nous n’osons pas poser les bonnes questions.
Quelle est votre perception de la situation budgétaire française ?
Elle est catastrophique, et les Français de l’étranger doivent en être conscients. En ce moment se tiennent les assises de la protection sociale, dont chacun sait qu’elles devraient rester sur des budgets constants. Or, cela pose problème. Il faut repenser le système de protection sociale des Français à l’étranger, car on ne peut pas continuer ainsi. L’AEFE fait également face à un déficit considérable.
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La CFE doit, elle encore, repenser son modèle. Nous ne pouvons pas attendre indéfiniment de l’État français qu’il accorde toujours plus de subventions. Il faut, à mon sens, tout remettre à plat, tout en préservant ce lien qui permet aux Français de l’étranger de rester connectés à leur pays et de ne pas se sentir abandonnés.
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La situation budgétaire est donc mauvaise et, qui plus est, marquée par une totale incertitude. Nous ne savons même pas quand le budget sera examiné, ni quand un gouvernement sera formé. Nous naviguons à vue, et il faudra tôt ou tard prendre des décisions courageuses.
Quel message souhaitez-vous adresser aux Français de l’étranger en cette rentrée ?
Mon message est toujours le même : un message d’espoir et d’engagement. Inscrivez-vous, engagez-vous. Les Français de l’étranger votent trop peu, beaucoup ne sont pas inscrits sur les listes électorales ni au registre des Français établis hors de France. Pourtant, quand on nous demande notre avis, il faut le donner.
Pourquoi faut-il absolument vous inscrire sur le registre des Français de l'étranger?
À chaque fois qu’un Français de l’étranger ne s’inscrit pas, cela se traduit par des moyens sous-calibrés, que ce soit au niveau du poste consulaire ou, plus largement, du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères face à Bercy. Voilà pourquoi il est crucial de s’inscrire, de voter, et de prendre pleinement sa place dans la communauté nationale en participant aux scrutins.
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