Douze jours de frappes, de ripostes, et d’escalade nucléaire évitée de justesse…En juin 2025, l’Iran et Israël ont traversé l’un des épisodes militaires les plus violents de leur histoire récente, une confrontation éclair qui a embrasé le Moyen-Orient et réactivé les grandes lignes de fracture de la région. Alors que les bombes se sont tues mais pas les tensions - loin de là -, lepetitjournal.com essaye de décrypter la guerre éclair en s’appuyant sur les propos de Bernard Hourcade, spécialiste du CNRS.


Que s’est-il passé entre l’Iran et Israël en juin 2025 ?
Du 13 au 24 juin 2025, Israël et l’Iran se sont livrés à une guerre-éclair d’une intensité inédite. L’offensive israélienne est lancée dans la nuit du 12 au 13 juin, quelques jours à peine avant une nouvelle session de négociations sur le programme nucléaire iranien. Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, justifie alors l’opération par la nécessité de contrer une « menace existentielle ». Cette attaque marque un tournant, avec une intervention directe des États-Unis aux côtés d’Israël. Les combats font 1.054 morts en Iran, selon une ONG, et 28 en Israël, d’après les autorités. Un cessez-le-feu est proclamé le 24 juin, mais les deux parties s’accusent plusieurs fois de violer l’accord.
Plus de scientifiques et d'universitaires ont été tués que de membres des Gardiens de la révolution.
Est-ce vraiment une offensive sous prétexte nucléaire ?
Comme beaucoup d’experts, Bernard Hourcade, géographe français, spécialiste de l’Iran et directeur de recherche honoraire au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), ne voit pas l’offensive israélienne comme un barrage à l’enrichissement nucléaire de l’Iran : “Tel-Aviv, qui possède 300 ogives nucléaires, ne craint pas la menace nucléaire iranienne [...] Le peuple iranien est la cible” L’objectif alors ? “Freiner une puissance régionale montante”, dont le retour sur la scène internationale depuis 2015, date de l’accord sur le nucléaire (JCPOA), est perçu comme une menace existentielle par Israël. L’émergence d’une classe moyenne iranienne, éduquée et tournée vers le monde, inquiète davantage que l’arsenal militaire selon le chercheur.
Israël cherchait-t-il à renverser la République islamique ? Pas nécessairement selon Bernard Hourcade. Pour lui, l’objectif serait plutôt de “déstabiliser durablement la nation iranienne”, notamment en frappant son infrastructure scientifique. “Plus de scientifiques et d'universitaires ont été tués que de membres des Gardiens de la révolution.” souligne le spécialiste de l’Iran. La campagne militaire israélienne semblerait avoir poursuivi un objectif politique autant que stratégique. Pour de nombreux analystes, l’opération aurait visé en profondeur les capacités scientifiques, institutionnelles et symboliques du pays.
l'unité nationale s'est renforcée. Israël et Trump, paradoxalement, ont servi les intérêts de la République islamique

Les frappes extérieures ont-elles fragilisé l’Iran ?
Loin de fracturer le pays, les bombardements israéliens ont ressoudé la société iranienne : “En interne, tout le monde s'accorde sur le bien-fondé de nombreuses critiques et sur la nécessité réelle d'engager des réformes, mais l'unité nationale s'est renforcée. Israël et Trump, paradoxalement, ont servi les intérêts de la République islamique.”. Affaibli par la crise économique et le mouvement de contestation "Femmes, vie, liberté", le régime semble profiter de la trêve pour reprendre la main. La guerre des douze jours modifie aussi l’équilibre au-delà des frontières iraniennes : “Israël apparaît comme une menace plus réelle pour les pays de la région que l'Iran ne l'a jamais été. Par conséquent, l'Arabie saoudite, paradoxalement, est poussée dans les bras de l'Iran” analyse Bernard Hourcade.
Le 1er août 2025, la France se joint à un communiqué de 13 pays qui pointe du doigt Téhéran pour assassinats et enlèvements d'opposants

Quelle est la position de la France dans le conflit Israël-Iran ?
La France a apporté quelques jours après le début du conflit son soutien "au peuple israélien, à son droit à l'existence et à la sécurité" tout en insistant sur la nécessité d'un "accord robuste" pour que l'Iran ne se dote pas de l'arme nucléaire. Très rapidement, le Quai d’Orsay insistait sur la priorité de la France, à savoir “la sécurité de nos ressortissants et de nos intérêts, et nous adaptons notre posture en conséquence”. Lors des premières frappes, le ministère comptabilisait “près d’un millier de Français en Iran, et une estimation de 250.000 en Israël, dont au moins 10.000 Français de passage.”
Conflit entre Israël et Iran : les informations pour les Français de l’étranger
Prenant la parole le 2 juillet à l’Assemblée nationale - soit après la guerre des douze jours - François Bayrou déclarait que la France appelait “la République islamique d’Iran à revenir à la table des négociations. (...) Car la seule réponse valable au danger que représente le programme nucléaire iranien sera, et ne peut être qu’un règlement négocié”. Le 1er août 2025, la France se joint à un communiqué de 13 pays qui pointe du doigt Téhéran pour assassinats et enlèvements d'opposants “Journalistes, opposants, juifs, ou fonctionnaires”, sur leurs sols, méprisant la souveraineté des États occidentaux. “Des mensonges éhontés” rétorque l’Iran, “une tentative visant à détourner l'attention du public de la question la plus urgente du moment, à savoir le génocide en Palestine occupée “.
La Guerre Iran - Israël est-elle derrière nous ?
Pour Bernard Hourcade, la guerre des douze jours n’a pas brisé l’Iran mais plutôt consolidé. Si la guerre militaire s’est arrêtée, la guerre politique et stratégique, elle, ne fait que commencer. L’avenir du nucléaire iranien reste en suspens. Après les propos de Donald Trump lundi 25 juillet 2025 “Nous avons anéanti leurs capacités nucléaires. Ils peuvent recommencer, mais s'ils le font, nous les anéantirons en un clin d'œil”, le ministre iranien des Affaires étrangères a répondu sur X que son pays riposterait "de manière plus décisive" en cas de nouvelles attaques des Etats-Unis et d’Israël sur la République islamique. Les menaces, elles, ne s’arrêtent pas.
Le dimanche 3 août 2025, selon un média d'État, l’Iran annonce la création d’un Conseil de défense nationale chargé de renforcer les capacités militaires du pays. Selon les médias officiels, ce nouvel organe stratégique sera placé sous la présidence du chef de l’État iranien et réunira notamment des hauts commandants des forces armées ainsi que des représentants des ministères concernés. L’organisation aura pour mission d’examiner “les plans de défense” et et “renforcer les capacités des forces armées de manière centralisée”. La défiance non plus ne s’arrête pas.
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