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Cédric Deverchère (Volt) : « Je vis la vie d’un Français de l’étranger »

Cédric Deverchère (Volt) : « Je vis la vie d’un Français de l’étranger »Cédric Deverchère (Volt) : « Je vis la vie d’un Français de l’étranger »
Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 25 mai 2022, mis à jour le 26 mai 2022

Dans la perspective des prochaines élections législatives (à partir du 27 mai en ligne, 5 et 19 juin 2022 dans les urnes), lepetitjournal.com est allé à la rencontre des candidats dans chaque circonscription des Français de l’étranger. Cédric Deverchère, candidat du parti Volt Europa pour la 4ème circonscription des Français établis hors de France (Bénélux), a répondu à nos questions.

 

Pourquoi avez-vous souhaité vous présenter aux prochaines élections législatives ?

Pour la même raison qui m’a poussé à me lancer en politique, et notamment chez Volt. Je ne suis pas satisfait de la façon dont se déroulent les débats en ce moment à l’Assemblée nationale, et même de la façon dont on fait de la politique de manière générale. Je trouve qu’en France, nous avons une politique trop basée sur le conflit, chez Volt nous essayons d’apporter plus de nuance dans la manière travailler. Nous trouvons également qu’il n’y a pas assez de représentativité à l’Assemblée, sous toutes ses formes (niveau de diplôme, niveau d’emploi, ethnicité, parité homme/femme). Cela s’applique aussi au parcours professionnel, beaucoup sont issus du public ou ont des parcours juridiques et sont là depuis toujours. Nous avons besoin de sang neuf et de société civile. A titre personnel, je trouve que la démocratie en France ne fonctionne pas, notamment avec le système de représentativité qui est le nôtre. Je trouve que nous n’impliquons pas encore assez les citoyens dans la fabrique de la loi, même s’il y a eu des expérimentations intéressantes au cours des cinq dernières années.

D’un point de vue plus politique, si je ne devais choisir qu’un sujet, ce serait le climat. Il s’agit d’un sujet qui nous tient à coeur, à moi-même et à Audrey-Flore Ngomsik (sa suppléante, ndlr). Nous sommes tous les deux professionnels dans le domaine de la transition climatique depuis 15 ans. Nous ne pouvons que constater que nous n’allons pas assez vite concernant cette problématique, qui est la plus importante de notre génération, de celle d’après, et de celle d’encore après. C’est difficile de rester à ne rien faire. Nous nous rendons compte que nous jouons avec des règles du jeu qui ne favorisent pas forcément une politique climato-compatible. Ce sont donc nos sujets principaux : démocratie, climat et représentativité.

 

Quel est votre rapport avec cette circonscription ?

J’habite aux Pays-Bas, plus précisément à Gouda (prononcée « Raouda », ndlr), la ville du fromage. Je suis là depuis cinq ans et je compte y rester. Je viens d’y acheter un logement et je vais y avoir mon premier enfant. Je suis très impliqué dans la société néerlandaise, il s’agit d'un but pour moi depuis le début, tout comme de parler la langue. Je ne savais cependant pas que je serai amené à être impliqué dans la politique, c’est seulement grâce à Volt qui est un parti panoeuropéen. J’ai également un lien avec Bruxelles dans le sens où, dans ma carrière, j’ai beaucoup travaillé sur les projets européens soit comme consultant direct pour la Commission, soit en conseillant d’autres porteurs de projets. Dans ce cadre là, je me suis souvent rendu pour des raisons professionnelles à Bruxelles. 

 

En quoi votre parcours est-il marqué par les préoccupations des Français de l'étranger ?

Je vis la vie d’un Français de l’étranger, il y a donc des aspects concrets, pratiques, sur l’administration et les retraites, qui me concernent directement. Je me rends donc personnellement compte de ce qui marche et de ce qui ne marche pas. Pour reprendre le sujet des retraites, il y a aujourd’hui beaucoup d’accords bilatéraux qui ne fonctionnent pas trop mal, notamment si vous avez travaillé dans deux pays. Si l’on a fait carrière dans 10 pays de l’Union européenne, cela devient plus compliqué mais ce qui manque surtout c’est la visibilité et la clarté. Nous souhaitons donc mettre en place une plateforme d’information pour réunir tous les droits qu'on a accumulés dans tous les pays et pouvoir évaluer les conséquences de prendre sa retraite à tel ou tel âge. Sur le long terme, nous souhaitons plus de convergences dans le système ou en tout cas une façon de centraliser au niveau européen. Si jamais quelqu’un a une carrière dans plusieurs pays, il faudrait que cette personne puisse déclencher ses droits au niveau européen.

Du côté administratif, il est très compliqué d’avoir quelqu’un au téléphone et tout n’est pas encore parfaitement numérisé. Le sujet de la scolarité m’intéresse de plus en plus, car je vais moi-même être concerné par le sujet d’ici quelques temps en tant que père. Plus que simplement soutenir le système de scolarité français à l’étranger, nous regardons, avec notre étiquette panoeuropéenne, comment nous pouvons mieux coordonner les systèmes. Nous pourrions envisager un système comme en Allemagne avec AbiBac, grâce auquel des élèves peuvent à la fois préparer l’Abitur allemand et la Baccalauréat français. Cela peut réduire les coûts pour la France de se reposer sur un système local.

Plus spécifiquement, j’ai constaté aux Pays-Bas un recul de la présence et de la langue française de plus en plus marqué. Nous ne gérons pas notre patrimoine, nous avons notamment vendu au rabais les superbes bâtiments de l’Institut français d’Amsterdam il y a quatre ans. C’était pourtant un véritable havre pour les Français et non Français où une multitude d’événements se tenait.

 

Comment voyez-vous le mandat de député ?

Je pense qu’il vous toujours avoir un esprit d’équipe. Pour moi, et pour Volt, cela a assez peu de sens d’élire quelqu’un qui représentera seul le parti. Je suis sur un pied d’égalité avec ma suppléante Audrey-Flore Ngomsik. Il y a donc cette idée un peu révolutionnaire de voter pour un binôme qui, sait-on jamais, verra peut-être le jour dans le futur. La question serait de déterminer comment apporter cela au Parlement. De façon générale, nous nous reposons sur une équipe de collaborateurs et sur les militants. Nous souhaitons travailler avec les citoyens, et maintenir un lien très fort avec la circonscription. Il faudra voir comment tout cela peut être organisé. Notre engagement est de passer la moitié du temps dans la circonscription, ce qui n’est pas du tout ce qui se passe actuellement avec le député sortant.

 

Quels sont, selon vous, les défis qui attendent les Français de votre circonscription ?

J’ai jusqu’ici parlé de choses très concrètes pour les Français de la 4e circonscription. Le lien avec la France représente un grand enjeu, surtout aux Pays-Bas où il s’est distendu. J’aimerais que l’on réfléchisse à nouveau au rôle et à la fonction des élus des Français de l’étranger et à comment réduire la partie purement administrative et mettre l’accent sur leur rôle de discussion et d’interaction avec la communauté française locale. Il y a également des aspects plus concrets comme les problèmes de double imposition avec la Belgique, notamment.

Il y a des sujets fondamentaux sur le long terme qui sont le climat et l’Europe. Il nous faut aller plus loin dans la construction européenne. Il faut le faire depuis l’Assemblée nationale, car depuis le Parlement européen, tout le monde vit l’Europe au quotidien et bien sûr que la majorité des parlementaires veulent aller plus loin en termes de construction européenne. Ce sont surtout les Etats membres qui ont le pouvoir de faire bouger les choses.

 

Comment est organisée votre campagne et qui sont vos soutiens ?

Concernant les soutiens financiers, il y a beaucoup de petits donateurs, auxquels nous faisons appel dans notre campagne. Ce qui fait notre spécificité est que nous sommes un parti présent dans tous les pays d’Europe. Nous avons une fondation liée à une myriade de partis nationaux, nous faisons donc campagne à quatre parti : Volt Netherlands, Volt Luxembourg, Volt Belgique et Volt France. C’est fondamentalement comme cela que nous organisons les choses. Dans chaque pays, nous avons des équipes de militants qui appartiennent à chaque parti. Sur place, nous sommes aidés par des Français mais également par des Néerlandais qui apprennent le français et qui aiment la France. Nous travaillons donc avec une quinzaine de personnes francophones pour organiser des événements, faire du flyering, contacter les médias, etc.

 

Quels sont les axes de travail que vous souhaitez mener à bien si vous êtes élu ?

J’ai déjà en partie répondu, mais si je devais re-catégoriser, je dirai qu’il y a quatre axes : la vie quotidienne des Français de l’étranger, l’Europe, le climat, et la démocratie. Concernant l’Europe, nous avons une proposition très concrète déjà en place aux Pays-Bas et en Allemagne qui souhaitent impliquer les Parlements nationaux dans la fabrique des lois européennes. Il faut arrêter avec ce système dans lequel les gouvernements, de façon non transparente, prennent des décisions au niveau européen, feignent la surprise quand il faut transposer les directives européennes en droit national et prétendent que l’Europe leur impose ces directives, auxquelles ils ont pris en réalité pris part.

Concernant le climat : nous avons, et j’ose le dire, le programme au niveau européen le plus ambitieux de tous les partis d'Europe, c'est à dire le plus concret, le plus pragmatique et le plus technique. Il en est même difficile à lire tellement il est technique. Nous voulons être climat neutral d’ici 2040 car nous estimons que, si le monde doit l’être d’ici 2050, l’Europe doit aller plus vite. Nous avons un système de quota d’émissions pour y parvenir. Ce qui ne nous empêche pas d’être un parti libéral dans le sens où ne sommes pas forcément pour une planification écologique. Nous sommes pour des règles du jeu fermes afin que les entreprises s’organisent pour atteindre les objectifs. Nous sommes aussi pragmatiques sur le sujet des énergies. La transition énergétique passe par la sobriété, les énergies renouvelables, le nucléaire et l'innovation, par exemple avec l'hydrogène sur le long-terme. Nous estimons que, vu le temps à notre disposition, nous ne pouvons fermer aucune porte.

Du côté démocratique, nous souhaitons une convention citoyenne permanente sur le climat et la justice sociale, la proportionnelle intégrale à tous les niveaux et une plus grande implication des Français de l’étranger. Nous voudrions que les citoyens de l’UE, après un certain temps passé à travailler en France, puissent voter aux élections régionales et nationales.

 

Quel regard portez-vous sur le bilan de l’actuel député de la 4e circonscription des Français de l’étranger (Pieyre-Alexandre Anglade) ?

Pour commencer par le positif, c’est quelqu’un qui connaît très bien les dossiers européens. Je l'avais rencontré lorsqu'il était assistant parlementaire de la député européenne du MoDem Nathalie Griesbeck. Je pense qu’il connaît très bien ses sujets et les porte bien d’un point de vue technique. D’un côté plus critique, son lien avec la circonscription est très faible, il est très présent à Paris. Tout le monde ici se plaint du fait qu’il est très peu venu aux Pays-Bas, il est perçu comme quelqu’un de froid et distant dans sa façon de fonctionner. Nous apportons beaucoup plus de chaleur et d’humanité à ce niveau là.

Il est membre de la majorité présidentielle et celle-ci a reculé sur les inégalités, notamment aux points de vue fiscal et démocratique. Il y a eu des expérimentations intéressantes, mais sur le fond il y a eu un fonctionnement extrêmement rétrograde de la Vème République, avec un conseil de défense pour gérer une crise sanitaire pendant deux ans, ce qui est aberrant. Sur le climat, la majorité était globalement à côté de la plaque. Emmanuel Macron ne connaissait pas le sujet en 2017, même si aujourd’hui on peut considérer qu’il en a une connaissance acceptable.

logofbinter
Publié le 25 mai 2022, mis à jour le 26 mai 2022
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