Les blogs, has been ? Si les comptes Instagram ou les sites touristiques professionnels remplacent souvent les pages de voyage plus personnelles, force est de constater que les blogs n’ont pas complètement disparu. En témoignent ces quatre blogueurs français éparpillés dans le monde. Qu’il s’agisse de photos insolites, de retours d’expériences malheureuses, ou de visites culturelles, tous poursuivent les mêmes buts : déconstruire les clichés, partager des informations, et prendre du recul sur leur quotidien.
En octobre, lors de son Forum Expat 2021, Courrier International a réuni plusieurs blogueurs de Courrier Expat pour une table ronde d’échanges sur l’expatriation. Il n’en fallait pas plus pour piquer notre curiosité et vouloir en savoir plus sur ces expatriés qui n’ont pas la plume dans leur poche !
Sarah de French Kilt, « Lors du Brexit, j’ai eu l’impression de devenir fonctionnaire ! »
En 2015, Sarah découvre l’Écosse lors de son premier voyage en solo. Coup de foudre pour le pays selon elle, « crise de la vingtcinquaine » selon sa mère, Sarah décide dès ce moment de s’installer en Écosse. C’est ainsi que cette journaliste devient French Kilt, blogueuse tourisme de référence pour l’Écosse.
« Lorsque je suis arrivée en Écosse, je travaillais à mi-temps dans un hostel, et dès que j’avais du temps, j’écrivais un article. Je prenais beaucoup de notes et je faisais de longues recherches. C’est une façon de faire qui m’a permis de me reconvertir plus facilement en tant que guide touristique. Aujourd’hui, je propose mes propres visites guidées en français. On ne peut pas dépendre de son blog pour gagner sa vie lorsque l’on écrit sur un sujet aussi « niche » que l’Écosse.
Mes lecteurs ne sont pas uniquement des expatriés, mais surtout des passionnés du pays. J’essaie de répondre à toutes les questions que je reçois, mais je suis parfois débordée. Au moment du Brexit, j’ai été tellement bombardée de questions que j’ai eu l’impression de devenir fonctionnaire ! Le vrai challenge de mon blog, c’est de dépasser les clichés écossais qui attirent tant les lecteurs, pour découvrir le pays plus en profondeur. J’essaie pour cela d’explorer des coins moins connus de l’Écosse. Pour le plus grand plaisir des locaux, d’ailleurs ! Récemment, une enseignante française a fait lire un de mes articles sur Paisley à ses élèves, qui étaient ravis que l’on s’intéresse à leur ville.
Je m’investis également dans un podcast sur l’Écosse intitulé « Écosse toujours », avec une amie blogueuse et journaliste, Assa, de Kiltissime. En janvier, je publie un livre de recettes écossaises aux éditions La Martinière. Mon blog a été un atout majeur pour convaincre l’éditeur. »
Alain d’À nous la Californie, « Nous avons rencontré des personnes que nous n’aurions jamais croisées sans le blog »
Alain est expatrié en Californie depuis 7 ans avec sa femme Adeline et ses deux enfants, Clara et Thomas. Depuis autant d’années, il partage les aventures de la famille sur le blog À nous la Californie, entre récits d’escapades et billets sur le business.
« Avec notre blog, l'idée était de partager notre expatriation avec notre famille et nos amis, pour qu'ils puissent suivre nos aventures et avoir des nouvelles régulières. Désormais, le cercle des lecteurs est largement en dehors de notre famille et amis.
Lorsque nous rencontrons des lecteurs assidus, cela fait toujours énormément plaisir. Plusieurs sont même venus nous voir chez nous lors de road-trips dans l'ouest Américain ! D’autres me disent parfois que le blog a été leur déclic pour tenter l'aventure de l’expatriation. C’est formidable de réaliser que toutes les heures de travail à écrire du contenu ont aidé plusieurs familles à changer de vie.
Tout les articles qui touchent au quotidien en Californie deviennent rapidement populaires. Écrire des posts est un excellent moyen de se questionner, d’apprendre et d’évoluer. En réalité, le blog m’amène à m’interroger davantage sur la France et l’Europe, que sur les États-Unis. Les commentaires reçus sur certains articles me rappellent à quel point la vie est différente des deux côtés de l’océan. »
Doniphane de Colombianito, « Le blog m’a ouvert des portes dont je n’aurais jamais pu rêver »
Lorsque Doniphane émet le projet de partir en Colombie pour son échange universitaire en 2010, beaucoup de ses amis et ses professeurs tentent de l’en dissuader. Violence, drogue...la Colombie n’a pas bonne presse à l’étranger. Pourtant, la curiosité de Doniphane est piquée et il décide de s’y rendre malgré tout. Devenu Colombianito en 2016, il partage depuis sa passion pour la Colombie afin d’aller à l’encontre de certaines idées reçues.
« Au départ, mon blog était un projet sans prétention que j’ai lancé fin 2016 pour m’amuser. Je vivais déjà en Colombie depuis sept ans, et je souhaitais partager mon expérience. Je pensais que la seule personne qui lirait mes articles serait ma maman ! (rires)
J’ai commencé par raconter mes galères, que ce soit pour le visa, payer les impôts, ou encore aller à l’hôpital. J’ai eu 5.000 visites dès le premier mois. Il n’y avait aucune information sur la Colombie disponible à ce moment-là, et une petite communauté s’est très vite créée autour du blog. Surtout, les Français expatriés se reconnaissaient dans mes témoignages, et ceux qui arrivaient étaient rassurés de savoir qu’ils allaient trouver une communauté en arrivant.
Grâce à Colombianito, j’ai eu accès à des opportunités incroyables ! J’ai pu donner des conférences, être invité par des indigènes à visiter la sierra Nevada, ou encore aller au salsadromo, le plus grand événement de salsa au monde. Une Colombienne voulait que je représente les médias français, alors que je ne suis même pas journaliste !
Cependant, si toutes ces opportunités sont incroyables et « vendent du rêve », il ne faut pas oublier les heures de travail pour écrire les articles. Je ne suis pas influenceur, et je ne souhaite pas prétendre que tout est rose dans la vie d’expatrié. On expérimente nécessairement des chocs culturels en vivant en Colombie, et la communauté qui s’est créée autour de Colombianito permet d’en parler avec d’autres Français plus facilement. »
Anecdotes d'expat au pays du soleil levant : « Je reste toujours aux aguets pour trouver une blague qui fera rire mes proches »
Le pouvoir du rire, Rose en est convaincue. Face à la frustration des premiers jours au Japon liée à la barrière de la langue et aux divergences culturelles, la franco-suissesse fait le pari de l’humour. Défi réussi ? À voir les smileys qui rigolent pleuvoir sur ses publications d’Anecdotes d'expat au pays du soleil levant, on n’en doute pas.
« Depuis mon installation au Japon avec ma famille en 2018, mes proches m’interrogent souvent sur les différences entre le Japon et la Suisse et la France. Au départ, j’étais contente de leur partager mon quotidien et souvent, je leur envoyais des photos de choses drôles. Nous en riions ensemble. Rapidement, j’ai pensé qu’au lieu de raconter dix fois l’anecdote en message privé, le plus simple serait d’en parler sur une page Facebook.
Je suis heureuse de partager avec les personnes qui sont loin du Japon. Au-delà des stéréotypes que l’on a sur le Japon qui se réduisent aux mangas, aux geishas et aux cerisiers, je souhaite montrer notre vie telle qu’elle est réellement. Nous vivons à la campagne dans une préfecture assez reculée du Japon, et notre quotidien n’a rien à voir avec celui de Tokyo.
Dans l’expatriation, la solitude peut être difficile parfois, et pouvoir rire des bizarreries du quotidien fait du bien. Je me souviens de notre arrivée au Japon et des nombreuses frustrations que je ressentais les premiers jours.Tourner des anecdotes à la dérision permet de rendre cela plus léger et de dédramatiser la situation.
Je suis toujours très à l’affût avec mon appareil photo pour capturer des choses insolites. Certaines habitudes se créent lorsqu’on est à l’étranger, mais grâce au blog, je reste aux aguets pour trouver une blague qui fera rire mes proches. »