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Le Café Joyeux, une aventure solidaire à pleines voiles aux arômes d’inclusion

Des centaines d’équipiers se lèvent chaque matin pour rejoindre les 24 Cafés Joyeux en France et à l’étranger. Particularité, la plupart de ces salariés sont en situation de handicap. Bien plus qu’une entreprise, un modèle solidaire qui donne un emploi stable et beaucoup d’espoir : “La situation de handicap dans le milieu professionnel est un sujet universel et dépasse les frontières” confie Yann Bucaille-Lanrezac, cofondateur des Cafés Joyeux.

inauguraton du café joyeux à Montpellierinauguraton du café joyeux à Montpellier
inauguraton du café joyeux à Montpellier
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 24 mai 2024, mis à jour le 17 octobre 2024

 

 

"C’est pas juste, je suis handicapé mais je peux être utile, je veux un métier, comme toi.”

 

Yann Bucaille-Lanrezac est suresnois de naissance mais breton de cœur. Il vit à fond, salarié puis entrepreneur. En 2007, son épouse, Lydwine, fait un burn out sévère. “La souffrance qu’elle vit est difficilement mesurable. Elle se sentait incomprise par notre entourage.” confie Yann Bucaille avec humilité dans le podcast Pause d’Alexandre Mars.  A sa guérison, il y voit un miracle, “c’est un déclencheur douloureux mais incroyable. Nous nous sommes relevés, ensemble.” Il décide de quitter son entreprise et s’installe en famille en Bretagne. Le couple ouvre un hôtel à Dinard : Castelbrac. Marin aguerri, Yann devient skipper d’un voilier qu’ils construisent avec Lydwine, nommé Ephata. Il fonde “Emeraude voile solidaire” en 2011 et organise des sorties avec des personnes fragilisées dans la vie. 

 

Ephata, le voilier de Emeraude voile solidaire
Ephata, le voilier de Emeraude voile solidaire 

 

Un jour, Théo, jeune autiste de 20 ans participe à un de ces voyages “Il parait que t’es patron Capitaine. Tu aurais un métier pour moi ?” Yann lui répond non. “C’est pas juste, je suis handicapé mais je peux être utile, je veux un métier, comme toi.” Yann rentre chez lui le soir “j’étais par terre”. confie-t-il . Quelques mois plus tard, les mots de Théo résonnent toujours dans la tête de Yann. Avec Lydwine, ils embauchent Vianney-Marie, le fils d’un ami, atteint de trisomie, qui devient “l’assistant joyeux” à l’hôtel. Nous sommes en 2016. Le premier Café Joyeux va bientôt voir le jour. 


 

Le Café Joyeux hisse les voiles jaunes et prend corps 

En décembre 2017, le couple Bucaille lance un premier café dans le centre ville de Rennes, en Bretagne. L’objectif est de permettre à des handicapés mentaux et cognitifs d’avoir un emploi stable. L’entreprise est labellisée ESUS (entreprise solidaire d’utilité sociale). Trois mois plus tard, un deuxième café voit le jour, cette fois à Paris. L’inauguration a lieu le 21 mars 2018, journée mondiale de la trisomie, en présence d’une marraine de taille, Brigitte Macron. “Il y avait des caméras partout, un monde fou… La première dame est restée plus de deux heures avec nous” se souvient Edwige De France, Responsable, ou plutôt “Capitaine” de la communication et des partenariats, rencontrée dans le Café Joyeux des Champs Elysées. 

 

 

Yann et Ludivine Bucaille Lanzerac
Yann et Lydwine Bucaille Lanzerac

 

 

Les cafés joyeux se multiplient. “Un business, sans business plan car ce n’est pas le but.” commente la Capitaine de marque. “C'est une mission de cœur. Elle n'est pas simple, mais elle est tellement enthousiasmante depuis que je suis arrivée dans l’aventure en 2018”. A chaque ouverture, l’identité du lieu est bien spécifique : “Nous transmettons de la joie, avec notre propre pantone, le jaune joyeux. Les matériaux utilisés réchauffent l’atmosphère, avec beaucoup de simplicité” résume Edwige De France. Le design unique est pensé par Sarah Poniatowski, designer et décoratrice d’intérieur. En 2024, 24 Cafés Joyeux voguent paisiblement. 

 

 

le jaune du café joyeux

 

 

C’est mon premier CDI. Jamais je n’en avais eu avant.

 

Le Café Joyeux, des équipiers, des skippers et des capitaines 

Chaque café fonctionne avec des équipiers, menés par des skippers, des personnels encadrants. Guillaume est coéquipier à Paris depuis deux ans : “C’est mon premier CDI. Jamais je n’en avais eu avant. J'aime le sourire de ceux qui viennent nous voir tous les jours.” Agathe est coéquipière depuis 4 ans “Après Paris, je suis mutée à Lyon. J’apprends les croque monsieur avec Stéphane .” Tatiana est, quant à elle à Bordeaux : “ma plus grande fierté est de rendre fière ma famille et leur montrer que je m’épanouis dans mon travail”. A Lyon depuis deux ans, Victoria est coéquipière bilingue et apprend chaque jour à être plus autonome. “Ils nous apportent énormément. Je souhaite créer de la valeur avec nos différences” précise Yann Bucaille-Lanrezac. “Le bien être de chaque équipier compte avant tout. Nous avons lancé un centre de formation d’apprentis joyeux, une école qui délivre un diplôme reconnu par l'État. Ils peuvent travailler ailleurs, ils ont cette liberté maintenant !” 

 

Le Café Joyeux, le sourire partout

 

Au moins 65% du personnel de chaque Café Joyeux est en situation de handicap. Au total, 200 équipiers joyeux se lèvent chaque matin pour venir travailler et proposer des boissons, de la restauration - pensée entre autres par le Chef Thierry Marx - mais aussi des produits dérivés et une gamme de café de grande qualité. Des Cafés Joyeux Inside se lancent au sein des entreprises, “de véritables ambassadeurs de l’inclusion” souligne Edwige De France. Des collaborations avec de grandes marques - comme Nespresso -  se mettent également en place. 

 

 

collaboration avec Nespresso et Café Joyeux

 

 

On ne veut pas se déployer à l'étranger comme une simple entreprise, de façon industrielle. Nous voulons rester très humain.

 

Le café joyeux prend le large à l’international 

Un jour de 2019, une jeune maman, Filipa Pinto Coelho contacte Yann Bucaille et lui propose de créer un Café Joyeux au Portugal. Au début, l’entrepreneur dit non. Filipa insiste. En novembre 2020, le premier Café Joyeux hors de France est inauguré à Lisbonne. Une grande joie pour Yann Bucaille, présent ce jour-là et interrogé par l’édition lepetitjournal.com de Lisbonne : “ La question des personnes en situation de handicap dans le milieu professionnel est un sujet universel et dépasse les frontières. Forcément, on se dit que si cela marche, il y en aura d'autres, en Europe et peut-être ailleurs. (...) Nous avons des demandes un peu partout mais il faut y aller par étapes. On ne veut pas se déployer à l'étranger comme une simple entreprise, de façon industrielle. Nous voulons rester très humain.” Car l’entrepreneur le sait mieux que personne : la mission est telle qu’il n’est pas possible d’avoir une stratégie d’expansion internationale. Tout se base sur des rencontres puissantes et solides de capitaines de pays. 

 

Inauguration du Café Joyeux à Lisbonne - lepetitjournal.com
Inauguration du Café Joyeux à Lisbonne - lepetitjournal.com 


 

Inauguration du Café Joyeux à Lisbonne : le premier à l'étranger


 

En 2024, 6 Cafés Joyeux existent dans le monde, quatre au Portugal, un en Belgique, un aux Etats-Unis. Pour la Capitaine de la marque, il est essentiel de garder l’identité du Café Joyeux, jusqu’aux menus, “mais il faut s’acculturer de son pays d’accueil. Juridiquement, nous devons faire des recherches sur la gestion d’entreprise sur place car, en France, nous sommes une fondation”. Au quotidien, le concept s’adapte sans dénaturer sa signature, notamment aux Etats-Unis : “Pas de donuts vendus ici ! Nous avons choisi de garder le nom français, cela donne un certain charme, et les Américains adorent le style à la française. Nous avons, en revanche, décidé de traduire la tagline “Served from the heart” pour mieux faire passer le message de notre mission” témoigne Sylvie Giret, Capitaine du Café Joyeux de New York, inauguré en février 2024. Ailleurs, deux projets de Cafés Joyeux sont en réflexion, en Europe. 

 

 

Sylvie Giret, Café Joyeux à New York : « la différence est une force »

 

 

inauguration du café joyeux à New York
inauguration du café joyeux à New York début 2024 

 

 

il y a beaucoup de jeunes qui arrivent dans le monde du travail qui veulent donner du sens à leur activité. J’espère me faire remplacer par des gens bien meilleurs que moi !

 

N’importe où dans le monde, Yann et Lydwine Bucaille-Lanrezac et leur équipage veulent changer le regard sur le handicap et prouver qu’une barrière apparente est, en fait, une opportunité. Est-ce une mission pérenne ? “Nous avons fait notre part avec Lydwine, nous allons continuer de la faire.” répond le cofondateur.  “La mission continuera au-delà de nous bien sûr, il y a beaucoup de jeunes qui arrivent dans le monde du travail qui veulent donner du sens à leur activité. J’espère me faire remplacer par des gens bien meilleurs que moi ! ” Pour que, en franchissant la porte d’un Café Joyeux, des personnes handicapés  - et leur famille - continuent d’avoir de l’espoir : “Un jour, moi aussi, je pourrai travailler…” 

 

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