

Faute d'une majorité suffisante à l'Assemblée en faveur d'un changement de statut de Gaz de France, la fusion entre le gazier français et l'entreprise Suez, annoncée fin février par le gouvernement, se trouve compromise. Et le Premier ministre, confronté à une fronde de sa majorité, de nouveau destabilisé
Pour le mariage, il va falloir attendre encore un peu (Photo : AFP)
Le mariage entre Suez et Gaz de France, voulu par le gouvernement, devait être consommé avant l'été. Sauf coup de théâtre, il ne le sera pas avant l'automne? et encore ! Faute d'une majorité suffisante à l'Assemblée nationale en faveur d'un changement de statut du gazier français, Dominique de Villepin a dû remiser au placard, hier, son projet de fusion entre les deux géants de l'énergie français.
"Il n'y a pas aujourd'hui de majorité suffisante", a reconnu hier après-midi le chef de file des députés UMP, Bernard Accoyer. "Notre groupe est partagé sur l'opportunité, au sens industriel comme au sens politique, de la perspective d'une fusion entre GDF et Suez", a-t-il ajouté.
Les prix du gaz en cause
Annoncée à la va-vite le 25 février dernier, la fusion entre Suez et GDF a pour but de contrer une OPA de l'Italien Enel sur le groupe énergétique et environnemental français. Pour qu'elle devienne effective, le gouvernement doit toutefois obtenir des députés qu'ils acceptent une modification du statut du gazier français, afin de réduire à 33% la part de l'entreprise détenue par l'Etat. Cela implique de revenir sur une loi votée en 2004, à l'initiative de Nicolas Sarkozy, qui interdit à l'Etat de descendre en dessous de la barre des 70%.
Or, de nombreux députés, même UMP, se refusent à voter ce changement de statut. Ils redoutent qu'une privatisation de GDF n'entraîne une hausse des prix du gaz... et n'accroisse le mécontentement des Français. Une crainte qui peut sembler justifiée : selon le quotidien La Tribune, la facture EDF ?entreprise dont le capital a été ouvert l'année dernière? a bondi de 48% entre avril 2005 et avril 2006.
Nouveau coup dur pour Villepin
Prenant acte de cette mini-fronde, Dominique de Villepin a assuré hier être "très attentif aux différentes propositions" des parlementaires, indiquant que "le gouvernement prendra le temps" de les écouter. Le Premier ministre, pour autant, ne s'est pas privé de critiquer ses propres troupes. "Parfois en politique, il faut un peu de courage", a-t-il déclaré, en référence à peine voilée à ceux qui refusent de le suivre.
"Ce n'est ni le moment ni l'heure", lui a répliqué le député sarkozyste Dominique Paillé. "Un gouvernement qui n'est pas dans une santé florissante ne peut pas se permettre de passer ce type de réforme à la sauvette", a-t-il ajouté, assurant que les deux tiers des parlementaires UMP étaient de cet avis. Des députés que Villepin aura, sans doute, bien du mal à convaincre?
Valentin BONTEMPS. (LPJ) 15 juin 2006
Quel avenir pour le projet de fusion ?
Si le mariage entre les deux géants français de l'énergie n'est pas enterré, il se trouve sérieusement compromis. Plusieurs possibilités s'offrent aujourd'hui à Dominique de Villepin : faire voter le texte à l'Assemblée avant la trêve parlementaire estivale, avec le risque d'un échec ; le faire voter dans un premier temps au Sénat, avant le 14 juillet, puis le renvoyer à l'automne, affiné, devant l'Assemblée ; ou bien attendre la rentrée, avant de prendre toute initiative. Du côté de la direction de Suez et GDF, on réfléchissait déjà hier à des scénarios alternatifs, en cas d'échec, Suez voulant à tout prix éviter une OPA d'Enel. Les deux groupes pourraient ainsi se tourner vers d'autres partenaires européens, notamment espagnols ou britanniques.
Lire aussi :
Le Figaro, GDF?Suez : La fusion de passe pas à l'Assemblée
Libération, Fusion Suez-Gdf : l'UMP avance à reculons
RFI, UMP : les affaires courantes


































