

Comédienne, professeur, journaliste... Cannelle Helgey ne manque ni d'envie ni de projet. Rencontre avec une jeune femme bien décidée à bouger le Cambodge culturel !
À quelle occasion êtes-vous venue au Cambodge pour la première fois ?
En mai 2009, j'ai rejoint mon compagnon qui avait fait le voyage en début d'année et qui était revenu très enthousiaste? ou "perché", en d'autres termes plus explicites. Je me suis donc interrogée sur ce que le Cambodge pouvait bien avoir d'aussi extraordinaire. Je ne connaissais pas du tout l'Asie qui me paraissait trop éloignée de moi, inaccessible...À Paris je tentais vainement d'exercer mon métier de comédienne, mais je sentais mon énergie s'affaiblir et ma bonne humeur se perdre dans une société de plus en plus individualiste... Séduite à mon tour, ma décision fut prise après ce séjour : prendre un virage radical dans le cours de ma carrière avec pour seule richesse un billet d'avion en main, je suivais l'homme que j'aimais en prenant le risque de me réaliser enfin !
Quelles sont vos principales occupations ?
Je travaille en grande partie aux cours de théâtre que j'enseigne depuis mon arrivée en décembre 2009. J'attache une importance toute particulière à cette activité et à sa communication car je suis convaincue que la pratique du théâtre, à un quelconque niveau et à n'importe quel âge, apporte énormément à la construction de soi-même et à l'expression envers autrui. De ce fait, en dehors des cours, je fais du travail de recherche, de textes, de la pédagogie à adopter car l'enseignement est un tout autre métier. J'organise également des lectures café-théâtre, l'occasion pour moi de me faire plaisir en retrouvant les sensations du jeu que j'aimerais continuer à pratiquer? D'autres projets sont en cours mais "chuuut"? pour le moment je le garde pour moi !
Que pensez-vous des manifestations culturelles au Cambodge ?
L'accès à la culture, qu'il soit de l'ordre du divertissement ou des loisirs, n'est pas évident. Les acteurs culturels sont nombreux mais travaillent individuellement, sans se faire connaître suffisamment du grand public, notamment chez les artistes indépendants, comme moi, qui sont les moteurs de nouveaux projets, et qui se rencontrent rarement. Nous sommes pourtant au c?ur même d'un phénomène de société dans le monde entier, et particulièrement dans un pays comme le Cambodge qui a connu ses heures de gloire dans ce domaine : la revalorisation de l'art !
Si on est francophone, anglophone ou khmer les approches ne sont pas les mêmes. En ce qui me concerne, j'aimerais vraiment travailler à un rapprochement, partager mon savoir et apprendre la culture khmère... dans l'idéal, former une compagnie pour allier spectacle vivant asiatique et occidental. Je suis peinée de savoir qu'il ne reste plus grand chose des années de protectorat français.
Où vous échappez-vous le temps d'un week-end ?
J'ai fait les principales routes du Cambodge qui m'ont menée à Siem Reap, Sihanoukville, Kampot et Kep. J'aimerais maintenant aller voir Battambang -j'en profiterais pour aller rencontrer les Phare Ponleu Selpak sur leur lieu de travail !- jouer à l'aventurière dans les forêts du Ratanakiri et du Mondolkiri, arpenter les campagnes mais pour cela il faudrait que j'ai la possibilité de m'échapper plus souvent.
Quelle habitude typiquement khmère avez-vous adoptée ?
La position en amazone sur les motos et griller les feux rouges lorsque je suis sur mon vélo.
Que faites-vous lorsque vous avez le mal du pays ?
Je regarde les informations sur TV5 Monde, ça me remet tout de suite les idées en place !
Votre endroit de prédilection pour boire un coup entre amis ?
Je suis rarement dans les mêmes endroits, j'aime diversifier mes découvertes et mes sorties. Mais je ne vais pas tarder à être de plus en plus chez moi et faire des soirées entre amis pour éviter les mauvaises habitudes.
Comment voyez-vous le pays dans 10 ans ?
Il faudrait poser cette question aux acteurs politiques? Que laisseront-ils à leurs enfants ?
Votre expression khmère préférée ?
"Samnang laor" qui veut dire "bonne chance". Je ne crois pourtant pas au hasard mais je crois que j'ai une bonne étoile qui me guide par là.
Votre meilleure découverte gastronomique ?
Très difficile de trouver un plat gastronomique au sens propre du terme quand on sait que le Cambodge n'a pas d'identité culinaire ; sauf le Amok et le Lok-Lak que je me suis empressée de goûter quand je suis venue la première fois. Dommage que ceux-ci aient été banalisés dans certains restaurants asiatiques. Sinon, je raffole de ces petites boulettes gluantes sucrées et/ou salées enveloppées dans des feuilles de bananier qu'on trouve sur les marchés. J'ai découvert des fruits de toutes sortes et de toutes les couleurs, tous aussi savoureux les uns que les autres, j'adore le jus de fruit du dragon. Et puis il y a des plats dans lesquels on ne sait pas trop ce qu'il y a dedans parfois, mais c'est bon ! L'aventure c'est l'aventure !
Votre expérience la plus insolite ?
Mon retour de vacances au Vietnam le dernier dimanche du nouvel an khmer. Je suis restée bloquée 3h au milieu d'un village quelque part avant la traversée du bac, seule barang dans un bus plein à craquer. Je ne rentrerais pas dans les détails, il faut le vivre pour le croire.
Ce qui vous étonnera toujours?
La facilité avec laquelle ce pays retourne le cerveau de certains hommes et qui se trouvent une liberté mal pensée.
Pourquoi les khmers sur la route se mettent sur la voie de droite pour tourner à gauche ? Leur illogique de façon générale et qui m'amuse parfois... lorsqu'ils ne jouent pas avec ma vie.
De voir autant d'eau tomber du ciel lors de la mousson.
Ce qui ne vous surprend même plus?
Les sonos mal réglées et les décibels poussés à fond à 7h du matin pour une cérémonie ou pour une opération commerciale.
Ce que vous ne pouvez pas avaler?
Le durian of course ! J'ai pourtant appris à manger de tout mais, là, vraiment, je ne peux pas ! J'ai essayé la glace, mais ça ne passe pas non plus.
Ce qui vous a convaincu d'habiter ici ?
Le sourire des Cambodgiens en toute circonstance, leur spontanéité, la qualité de vie, des rencontres formidables que je n'aurais pas faites si j'étais restée en France, ce voyage en pays bouddhiste dont j'avais besoin.
Un conseil pour les nouveaux arrivants?
Soyez curieux, prenez le temps de vivre, d'observer ce qui vous entoure, de discuter avec les locaux -quand c'est possible !- et d'apprécier ce qui ne sera plus demain.
Si vous deviez partir demain?
Je vais d'abord terminer ce que j'ai commencé. Et lorsque je sentirais qu'il est temps de partir, c'est sans doute parce que j'en aurais envie, alors je prendrais un nouveau billet d'avion vers un autre horizon? mais je n'ai pas encore dit mon dernier mot !
Entretien réalisé par SK (www.lepetitjournal.com/cambodge.html) mercredi 15 septembre 2010
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