

Directrice du Palazzo Grassi et fondatrice de Romaeuropa, Monique Veaute vit depuis 25 ans en Italie. Le 5 septembre dernier, elle a reçu les honneurs du Sénat lors de la journée des Français de l'étranger. Elle revient sur le rôle culturel que peut jouer la France en Italie
Que retirez-vous de la journée du 5 septembre ?
Cette journée a été particulièrement importante Je dirais même plus, ce fut un honneur car le Sénat français m' a reconnue comme l'une des personnes qui oeuvrent en Italie depuis fort longtemps. Cela rendait hommage à la fois au travail que j'ai effectué via la fondation Romaeuropa mais également aux relations étroites que j'ai pu tisser avec les organisations italiennes depuis 25 ans.
Monique Veaute oeuvre depuis 25 ans à promouvoir l'art et la culture contemporaine en Italie.
Comment définiriez vous la place de la France à l'étranger ?
Il est très difficile de parler en général de la place de la France à l'étranger. Chaque pays a une histoire singulière avec la France. Les pays africains par exemple - avec lesquels j'ai eu l'occasion de collaborer dans le cadre de la francophonie - ont une relation ambivalente avec la France. Ils ont une grande attente culturelle et économique mais aussi et surtout une demande de reconnaissance de leurs identités singulières. En ce qui concerne l'Europe, là encore, la diversité est grande. Avec l'Allemagne, les relations sont pacifiées et la collaboration au niveau culturel est très intense. En Italie, si nous nous considérons réciproquement comme des amis et même des cousins, il n'en existe pas moins des divergences liées à des modes d'organisation administratif, culturel et politique différents. Cela peut expliquer l'insatisfaction, l'incompréhension face au manque de synergies que l'on peut parfois constater entre les deux pays. En tout état de cause, la France jouit en Italie d'une excellente réputation tous partis politiques confondus et leur lien ne pourra jamais vraiment se distendre.
Dans un pays aussi riche culturellement que l'Italie, que peut apporter une vision française ?
La France peut collaborer avec l'Italie selon deux modalités complémentaires. La première est d'y rechercher les fondements de notre culture européenne. La France doit donc effectuer un travail d'histoire qui ne peut qu'enrichir notre rapport au monde contemporain. La seconde consisterait en la promotion de nos modèles d'organisation en Italie. Le mode de fonctionnement français - qui a intégré la coopération surtout depuis que l'Europe est en marche - pourrait être un apport important en Italie où malgré tout l'individualisme et l'anarchie créative tendent à prédominer.
Le Centre d'Art Contemporain de la Pointe de la Douane François Pinault Foundation est un projet d'envergure. A terme, ne peut-il pas concurrencer la Villa Médicis à Rome ?
La Pointe de la Douane, nouveau musée qui abrite une partie de la collection de François Pinault, fait partie avec le Palazzo Grassi d'une unique institution. Même si des opérateurs culturels s'y rencontrent et des manifestations s'y déroulent, elle n'a pas vocation à être une résidence d'artiste ni même à se transformer en atelier de production d'?uvres d'art. La villa Médicis, que je connais bien pour y avoir travaillé pendant 10 ans, est un pôle de rayonnement extraordinaire et unique. Elle permet à des artistes de travailler et de rencontrer ce qui est à l'origine de notre culture occidentale, à savoir la culture gréco-romaine, baroque, la renaissance italienne, etc. En tant que pôle de rencontres d'artistes contemporains de toutes les disciplines, la Villa Médicis est un creuset et un modèle pour bien des institutions, et pas seulement italiennes.
Propos recueillis par Sara Fredaigue (www.lepetitjournal.com - Rome) mardi 15 septembre 2009
Pour aller plus loin : Romaeuropa Festival - Rencontre avec Monique Veaute (LPJ - 7 novembre 2007)
Bio en bref :
Directrice actuelle du Palazzo Grassi (Venise), Monique Veaute a commencé sa carrière en France en 1977 en tant que journaliste à Radio France avant de se tourner vers la programmation musicale (elle sera notamment Directrice des soirées sur France Musique et directrice de la section Musique de la Biennale de Paris). En 1984, à la demande de Jean-Marie Drot, Directeur de la Villa Medicis, elle crée Romaeuropa Festival dont elle devient la directrice générale en 2007. Elle a été successivement, Conseiller technique pour la Culture et l'Audiovisuel du Président de l'Assemblée Nationale (de 1989 à 1991), Conseiller scientifique de l'INDA (l'Istituto Nazionale del Dramma Antico, réseau de théâtres antiques du sud de l'Italie de 1999 à 2002), Commissaire général du Festival francophone en France de 2004 à 2006. Depuis 2005, elle est membre du conseil d'administration de l'Académie de France à Rome. Monique Veaute est par ailleurs chevalier de l'ordre national du Mérite et chevalier des arts et lettres du Ministère de la Culture (France) et Cavaliere al Merito della Repubblica Italiana (Italie).


































