Il y a 100 ans le scientifique danois, Knud Rasmussen, quittait la base Thulé pour un voyage de plus de 18 000 km à travers l'Arctique, du Groenland à la Sibérie, et qui allait durer trois ans. Il s'agissait de la 5e expédition Thulé considérée comme la plus grande réussite de Rasmussen.
Knud Rasmussen
Knud Johan Victor Rasmussen (1879 - 1933) scientifique polaire et anthropologue est né à Illulissat au Groenland, il est considéré comme l'un des pères de l’esquimaulogie.
Il est le fils d'un missionnaire danois et d'une mère inuit. Il grandit au Groenland au milieu des autochtones, apprend leur façon de vivre dans des conditions extrêmes: la chasse, la conduite de traîneaux avec des chiens et leur langue, le kalaallisut, langue très proche de l’inuktitut, parlée par les Inuits canadiens, qui dispose de plus de 50 mots pour décrire la neige.
Il entreprend une première expédition arctique entre 1902 et 1904 connue sous le nom d'expédition littéraire dont il fait le récit dans Le Peuple du pôle Nord (1908).
Les expéditions Thulé
En 1910, Knud Rasmussen et Peter Freuchen, lui aussi anthropologue, explorateur, fondent avec le soutien de l'Eglise groenlandaise, une mission et un comptoir à UUmmannaq au Groenland qu'ils nomment « comptoir de Thulé ».
Pourquoi Thulé ?
C'est en référence aux géographes de l'Antiquité qui dénommaient "Thulé", les espaces les plus septentrionaux habités par l'Homme. Ensuite, au Moyen Âge, « Thulé » est utilisé pour nommer l'Islande, le Groenland ou une autre île encore située tout au Nord de l’Europe mais qui n’existe finalement pas.
La base Thulé servira de camp de départ à une série de sept expéditions, connues sous le nom d' « expéditions Thulé », entre 1912 et 1933.
La cinquième expédition Thulé, qui est considérée comme la plus aboutie, a duré 3 ans de 1921-1924 et a pour but de comprendre l'origine du peuple Inuit et de recueillir des données dans diverses disciplines. Une équipe de sept hommes (groenlandais et danois) comprenant des experts en botanique, géologie, météorologie, cartographie, ethnographie et archéologie partent dans un voyage en traineau, long de 18 000 kilomètres. Ils se rendent dans l'Est de l'Arctique canadien, où ils recueillent des témoignages et rassemblent des objets dont certains sont maintenant exposés dans les musées danois notamment au Musée national (voir les photos d’archives mises à disposition sur le site du musée).
Il s’agit de l’une des collections arctiques les plus importantes au monde avec plus de 20 000 costumes, amulettes, armes et autres objets. Cette collection compte aussi plus de 3 000 photographies et dessins.
Rasmussen poursuit ensuite son voyage pendant encore 16 mois avec deux Inuits jusqu’au nord de l’Alaska, au détroit de Béring et en Sibérie. Il devient alors le premier Européen à franchir le passage du Nord-Ouest en chien de traineau.
Il fait le récit de son expédition dans Du Groenland au Pacifique : deux ans d'intimité avec des tribus d'Esquimaux inconnus.
La contribution de Knud Rasmussen à la postérité
Kunupaluk est le nom que les Inuits ont donné à Knud Rasmussen. Grâce à la complicité et la proximité qu’il entretient avec ce peuple, il acquiert des connaissances et rassemble des informations qui sont encore aujourd'hui une référence pour ceux qui s'intéressent à l'Arctique.
La 5e expédition Thulé a permis par exemple de montrer que les Inuits du Groenland, du Canada, de l'Alaska et de la Sibérie sont liés par une langue, une vision du monde, des traditions communes et une même culture et ce sur une zone s’étendant sur plus de 6 000 km. Le travail de Rasmussen a permis aussi de mettre en évidence la spiritualité du peuple inuit.
Rasmussen a continué à voyager entre le Groenland et le Danemark pour donner des conférences et écrire. Lors de la sa septième expédition Thulé (1933), Knud Rasmussen contracte une pneumonie et en meurt à son retour à Copenhague à l'âge de 54 ans.
Knud Rasmussen est enterré à Vestre Kirkegård dans le quartier de Vesterbro à Copenhague. Une statue de Povl Søndergård a été érigée en souvenir de l'explorateur polaire à Klampenborg en 1963.
Sa maison natale à Illussat est devenue un musée.
Vous pouvez aller visiter (de Pâques à la mi-octobre) la maison d’été qu’il a faite construire avec sa femme, Dagmar Rasmussen, en 1917 à Hundested, loin de l’agitation de la capitale, au nord du Sjaelland.
Pour découvrir des écrits de Knud Rasmussen traduits en français
- En traîneau du Groënland à l'Alaska, traduit du danois par Judith et Gilles Gérard-Arlberg, Paris, Éditions Je sers, 1948.
Le récit de la 5e expédition Thulé - à trouver sur des sites de vente de livres d’occasions.
- Du Groenland au Pacifique : deux ans d'intimité avec des tribus d'esquimaux inconnus, traduit du danois par Cécile Lund et Jules Bernard, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 1994.
Le récit des 16 mois de voyage avec les deux Inuits jusqu’au nord de l’Alaska, au détroit de Béring et en Sibérie.
- Laponie - Voyage au pays des fils du soleil, Knud Rasmussen, traduit du danois par Jacques Privat, collection Phare, Éditions Esprit, 2008.
Knud Rasmussen a également effectué des voyages en Laponie. Dans ce livre, il présente l'histoire du peuple sami et fait également le récit de son propre voyage à la recherche d'un Sami.
- Contes du Groenland, collectés par Knud Rasmussen, traduits du danois par Jacques Privat, Lausanne, Esprit ouvert, 2018.
Il retranscrit dans ce livre les traditions orales, les histoires, les mythes qu’il a entendus lors de ses expéditions.
- Contes inuits : un ourson chez les hommes, collectés par Knud Rasmussen, choisis, traduits et adaptés par Nils Ahl, Paris, L'École des loisirs, 2009
C’est dans un récit de voyage de Knud Rasmussen que l’auteur Nils Ahl a choisi des contes avec pour personnages un ourson, des monstres et des enfants courageux.
Knud Rasmussen a écrit le scénario du film Palos brudefærd / Les Noces de Palo réalisé par Friedrich Dalsheim et achevé en 1934:
Une bande dessinée:
Malaurie, l'appel de Thulé. Scénario: Makyo. Dessins: Frédéric Bihel. Delcourt, 2019.
Jean Malaurie embarque le 1er juillet 1950 à Copenhague pour un long voyage vers le Groenland, ce territoire isolé où son périple va le mener jusqu’à la communauté d’esquimaux polaires des Inughuit à Thulé, au nord-ouest de l’île, ce comptoir fondé en 1910 par Knud Rasmussen. Là, il va faire la rencontre du chaman Uutaaq avec lequel il veut comprendre le message des minéraux, de la glace, la parole des falaises. Malaurie sera surnommé "l’homme qui parle avec les pierres" ; il effectue aussi des prélèvements, des mesures et cartographie la région de Qaaqqutsiaq en réalisant au passage un recensement de la population. Durant cette mission au pôle nord, il va devoir affronter la rudesse de la nature mais aussi se faire accepter par les Inuits.